La Tribune de Lyon

UN TUTU ET DES BASKETS

-

Il ne faut pas s’arrêter au nom un peu pompeux « Atelier des saveurs » et à sa punchline « générateur de gourmandis­e » qui sent fort le Jacques Séguéla des années quatre- vingt- dix, alors que le resto est récent. Le titre n’est pas usurpé, même si le chef Stéphane Ibao fourchette dans le classique revisité, plutôt que dans le laboratoir­e d’un fou coiffé comme le professeur Raoult. La « Compositio­n de tomates anciennes et légumes grillés, pesto maison et mozzarella di buffala » n’est qu’une version pimpée du tomates/ mozza. Le plat a saturé un temps les cartes de restos, jusqu’à l’indigestio­n. Pourtant, c’est toujours très bon. Nous étions en terrasse par un temps caniculair­e, mais sans fondre sur notre chaise, car cette partie de la rue Bossuet est toujours à l’ombre. C’est un atout majeur ( et écolo- compatible) face à ces plages d’enfers minéraux sous parasols qui parsèment la ville. D’autant plus que l’assiette est bonne ( rassurez- vous, on parle du contenu). Au menu du jour sur ardoise, entrée/ plat/ dessert, basta cosi, il y avait une « tartine norvégienn­e » . L’idée d’un Viking écrasé par un rouleau compresseu­r nous est passée par la tête, mais la tartine de bon pain croustilla­nt était recouverte, bien entendu de saumon, d’herbes, de sauce aigrelette et compagnie du meilleur effet brise- glace. Les références du chef sont plus que visibles.

Bon augure.

Un portrait géant de Paul Bocuse orne un des murs de la salle. Et Paul Bocuse, c’est : « les produits doivent avoir le goût de ce qu’ils sont » . Maxime parfaiteme­nt claire dans un mijoté de boeuf « façon grand- mère » , écrasé de pommes de terre. Le « façon grand- mère » appelle l’idée du fourneau à bois, d’une époque où l’on ignorait le culte de la vitesse : paleron, carottes, champignon­s, pommes de terre goûtues se mêlent dans un fondu

enchaîné qui rappelle effectivem­ent l’effet grand- mère.

On a aussi péché dans la carte des gambas Black Tiger, ces crevettes qui auraient fait du body- building avec Arnold Schwarzene­gger, cuites bien craquantes, comme il faut ; et comme d’ailleurs le risotto safrané attenant, recouvert d’une coque croustilla­nte comme on peut le faire avec de la polenta ( un tantinet trop sec).

Bonne pioche aussi que l’oeuf mollet croûté d’ail des ours, lentilles vertes idéalement fermes, et sa puissante « vinaigrett­e grand- mère » . Décidément le chef a peut- être une aïeule cachée en cuisine. Classique mais contempora­in : un tutu et des baskets. On aime.

 ??  ??
 ??  ??
 ??  ?? Sous le regard de Monsieur Paul, Stéphane Ibao ( à droite, avec la barbe) maîtrise « l’effet grand- mère » .
Sous le regard de Monsieur Paul, Stéphane Ibao ( à droite, avec la barbe) maîtrise « l’effet grand- mère » .

Newspapers in French

Newspapers from France