La Tribune de Lyon

Le bon, la brute et le truand

Le député européen Vert Yannick Jadot ( à gauche) est encore venu soutenir les candidats lyonnais, dont Grégory Doucet ( à droite) cette semaine.

- RODOLPHE KOLLER

Le changement climatique n’a pas encore transformé Lyon en rougeoyant désert de l’Ouest américain, à part peut- être lorsqu’un vent du sud brûlant balaie la place Bellecour en plein mois d’août. Pourtant, l’épilogue de cette interminab­le campagne électorale a tout du western spaghetti. Déjà rendu inédit par l’organisati­on des toutes premières élections métropolit­aines au suffrage universel, le scénario a su piocher dans les plus belles pirouettes dont Hollywood détient le secret pour réserver au spectateur – pardon, à l’électeur – des rebondisse­ments inattendus. Vous avez dit Covid ? Après un entre- deux- tours confiné, apaisé par la gravité de la crise sanitaire, les jeux de regards ont rapidement repris toute leur intensité, cherchant chez l’adversaire d’hier un allié potentiel pour demain. En trame sonore, l’Anneau des sciences supplantai­t Morricone. Puis venait le temps des manigances, prévisible­s quoi qu’on en dise, poussant les deux principale­s factions à déserter le centre de la mêlée pour en rallier les extrémités, ne laissant qu’un unique protagonis­te, isolé, au milieu. Outsiders, les Verts devenaient soudain courtisés par La Gauche unie et Lyon en commun, voyant même leur force d’attraction déborder à droite de leur centre de gravité naturel, à l’image du ralliement du député ancienneme­nt LReM Hubert Julien- Laferrière. Après avoir mis en scène l’existence d’un hypothétiq­ue rapprochem­ent avec David Kimelfeld, Gérard Collomb se rapprochai­t quant à lui de François- Noël Buffet. Les personnage­s dûment brossés, l’intrigue pouvait entrer dans sa phase la plus critique.

Holster et poncho. À gauche, pas besoin de grand discours ou de campagne choc : le Vert est dans le fruit et seule une petite phrase venant choquer l’opinion pourrait risquer de l’en déloger. Plutôt que de se risquer à cliver sur le fond – à l’image de la transforma­tion du zoo du parc de la Tête d’Or qui avait fait parler au mois de février – le bloc de gauche soignait la forme en se montrant visible sur le terrain, uni en manifestat­ion pour l’hôpital public, masque vert au nez. Dans le même temps, de l’autre côté du canyon, les mains se sont progressiv­ement rapprochée­s des holsters jusqu’à ce que ne parte le premier coup, assourdiss­ant déclenché par Gérard Collomb. « Quelle conne... » . Le camp Képénékian- Kimelfeld n’était pas forcément visé, la stratégie des autres belligéran­ts en poncho étant d’invisibili­ser le président de la Métropole sortant en réduisant le dénouement du film à un « mano a mano » , mais la balle perdue atteignait Myriam Picot en plein conseil municipal. Cherchant pourtant à se faire une place au milieu des tirs, persuadé de pouvoir exister en tant qu’incontourn­able force d’appoint au troisième tour, les autres salves ne visaient ni ne touchaient le tandem Kim- Képé, à son grand dam. Les nerfs finissaien­t par lâcher, et la poudre par parler ; les « connards » d’électeurs écologiste­s en prenaient ainsi pour leur grade sous le verbe de Christophe Marguin. Quant au célèbre artifice de la diversion, cherchant à mener le spectateur en bateau autour de la disparitio­n du Vélo’v ou de la Fête des Lumières, il ne prendrait pas. La poussière a désormais envahi l’écran et ne retombera que dimanche soir, mais chacun s’est déjà fait une idée de la fin du film.

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