L'UTOPIE AU TRAVAIL PLUTOT QUE LA DESHUMANISATION
Plutôt que de craindre la déshumanisation du travail, ou de chercher à tout prix une libération du salariat, proposons une utopie réaliste où chacun trouverait un travail permettant de vivre. Par Dominique Méda, Université Paris Dauphine – PSL L'utopie la plus en vogue aujourd'hui concernant le travail est celle de la révolution technologique. Depuis 2010, les ouvrages, articles et rapports se succèdent à vive allure - allant jusqu'à saturer l'espace médiatique - pour annoncer qu'un très grand nombre d'emplois sont appelés à disparaître dans les 10 ou 20 ans qui viennent et clamer que cela est une bonne nouvelle. Grâce à l'intelligence artificielle et aux fantastiques gains de productivité générés, nous dit-on, nous pourrons créer des richesses avec beaucoup moins de travail humain. Si entre 40 et 50 % des emplois existants seront supprimés dans plusieurs pays (notamment les États-Unis), il suffira, écrivent certains auteurs, de bien adapter la formation, pour tirer pleinement parti de cette situation. Parallèlement, le travail connaîtra une véritable transformation, devenant collaboratif, autonome, libéré. Ce sera non seulement la fin de l'emploi mais aussi la fin du salariat, le plus souvent présenté comme une modalité de travail désuète, rigide et rejetée aussi bien par les entrepreneurs que par les salariés eux-mêmes et plus encore par les jeunes qui l'abhorreraient. Les années qui viennent seront donc celles où se préparent des lendemains qui chantent, sous l'effet disruptif des nouvelles technologies qui rendront le travail humain à la fois superflu et épanouissant.
LIBÉRER LE TRAVAIL ?