La Tribune de Lyon

La Sainte- Russie : Avant Poutine, Raspoutine

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Le resto de la semaine. À table

Il y a peu, la place Commandant­Arnaud pouvait se considérer comme une Little Italy croix– roussienne avec son épicerie, son restaurant italien et son réparateur de Vespa. Mais le monde tourne vite, à s’en décrocher les pôles. Il ne subsiste, de l’invasion trans– alpine, que le réparateur de scooters, et vient de s’installer une devanture inattendue : « Restaurant russe » . Inutile de rappeler que la gastronomi­e soviétique en général, et la cuisine russe en particulie­r, n’ont pas une image particuliè­rement scintillan­te, sinon le caviar, dans ces restaurant­s où vous n’êtes pas à l’abri de recevoir un archet de violoniste dans l’oeil. Face B ( comme « Bolchéviqu­e » ) , le cliché se réduit au régime choupatate– vodka pour le peuple.

On a bien vu Poutine se faire une côte de boeuf au barbecue devant les caméras avec son copain Medvedev. Mais, vraiment rien à voir. Ce restaurant, on vous le dit tout de suite, délicieux, évoque plutôt une Russie d’avant, celle de Raspoutine, et de Nicolas II, dont un portrait orne la salle. Il y a des lustres à pampilles, des chandelier­s sur les tables et surtout une cuisine qui sait ce qu’elle a à dire sans se prendre pour une star un tzar. Ne serait- ce que la formule déjeuner à 12,50 euros ( on ne prend pas les roubles), qui donne l’impression de traverser la Bérézina à ski nautique. La salade maroussia, sorte de tartare, de fromage de brebis du Causase, cornichons malossol, concombre, ail, crème fraîche, aneth est tout simplement un modèle d’équilibre et de fraîcheur, surmonté d’une olive noire. Quant au kotleti, un mélange de porc et de boeuf hachés, pané, épicé, croustilla­nt, il s’accompagne notamment de légumes cuits au feu de bois, comme au

lance- flammes, pour un fondant et un fumé léger remarquabl­e. On a aussi aimé les ravioles à la russe, de même que l’assortimen­t végétalien ( le mot d’avant pour dire végan) : caviar d’aubergines, chou mariné, carottes marinées à l’ail ; salade de haricots rouges, pommes de terre, choux, betteraves, etc. Les plats étant relativeme­nt copieux, on n’a pas soulevé des sujets comme la goulash cosaque ( au vin rouge), le poulet stroganov ou le koulibiac de saumon. Mais on en a une bonne idée, très bonne même, car il existe un autre La Sainte- Russie, du même propriétai­re, que nous avons exploré le soir, plus festif ( chants russes, vodka). Le chef, Russe authentiqu­e, ne parle pas français, mais Irina, au service, soustitre tous les plats. Un bon Baïkonour pour une cuisine méconnue.

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