CHANGER L'ENTREPRISE, POUR QUOI FAIRE ?
Modifier l'objet de l'entreprise, renforcer la participation des salariés aux décisions... tels sont, à la demande d'Emmanuel Macron, quelques objectifs de la prochaine loi Le Maire qui sera présentée au printemps. Attention à ne pas sombrer dans un débat très français... Par Patrick d'Humières, Directeur de l'Académie durable internationale. Les propositions de réforme de l'entreprise sont une spécialité française depuis des décennies. Leur contenu souvent irréaliste reflète à chaque période les insatisfactions du corps social, qui renvoie aux textes de droit ce que le dialogue social et humain n'arrive pas à produire sur le terrain pour mieux concilier l'intérêt productif et financier des investisseurs et des clients avec celui des autres parties prenantes, salariés, citoyens, fournisseurs, régulateurs. Cela finit toujours à l'Assemblée nationale, même lorsqu'il s'agit de réguler la façon dont nos entreprises doivent agir pour réussir dans l'économie de marché internationale où la compétitivité découle plus des capacités de mobilisation des équipes et d'une culture d'innovation que de contraintes formelles ou juridiques décrétées par-dessus elles. Le débat qui se prépare à nouveau vise à mettre à jour ce statut français de l'entreprise qui date du XIXe siècle (la réforme de l'article 1833 du Code civil qui stipule que l'entreprise est constituée « dans l'intérêt commun des associés ») et qui ne correspond plus à la diversité croissante des projets du monde entrepreneurial, ni au contexte sociétal contemporain au carrefour des attentes de nombreuses parties prenantes et plus seulement de celles des apporteurs de capital. L'idée avait déjà été proposée par le ministre Emmanuel Macron lors des réflexions sur son projet de loi NOE (Nouvelles opportunités économiques), pour favoriser « la transformation de l'entreprise », mais elle n'avait pas été comprise par la communauté institutionnelle.