Mon déjeuner avec
Figure peu familière du grand public, Grégory Doucet a de multiples visages :
diplômé d’école de commerce — « j’y ai beaucoup appris » , confiet- il, « notamment à naviguer dans certains milieux professionnels » — bureau avait été évacué. Il fallait y retourner, personne ne nous suivait. » Et de dresser, comme il l’a souvent fait au cours de notre entretien, un parallèle avec l’écologie. « Il y a des situations de crise où l’audace est la réponse. Il faut de la volonté pour affronter la crise climatique.
Il ne s’agit pas seulement de faire le copier- coller du programme du voisin. Il faut vraiment en avoir envie. »
Ninkasi Part- Dieu
59 rue Desaix, Lyon 3e
Un hamburger végétarien, un bagel saumon. Un Coca et deux cafés. 25,40 €. un sweat, a tenu à être présente lors de l’interview. Elle n’est jamais intervenue au cours des échanges, sauf pour répondre à « son » candidat qui la taquinait sur son jeune âge au détour d’une question. Du haut de ses 46 ans, en veste de costume, l’aspirant maire ne détonne pourtant pas dans un Ninkasi Part- Dieu rempli de cadres en pause déjeuner éclair. Si le choix de ce restaurant — chaîne locale mais chaîne tout de même — peut surprendre lorsque l’on ignore qu’il se situe tout près du QG des Verts, notons que le porte- voix de l’écologie politique a choisi l’un des rares plats « végé » du menu… et a fait attention à ne rien laisser dans son assiette pour éviter le gaspillage.
22.08.1973
Naissance à Paris. Il grandit aux Ulis ( Essonne).
1997
Année de présidence de l’association GENEPI ( Groupement étudiant national d’enseignement aux personnes incarcérées).
2002
Début de carrière dans l’humanitaire par une mission de quatre ans aux Philippines.
2009
Arrivé à Lyon, il commence à travailler au siège de Handicap International ( Lyon 8e).
2019
Militant depuis dix ans à EELV, il est choisi pour incarner l’écologie politique aux Municipales de 2020.
de la température moyenne sur le globe, l’espèce humaine n’aura jamais vécu dans un tel contexte. Qui est capable d’en prédire les effets sur l’humanité ?
Raison de plus pour ne pas perdre de temps à se diviser, non ?
Je pense qu’offrir l’alliance de la gauche aux électeurs, c’est se moquer d’eux. Le sujet n’est pas de savoir si l’on fait A plus B plus C. Depuis le début de notre démarche, nous avons dit que nous voulons rassembler les écologistes. Nous avons été très, très ouverts et nous n’avons fermé la porte à personne. Mais le projet de l’écologie ne peut pas se diluer dans autre chose. La logique d'alliance est mortifère pour nous car elle sous- entend que l'écologie peut être un accessoire. Si nous parvenons à porter notre projet, nous arriverons très probablement à nous mettre ensemble au deuxième tour.
Et si vous n’y êtes pas ? Car si l’on vous suit, un second tour opposant une liste LReM à une liste LR vous condamnerait à siéger dans l’opposition.
( Silence). Dans ce cas, les électeurs auront tranché. Je pars avec un objectif : remporter cette élection et gouverner cette ville. Notre stratégie est celle qui nous semble la plus claire, cohérente, intelligible et saine, j’ai envie de dire. Nous souffrons de ce système politique qui donne l’impression d’être dans les arrangements. Je ne suis pas un homme de ça. Mon boulot, c’est de rassembler les écologistes sous la même bannière. Si d’autres sont plus préoccupés sur leur propre bannière, ils ne sont pas sur le même logiciel que nous. Tout était possible, nous n'avons fermé la porte à personne. Nous portons l’ambition de faire de Lyon la capitale de l’excellence écologique et je fais confiance aux électeurs.
Si tous les candidats à la Mairie de Lyon parlent d’écologie, comment allez- vous vous différencier ?
Il faut demander cela à nos adversaires ! Comment peuvent- ils être crédibles sur ce sujet alors que nous défendons toutes ces thématiques depuis des décennies ? Notre historique va parler pour nous. L’écologie n’est pas un sujet neuf. Au mieux cela fait 50 ans que l’on devrait en parler. Que certains se mettent à en parler aujourd’hui, très bien. Mais pour nous, l’écologie politique est une approche globale. Est- ce que les autres candidats tirent les leçons de ce qu’implique le dérèglement climatique ? Est- ce qu’on les entend dire qu’il faut ralentir le commerce mondial ? Je ne fais pas l’apologie de la décroissance mais il existe des secteurs qu’il faut faire décroître car ils sont nocifs pour la planète. Dire : “il faut plus de place au vélo et à la végétalisation” sans annoncer que l’on réduit la place de la voiture, c’est prendre les gens pour des imbéciles. Il nous faut plus que des plantes en pot. Il faut remettre de la vie dans nos sols, les libérer ! Nous ne sommes pas en train de faire le concours du village le plus fleuri de France.
Comment libérer des sols dans une ville dense comme Lyon ?
On ne va pas raser la Presqu’île pour créer une forêt. Rendons d’abord de la voirie aux piétons et aux vélos. Les espaces libres doivent être végétalisés. La polémique sur la place des Terreaux est l’archétype de cela. On va y mettre des pots de fleurs ? Nous sommes en centre- ville, sur un îlot de chaleur. Il faut traiter les sols. Et puis il faudra chercher des poches, comme les cours de récréation de nos enfants qui ne doivent plus être bitumées. Je suis humanitaire : lorsqu’il y a une urgence, on s’arrête et on se mobilise. Toutes les politiques publiques doivent être conçues en ayant l’adaptation au changement climatique en tête.
Quel serait le coût de telles politiques ?
Les véritables coûts sont cachés. Ne pas réaliser les bons investissements au moment où il faut le faire génère des coûts. On le paie sur notre santé : 40 000 personnes en France meurent prématurément du fait de la pollution atmosphérique car ils ont été malades. Or, ces personnes sont soignées par la Sécurité sociale donc par nous tous. Changer le système actuel nous fera du bien à tous, collectivement.
Comment convaincre les quartiers plus populaires de Lyon, où le vote écologiste est généralement plus faible ?
Les gens des quartiers populaires ne sont pas inconscients vis- à- vis des questions environnementales. Ce qu’il faut se demander, en tant que dirigeants politiques, c’est quelles sont les contraintes qui les empêchent de pratiquer l’écologie ? Non, les quartiers populaires ne seront pas abandonnés par les écologistes. C’est à nous de trouver les méthodes pour y aller. Le premier rôle d’un parti politique c’est de diffuser son idéologie, ses idées. À nous de démontrer, preuves à l’appui, que le quotidien des gens peut s’améliorer grâce à l’écologie. »