Le Lyon de demain.
Comment le coronavirus va transformer Lyon
Au lever
Dans quelques années, les Lyonnais pourraient bien être plus nombreux à pouvoir prendre leur petit- déjeuner « dehors » , baignés par la lumière du jour. Soit parce qu’ils auront choisi de s’éloigner un peu du centre- ville pour disposer de verdure, soit parce que la conception de leur appartement s’y prêtera davantage. Le pli est en train d’être pris. Le promoteur lyonnais Capelli a réalisé pendant le confinement un sondage sur les intentions des Français en termes de logement. Dans le Rhône, 27 % des sondés souhaitent changer de logement pour prendre plus grand et disposer d’un espace extérieur. Pour 36 % des habitants du Rhône, la présence de cet espace hors les murs est même devenue ces dernières semaines un critère essentiel. 29 % souhaitent être proches de la nature, et pour 25 % avoir un bien lumineux fait également partie des critères pris en compte.
Plus de lumière et de verdure.
« Aujourd’hui les gens regardent les rez- de- jardin d’un oeil différent et sont peut- être contents d’avoir un bout de gazon. Tout le monde va envisager les immeubles différemment. Il va falloir plus de balcons, de terrasses… Il va donc être nécessaire de créer de nouveaux produits, plus intelligents, plus adaptés » , commente Christophe
Capelli, PDG du groupe. Il est donc envisageable de voir les petites maisons, voire les villas duplex, des appartements qui ont chacun leur jardin, faire florès. Mais même en restant en ville, il existe d’autres pistes pour espérer avoir davantage de lumière dans l’appartement, un manque brutalement ressenti par nombre de Lyonnais durant les deux derniers mois. Le petit- déjeuner pourrait ainsi se prendre dans les prochaines années sur une terrasse « dedans- dehors » , un concept assez récent. L’entreprise lyonnaise Lumicène conçoit des fenêtres bioclimatiques. Autrement dit, des vitres arrondies qui s’installent en angles des façades et permettent de bénéficier plus longtemps de la lumière, sortes de baies vitrées coulissantes pour se transformer en balcon. « On sent une prise de conscience, on lit des tribunes d’architectes affirmant que l’on construit trop compact, trop vite, avec pas assez de lumière » , constate Clément Salvaire, directeur général de l’entreprise. « On a reçu beaucoup de demandes ces dernières semaines. En confinement, les gens ont eu du temps pour réfléchir. On le voit aussi dans les consultations, il y a une impulsion plus qualitative des élus, on a une cinquantaine de projets dans toute la France. » À Lyon, un projet dans le 7e arrondissement, un autre à Saint- Fons vont intégrer ce concept, également présent dans des logements livrés récemment à Sathonay Camp.
Le matin
Après leur petit- déj, les Lyonnais continueront- ils longtemps à aller tous travailler physiquement, ou le télétravail prendra- t- il une place majeure ? Les concepteurs d’immeubles planchent actuellement sur la question, et il est tout à fait possible que les futurs bâtiments soient conçus afin de laisser de l’espace à un lieu de travail commun au sein même des immeubles d’habitation. Mais dans le futur, travail ou non, il faudra bien se déplacer. Quels choix se proposeront aux Lyonnais descendant de chez eux au petit matin ? Les transports en commun, toujours.
Transports en commun : la grande inconnue.
Le Sytral s’avoue aujourd’hui incapable de se projeter réellement au- delà de la crise en cours. Mais un sondage récemment effectué auprès de ses abonnés laisse penser que tout est envisagé : masques, mais aussi gants pour les usagers, décompte des passagers qui montent dans une rame ou un tram… Combien de temps le masque restera- t- il obligatoire ? Deviendrat- il une habitude ? Difficile à dire. Mais il fait peu de doute que les Lyonnais devront rapidement s’adapter aux distributeurs de gel hydroalcoolique.
Multimodalité vélo- voiture- TER.
Les Lyonnais pourraient choisir par sécurité, choix, ou absence de choix de continuer à se déplacer en voiture. Dans ce cas, espérons qu’ils trouveront alors des parkings- relais multimodaux adaptés, avec abris vélos sécurisés, davantage d’arceaux et de vélos à louer à disposition… pour combiner les différents modes de transport. Cette nouvelle répartition modale permettrait notamment « de mieux gérer les heures de pointe en réduisant la pression sur les réseaux routiers et de transports en commun » , souligne le Cerema ( Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) qui conseille les collectivités depuis
Bron. Lequel imagine aussi « un service performant périurbain, de type RER pour irriguer tout le bassin de vie » , et met en avant un aspect très pratico- pratique de ce qui devra être amélioré : « L’information sur les transports sera aisée à acquérir, en temps réel et transparente, le paiement clair et rapide, mutualisé entre les différents services ( stationnement, transports en commun, vélo en libre- service…). Les supports d’accès de paiement aux services urbains quels qu’ils soient seront regroupés. En conséquence les pratiques intermodales en seront facilitées : vélotrain- vélo, marche- bus- vélo seront possibles » . Il sera peut- être aussi possible, alors, de combiner TER et transports en commun en un seul abonnement, et de monter dans un bus, un tram, un métro avec un vélo pliant. Le Sytral admet aujourd’hui réfléchir à cette possibilité « en dehors des heures de pointe » , en ayant déjà exploré diverses solutions techniques, auparavant, d’accrochage de vélos aux bus par exemple. Sans avoir débouché sur une solution satisfaisante pour l’instant. Mais comme la prime métropolitaine de 500 euros s’applique aussi à l’achat de vélos pliants… On peut rêver.
Rêve d’un REV, réseau express vélo.
Ce que ne se prive pas de faire la Ville à Vélo. Entre les débats « tout vélo » des élections municipales et le lancement en urgence de l’urbanisme tactique, tout semble aujourd’hui sur la table. « Il y a même des aménagements qu’on n’aurait jamais osé proposer, comme le tunnel mode doux sans le couloir de bus, ou l’aménagement cyclable sur l’avenue Berthelot » s’épate Leslie Agabriel pour l’association lyonnaise. L’étape suivante serait d’implémenter le REV, le réseau express vélo. Une colonne vertébrale d’axes structurants en sites propres et protégés, avec priorité aux intersections, « qui permettrait d’aller drainer les cyclistes qui habitent plus loin en 1re, 2e couronne » . Il serait ensuite complété par un maillage secondaire plus fin de pistes, bandes cyclables, voies à double sens. Cela permettrait d’aller « chiper » de nouveaux usagers du vélo à la voiture.
D’où, aussi, la nécessité d’envisager à l’avenir un écosystème vélo efficace pour réparer, mais aussi apprendre à réparer soi- même ou à se déplacer à vélo en ville. Un exercice en soi. Qui pourrait être facilité par une adaptation plus large de la signalétique, des feux de croisement, initialement pensée uniquement pour la circulation voiture. « Des M12 de partout ! » s’amuse à réclamer Leslie Agabriel, faisant référence à ces systèmes de cédezle- passage cycliste au feu rouge. Quant aux piétons, il est permis d’imaginer un centre- ville où la piétonnisation aura pris ses quartiers autour de trottoirs élargis aux abords des commerces et des écoles afin de permettre de respecter plus aisément les distanciations. En déambulant à pied ou à vélo, les Lyonnais de demain pourraient alors apprécier le retour de la nature et de la verdure en ville. Prendre le temps… Le Cerema glisse d’ailleurs un souhait discret à ce sujet, envers « peut- être, un mode de vie un peu plus « lent » , où l’on pourra accepter d’attendre son colis, son bus, une place de stationnement… »