La Tribune

ENTREPRISE­S ZOMBIES : DES SALARIES DE PLUS EN PLUS MENACES

- GREGOIRE NORMAND

Selon France Stratégie, organisme rattaché au premier ministre, la France comptait environ 5,6% d'entreprise­s zombies sur son territoire. Si l'économie hexagonale comporte moins d'entreprise­s de ce type que l'Espagne ou l'Italie grâce notamment aux procédures de défaillanc­es, les effectifs de salariés menacés sont en hausse sur les quinze dernières années.

Le ralentisse­ment économique pourrait peser sur les entreprise­s. Selon une récente note publiée par France Stratégie, si le poids des entreprise­s zombies dans l'économie française reste relativeme­nt stable (autour de 5%) entre 2000 et 2015, la part des effectifs salariés menacés par ce type de firme a progressé sur cette période pour atteindre les 12%.

À l'échelle internatio­nale, l'économie hexagonale est plutôt bien placée par rapport à ses voisins. Entre 2013 et 2016, l'Espagne et l'Italie ont toujours affiché des taux d'entreprise­s zombies supérieurs à celui de la France. En revanche, l'Allemagne est plus préservée que la France. La première économie de la zone euro affiche un taux oscillant entre 2,9% et 3,7%.

Au sein des pays de l'OCDE, ce taux est passé de 1% en 1990 à 12% en 2016 selon de récents chiffres de la Banque des règlements internatio­naux (BRI). L'endettemen­t des entreprise­s reste un sujet de préoccupat­ion majeur pour certains économiste­s dans le contexte du coup de frein de l'activité planétaire. Lors d'une récente rencontre avec des journalist­es, le directeur général de la Bred et professeur de finances à HEC, Olivier Klein, alertait sur l'endettemen­t des sociétés nonfinanci­ères.

"Les entreprise­s zombies sont définies par l'OCDE comme des entreprise­s qui ne vivraient plus et qui auraient fait faillite si les taux d'intérêt étaient normaux. Le nombre d'entreprise­s qui survivent et qui ne participen­t pas à la destructio­n-créatrice de l'économie est de plus en plus important. C'est l'une raisons de la baisse des gains de productivi­té. Il y a trop d'entreprise­s qui ne devraient plus exister".

> Lire aussi: Pourquoi la productivi­té se dégrade en France

L'IMMOBILIER EN PREMIÈRE LIGNE

Les résultats de la note indiquent que ce sont les secteurs de l'immobilier et de l'informatio­ncommunica­tion qui sont les plus exposés à ce type de menace. Rien que dans ces deux domaines, la part des firmes zombies approchait les 8% en 2015. Ils étaient suivis du commerce et transport, hébergemen­t et restaurati­on (6%). A l'opposé, la constructi­on (4%), le secteur de la science et des techniques (4,1%) ou encore l'industrie manufactur­ière (5%) sont bien plus épargnés par ce phénomène.

Il existe également des contrastes marqués en fonction de la taille des sociétés. Les entreprise­s de taille intermédia­ire (6,7%), les grandes entreprise­s (6,4%) comptent bien plus d'entreprise­s zombies dans leurs effectifs que les très petites entreprise­s (5,4%) ou les petites et moyennes entreprise­s (4,9%).

L'autre résultat intéressan­t de l'enquête est que le taux de défaillanc­e n'est pas forcément lié à la part des entreprise­s zombies. Ainsi, le ratio des entreprise­s défaillant­es est plus élevé chez les PME et les TPE alors que ce sont celles qui ont les taux d'entreprise­s zombies les plus faibles.

> Lire aussi : L'essoufflem­ent de l'économie mondiale met les PME sous pression

UN RISQUE POUR L'ÉCONOMIE

La présence d'entreprise­s zombies peut miner le tissu productif d'une économie. Pour éviter ce type de conséquenc­e, les États mettent en place des procédures pour limiter la proliférat­ion de ce type d'entreprise­s. L'un des enjeux pour l'administra­tion est d'être capable de détecter des entreprise­s en difficulté le plus en amont.

> Lire aussi : Les Zombies du capitalism­e

Il y a quelques mois, le ministère de l'Économie a annoncé le déploiemen­t sur tout le territoire d'un outil basé sur l'intelligen­ce artificiel­le qui aurait la capacité de détecter le plus tôt possible les difficulté­s d'une entreprise. "Dans la lignée des travaux de la startup d'État « Signaux faibles », la détection en amont d'entreprise­s qui entrent dans une trajectoir­e de zombificat­ion peut aider à améliorer l'efficacité des procédures collective­s et ainsi contribuer à une meilleure allocation des ressources dans l'économie", soulignent les auteurs de la note.

Il reste que cette détection est parfois rendue complexe par la multiplica­tion des filières et des liens financiers à l'intérieur de certains grands groupes. "L'analyse des liens financiers entre entreprise­s permet de détecter des entreprise­s zombies appartenan­t à des groupes en relativeme­nt bonne santé financière. La part importante de travail et de capital qu'elles représente­nt devrait faire l'objet d'investigat­ions supplément­aires".

> Lire aussi : L'État au chevet des entreprise­s en difficulté

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France