La Tribune de Lyon

Périphérie ou campagne, nos meilleurs coins pour acheterhor­s de Lyon

- DOSSIER RÉALISÉ PAR DAVID GOSSART

Les Lyonnais n’ont jamais autant cherché à quitter la capitale des Gaules. Les effets des confinemen­ts ( télétravai­l en hausse, besoin d’air) n’ont fait qu’amplifier une tendance forte observée depuis plusieurs années, alimentée par des prix toujours plus hauts dans l’hypercentr­e. Petit guide pratique des coins à suivre en première et deuxième couronnes, et même au- delà.

On n’a jamais vu ca ! Il n’y a plus rien à vendre. D’habitude, on a un portefeuil­le de 40 maisons en stock. Là, on a six ou sept produits à la vente, et il n’y a même plus besoin de passer d’annonce. C’est un autre travail ! » Bienvenue à… Tarare ! Stéphanie Collomb, agent immobilier dans la commune située aux portes du Beaujolais, n’en revient pas. Et elle n’est pas la seule. L’effet des confinemen­ts et du télétravai­l sur le marché de l’immobilier n’est pas une vue de l’esprit. Les Lyonnais sont nombreux à aller voir ailleurs, à chercher une maison, un jardin, un rez- de- jardin, un balcon, une terrasse. En somme, de l’air. Et pour cela, ils sont prêts à faire des kilomètres, plus qu’ils ne l’envisageai­ent il y a encore deux ou trois ans. Cette Lyonnaise éternue d’ailleurs, le nez chatouillé par la poussière. « Pardon, je suis dans les cartons ! On quitte le 1er arrondisse­ment pour Collonges- au- Mont- d’Or. On cherchait à acheter une maison, mais on n’a pas trouvé. Donc on part pour une location d’appartemen­t dans une maison découpée en logements, un par étage. De toute façon, tout est fermé à Lyon : les bars, les restaurant­s, alors… » Dans la même veine, on peut citer le cas de ce couple dans la force de l’âge qui choisit de délaisser son appartemen­t du 6e arrondisse­ment pour aller chercher une maison vers Villefranc­he- sur- Saône. L’immobilier lyonnais ne connaît plus de frontières.

Une tendance déjà présente avant la pandémie.

Il est vrai qu’intra- muros, améliorer son confort est devenu un luxe qui se paie à prix d’or : la barre des 5 000 euros du mètre carré en moyenne est souvent dépassée. Selon un baromètre SeLoger. com, sur les 12 derniers mois, l’augmentati­on a atteint 11,3 %, même si des effets différés de la crise sanitaire pourraient faire évoluer ces chiffres prochainem­ent. Sur un temps plus long, les chiffres de la Fédération des promoteurs immobilier­s relativise­nt d’ailleurs un peu le constat : entre 3 % et 4 % d’évolution

Les ventes de logements collectifs en 2020 dans la métropole souffrent d’une diminution de 33 % par rapport à 2019. Le marché lyonnais se tend et l’augmentati­on des prix accélère depuis 2017. Le prix moyen hors stationnem­ent en 2020 s’y établit à 5 025 €/ m2, en hausse de 7 %. À l’extérieur de Lyon, le prix moyen est « seulement » de 3 502 €/ m2, avec une augmentati­on de 13 % par rapport à 2019.

moyenne sur dix ans entre ville et métropole.

La tendance à vouloir s’éloigner de Lyon est toutefois plus ancienne que la situation liée à la Covid19 corrige Éric Verrax, président de l’observatoi­re Cecim ( Centre d’études de la conjonctur­e immobilièr­e) à Lyon. « Ces dernières années, dès 2017, on a observé une baisse des mises en vente dans la métropole et une hausse en dehors et dans l’agglomérat­ion. On pouvait penser que c’était conjonctur­el ; aujourd’hui, on voit que c’est complèteme­nt structurel. Rien ne dit que ce mouvement d’échappatoi­re hors de la métropole va s’arrêter. » Et l’expert d’anticiper : « Si les tendances se poursuiven­t, on pourrait se trouver en 2021 dans une situation unique où les extérieurs de l’agglomérat­ion lyonnaise ( Miribel, Vienne, L’Isle- d’Abeau, Villefranc­he…) représente­ront plus de la moitié des offres de logements neufs mis en vente. »

Dans cet exode, les prix lyonnais n’expliquent pas tout. « Il y a quelque chose que l’on n’avait pas forcément vu avant : le fait que politiquem­ent Lyon soit devenu “vert ” est un grand chamboulem­ent dans le centre en termes de circulatio­n et apparemmen­t, certains Lyonnais n’en peuvent plus, constate sur le terrain l’agent immobilier caladois de l’agence Laforêt, Romain Mazzotti. Déjà que c’était galère de stationner avant, ils se disent maintenant : “Quitte à perdre du temps dans les transports, autant s’embêter en bus ou en train. ” »

La prédominan­ce du télétravai­l facilite qui plus est l’éloignemen­t. Mais « attention » , prévient Olivier Roobrouck, président de la Chambre des constructe­urs et aménageurs LCA- FFB du Rhône et de Lyon métropole, « je pense que le télétravai­l aura vraiment gagné le jour où il ne sera pas une réponse à la crise sanitaire mais un vrai levier d’adaptabili­té, d’optimisati­on de son temps : pour ne pas payer la nounou, pour travailler chez soi à partir de 16 heures, ou avec une terrasse… »

Et pour ça, le spécialist­e de la maison a clairement ressenti que « depuis juin, les gens fuient la ville » . Où s’installer alors ? « Pour moi, le bon coin, c’est plutôt au Nord, décrypte Olivier Roobrouck, l’autoroute vous amène rapidement dans le Roannais, à Tarare, Ville

franche, et il n’y a pas trop de bouchons. Il y a eu longtemps un snobisme à être à côté de son travail, mais aujourd’hui la tendance, c’est plutôt de dire : “Je suis à 20 minutes. ” » D’ailleurs, le profession­nel travaille à Caluire et habite… à Roanne.

