La Tribune de Lyon

Mon déjeuner avec

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Du dehors, la maison et son terrain de boules paraissent bien modestes, timidement nichées face aux anciennes usines Tase,

dans ces rues devenues presque invisibles à l’arrière du Carré de Soie. Mais, une fois le seuil franchi, le visiteur est happé par la joyeuse nostalgie des lieux où les hommes ( ils sont largement majoritair­es) bavardent les coudes posés sur la nappe à carreaux. La chaleur de la petite salle et les éclats de rire font facilement passer le temps.

Lorsqu’Hélène Geoffroy arrive, se glisse entre les tables serrées pour nous saluer, quelques regards se tournent de notre côté mais les conversati­ons continuent bon train.

140 pages.

La Boule en soie, dans son jus, est un troquet sans âge, que l’on espère éternel tant il incarne l’esprit singulier des villes ouvrières ( on pourrait imaginer le même décor à Villeurban­ne). La maire qui veut défendre le « potentiel ignoré »

La Boule en soie 5 allée de La Boule en soie. Vaulx- en- Velin.

Taboulé, blanquette de veau, desserts et deux cafés. 24 €.

4.03.1970

Naissance à Creil ( Oise). Elle grandit en Guadeloupe.

1996

Elle obtient son doctorat de l’École polytechni­que en mécanique des solides et des structures.

1997

Arrivée à Vaulxen- Velin suite à sa nomination à l’École nationale des travaux publics de l’État. Rejoins la section PS de la ville.

2004

Élue conseillèr­e générale à 34 ans dans un canton historique­ment communiste.

04.2014

Élue maire de Vaulx- en- Velin.

2016

Députée, elle est nommée secrétaire d’État à la politique de la ville du gouverneme­nt.

demandés par les citoyens, comme l’associatio­n Robin des Villes, dont on ne peut pas dire qu’elle soit institutio­nnelle… Les services de la Métropole ont accepté de jouer le jeu malgré des réticences. Mais nous n’avions pas le choix. J’ai maintenant des habitants qui se sont spécialisé­s sur ces questions et le nombre de recours contre la commune a baissé. En réalité, à Vaulx, tout le monde est intéressé par la politique.

Vous êtes vice- présidente à la Métropole. Est- ce que cette super- collectivi­té enlève du pouvoir aux maires ?

J’étais députée au moment du vote de la loi… Avoir fusionné des compétence­s du conseil général et de l’agglomérat­ion est une bonne chose. L’enjeu est de garder de la proximité sur les politiques publiques car les maires ne seront plus forcément élus au conseil. C’est une difficulté, je ne le nie pas. On ne peut pas travailler dans une métropole sans les maires. Il faut éviter l’éloignemen­t que l’on voit avec les conseils régionaux. Je pense qu’il faudra créer des conseils de circonscri­ptions pour avoir des échanges directs. Tout de même, la Métropole est un outil formidable, un budget de trois milliards d’euros. C’est l’échelle qu’il faut pour travailler la cohésion sociale. Je le vois comme une opportunit­é avec un danger : devenir hors- sol.

Êtes- vous surprise de la place prise par l’écologie dans la campagne ?

Notre ville est particuliè­re en ce qu’elle n’a jamais eu de membre des Verts dans un exécutif. Donc il n’y avait pas de poste d’adjoint. Nous l’avons créé en 2014. Puis en 2018, on a lancé la commission extra- municipale de développem­ent durable où siègent des citoyens. La prise de conscience environnem­entale existe en banlieue ! J’insiste. Sur les questions d’alimentati­on, de réduction des déchets… L’écologie n’est pas le monopole d’EELV. La commission du développem­ent durable n’était pas dans notre programme. Elle est née quand ça a commencé à frémir sur la taxe carbone, à l’été 2018. Historique­ment, je suis ségolènist­e ( sic). Ségolène Royal a toujours dit que l’écologie punitive n’est pas une bonne idée, qu’il faut faire adhérer les gens.

Justement, l’état du Parti Socialiste aujourd’hui vous désespère- t- il ?

Nous vivons un moment très compliqué. En 2012 lorsque je suis élue députée, nous sommes majoritair­es partout. Cinq ans plus tard, nous perdons beaucoup de sièges de députés. Ce n’est pas une simple défaite, mais un vrai rejet. Sur le plan économique, le chômage continue de baisser grâce à ce que nous avons entamé sous le mandat de François Hollande. Nous n’avions donc pas tort sur tout… Mais nous avons été incapables de nous mettre d’accord entre socialiste­s. Je me souviens de séances à l’Assemblée où la droite nous regardait nous disputer… C’était assez triste. Je reste persuadée qu’il y a une place pour une force progressis­te qui met les questions d’égalité au coeur de son programme en voulant vraiment gouverner. Il y a une place pour nous. Je ne serai pas celle qui dit qu’il n’y a plus de différence entre les partis, même si on peut avoir des convergenc­es d’intérêt. Je pense que l’on va retrouver une place mais nous avons besoin d’un peu de temps encore. Aujourd’hui le pays attend une voix forte, progressis­te, plutôt de gauche, qui n’ait pas peur des responsabi­lités.

Qu’est- ce que vous dites aux gens de gauche qui se sont tournés vers LReM et le regrettent peut- être aujourd’hui ?

Je n’ai pas encore eu ce débat- là… Néanmoins je ne leur jette pas la pierre. Quitter un parti, cela peut arriver. J’ai d’anciens collègues députés qui sont marcheurs aujourd’hui. Ils ne m’ont pas fait de confidence mais je les sais très engagés. En revanche cela montre que, contrairem­ent à ce que l’on a pu dire, les partis sont utiles car ils servent à produire des idées.

Le candidat LR à métropole François- Noël Buffet et ses têtes de listes 100 % masculines, qu’est- ce que cela vous inspire ?

Cela me rappelle le moment où les listes sénatorial­es ont dû alterner hommes et femmes. La première élection qui a suivi, vous avez vu fleurir de nombreuses listes parce que pour être sûrs d’être élus, les hommes qui se retrouvaie­nt troisième de liste faisaient leur propre liste. Mais en 2020 on ne peut pas dire que l’on ne trouve pas de femmes ! Les jeunes femmes ne doivent pas penser que les droits sont acquis. Bien sûr, il est plus rare d’entendre “qui va garder les enfants ?” comme autrefois… ! Au moins pour le Parti socialiste, il y aura bien une tête de liste femme sur la circonscri­ption Rhône- Amont puisque cela devrait être moi.

Dans l’alliance de gauche menée par Renaud Payre au niveau métropolit­ain ?

Non, c’est surtout lyonnais, cette alliance. Mais c’est une bonne chose, je ne m’en plains pas. Seulement, nous sommes dans une autre histoire ici. »

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