La Tribune de Lyon

La fille coupée en deux

- LUC HERNANDEZ

Le temps des vacances d’été, une jeune fille est substituée à ses parents et emmenée entre deux gendarmes. Lise, 18 ans, va troquer le bracelet de plage contre le bracelet électroniq­ue, le temps de son procès, qui va s’ouvrir au tribunal de Nantes. Elle est accusée d’avoir assassinée de sept coups de couteaux l’amie chez laquelle elle avait fait la fête, après avoir passé la nuit avec. Pour son troisième film, Stéphane Demoustier a inventé un fait divers de toute pièce, loin d’un docu- fiction. Il a l’intelligen­ce de ne pas se concentrer uniquement sur le procès, mais de reconstitu­er des vidéos et des pièces du dossier qui permettent de rendre son vrai- faux fait divers crédible, pour servir son propos, à savoir observer les soubresaut­s intimes d’une famille lorsqu’un de ses membres est soumise à pareille accusation. De ce point de vue, l’évocation des jeux sexuels indifféren­ts de Lise constituen­t le portrait d’une certaine adolescenc­e mutique, échappant à la compréhens­ion des parents. En un seul monologue à la sobriété confondant­e, Chiara Mastroiann­i en maman montre la grande actrice qu’el le e st devenue, Anaï s

Demoustier et la louve Annie Mercier se réservant les joutes entre défense et accusation. Evitant toute tentation d’abstractio­n, le film ira jusqu’à la résolution du procès, non sans avoir auparavant construit un portrait de famille singulier autour de la figure d’une jeune fille coupée en deux entre son appartenan­ce familiale et son abîme de solitude. Stéphane Demoustier aura eu le talent d’en faire un drame sobre et prenant, sans effusion, comme une suite à son précédent long métrage, Allons enfants. Un cinéaste à l’oeuvre, en somme.

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