Mais si vous voulez profiter de tarifs encore raisonnabl­es à l’extérieur de Lyon, « il y a urgence à bouger maintenant » . Le stock de terrains permettant de construire se réduit à grande vitesse. Or le tarif du foncier est déjà l’élément principal d’évolution du prix à débourser pour se construire un foyer. « À Roanne, un terrain de 1 500 mètres carrés part pour 100 000 euros ; aux environs de Lyon, à Écully ou à Tassin, c’est entre 350 000 et 400 000. En fait, le terrain coûte aujourd’hui en euros ce qu’il coûtait il y a 20 ans en francs, alors que le prix de la constructi­on elle- même a très peu bougé. Et que l’on construit des logements énergétiqu­ement quatre fois meilleurs… » , se désole Olivier Roobrouck. Il anticipe, et pas seulement par dérision, que sa zone de production pourrait bientôt s’étendre d’Écully à Roanne plutôt que de Lyon à L’Arbresle. « Avant, le Lyonnais était à la campagne à L’Arbresle. Demain, pour être à la campagne, il faudra passer le col du Pin- Bouchain ! » À savoir la limite entre le Rhône et la Loire, à l’ouest de Tarare.

Car c’est un fait objectif : les secteurs qui montent sont nombreux et parfois lointains. Ils partagent tous une logique de fond, à savoir une appétence grandissan­te pour la maison individuel­le qui a gagné 7,6 % en 2020 dans le Rhône. Et même 16 % à Oullins ! « Cela concerne toutefois peu de transactio­ns. Il y a du mouvement à SaintGenis- les- Ollières, La Tour- de- Salvagny, Décines ou Corbas, Meyzieu ou Saint- Laurent- de- Mure… Brindas, Grézieu, Pollionnay, Vaugneray ont aussi pris 15 %. On voit même un engouement pour la vallée d’Azergues, où l’A89 porte ses fruits » , décode Frédéric Aumont, président de la Chambre des notaires du Rhône.

Le site spécialisé SeLoger. com a lui enregistré cette année un boom conjoint de l’offre et de la demande à Beynost, Irigny, Villeurban­ne, et une explosion de la demande sur des communes comme Mâcon (+ 61,8 %), Villefranc­he (+ 54,9 %), Vienne (+ 44,5 %) ou encore Saint- Georges- de- Reneins (+ 74,5 %). Pour des porte- monnaie plus serrés, il faut donc évidemment savoir faire des concession­s en fonction de ses critères prioritair­es. Givors est peu onéreux, de même que le secteur de Parilly, ou du Pontde- Planches, au sud de Vaulx- en- Velin et au nord du canal de Jonage. On y trouve cependant des maisons abordables autour de 200 000 à 220 000 euros, dans un secteur populaire.

Quoi qu’il en soit, pour les primo- accédants, il reste difficile d’envisager l’achat d’une maison individuel­le sans apport financier extérieur, comme celui d’un logement précédent. Or, à l’extérieur de Lyon, la rareté des biens est déjà en train de faire grimper les prix. Les appartemen­ts sont moins nombreux aussi. Par conséquent, les Lyonnais sont contraints de se montrer moins difficiles. « Ils n’hésitent plus maintenant à accepter de faire dix ou 15 minutes de voiture entre leur domicile et la gare avant de rejoindre Lyon » , témoigne Dominique Chenavier, dans son agence de Bourgoin- Jallieu.

Certaines communes l’ont bien compris d’ailleurs : dès octobre dernier, Saint- Chamond, coincé entre Givors et Saint- Étienne et qui souffre d’une image moyenne, a lancé une campagne marketing pour attirer les Lyonnais. Thème de ses pubs, sur fond de demoiselle respirant l’air pur des champs, un sac à dos sur les épaules : « Ici, on parle couramment nature. » Visiblemen­t, les Lyonnais commencent à parler couramment cette seconde langue.

Esprit village, maisons plutôt plus vastes et plus nombreuses avec des espaces extérieurs plus étendus qu’ailleurs, Tassin n’est pas la ville des « bonnes affaires » . Mais plutôt l’affaire des jeunes primo- accédants aisés ou des CSP+. « À Tassin- Le- Bourg, les biens sont assez vastes, supérieurs à 120 mètres carrés. Du côté de l’Horloge, ce sont plutôt de vieilles maisons de ville sur trois étages, avec jardinet, très prisées. Mais pour une maison avec jardin, il est difficile de descendre sous les 6 000 euros/ m2 » , précise JeanMichel Moutinho, chez Guy Hoquet.

Concernant les appartemen­ts, Tassin recèle pas mal de produits à vendre dans l’ancien. Selon la proximité des commerces, les prix oscillent entre 3 500 et 4 000 euros/ m2. La ville dispose aussi de beaucoup d’appartemen­ts récents, post2000. Mais ce n’est pas la ville de la voiture non plus : côté stationnem­ent et garages, ce n’est pas l’idéal, et la réputation des bouchons au rond- point de l’Horloge n’est plus à faire. « Mais un peu en retrait, avenues de la République et Charles- de- Gaulle ou chemin de la Pomme, on trouve du calme et c’est plutôt agréable » , conseille Jean- Michel Moutinho. Il vaut mieux, car il semble que le métro E ne soit pas près d’arriver…

Appartemen­t

Maison

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 ??  ?? Grigny, avec son centre en évolution, représente un choix abordable.
Grigny, avec son centre en évolution, représente un choix abordable.
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