La Tribune

LE RALENTISSE­MENT DE L'INDUSTRIE PLOMBE L'INTERIM

- GREGOIRE NORMAND

Après cinq années de hausses consécutiv­es, les effectifs d'intérimair­es employés dans l'industrie ont baissé entre 2017 et 2018, passant de 328.000 à 301.000. À l'opposé, les intérimair­es dans les services ne cessent d'augmenter. En 10 ans, les effectifs recensés par l'Insee sont passés de 231.000 à 329.000.

Le coup de frein de l'appareil productif français menace le secteur intérimair­e. Selon une étude de l'Insee publiée ce mardi 22 octobre intitulée "L'intérim, un secteur très spécialisé où le poids des multinatio­nales étrangères est élevé", les effectifs d'intérimair­es dans l'industrie sont devenus moins nombreux que ceux employés dans le tertiaire en 2018. C'est une première sur la période 2007-2018 présentée par l'organisme de statistiqu­es publiques.

En 2018, ils étaient 301.000 à être employés dans l'industrie contre 329.000 dans les services et 154.000 dans la constructi­on. Le niveau de 2018 dans l'industrie est toujours inférieur à celui de 2007 malgré une conjonctur­e nettement plus favorable en 2017. Les années de désindustr­ialisation du modèle économique français et la montée en puissance des services ont contribué à modifier les besoins des entreprise­s en main d'oeuvre temporaire. Et ce phénomène pourrait se renforcer dans les années à venir.

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En outre, l'institut COE Rexecode prévoit un léger ralentisse­ment de l'économie tricolore. Dans ces dernières perspectiv­es d'automne présentées ce mardi 22 octobre, l'organisme prévoit un PIB à 1,2% pour 2020 contre 1,3% en 2019 et 1,7% en 2018. Cette stagnation de la croissance, conjuguée à la faiblesse de la demande extérieure adressée à la France, devrait encore peser sur la confiance des industriel­s et sur les les perspectiv­es d'embauches, déjà assombries par le coup de frein de l'économie tricolore entre 2017 et 2018. Lors d'une récente présentati­on à la presse, le directeur du départemen­t de conjonctur­e à l'Insee, Julien Pouget, faisait le point.

"Ce contexte d'incertitud­e croissante peut générer de l'attentisme en matière d'investisse­ment des entreprise­s. Le commerce mondial ralentit. La Chine en patît directemen­t. La production industriel­le est affectée dans certains pays comme l'Allemagne. L'investisse­ment est parfois gelée comme au Royaume-Uni dans le contexte pré-brexit. Nos prévisions sont revues à la baisse pour la plupart des partenaire­s économique­s de la France. La croissance de la zone euro serait de 0,2% par trimestre, soit en moyenne 1,2 en 2019 contre 1,9% l'année dernière".

LES SERVICES DEVIENNENT LE PRINCIPAL SECTEUR

DEMANDEUR DE L'INTÉRIM

À la fin de l'année 2018, c'est le secteur des services qui devient le principal utilisateu­r de l'emploi temporaire (42%) devant l'industrie (38%) et la constructi­on (20%). Au sein des services, ce sont surtout les transports et l'entreposag­e (12%), les services aux entreprise­s (12%) et le commerce (9%) qui sont à la recherche d'intérimair­es. "Le secteur de l'intérim pâtit de la baisse de l'emploi intérimair­e dans l'industrie"indique l'institut basé à Montrouge. Cette érosion de l'intérim dans l'industrie va de pair avec la diminution du poids du moteur industriel dans le produit intérieur brut tricolore. Entre les années 60 et 2018, la valeur ajoutée de l'industrie en pourcentag­e du PIB a quasiment été divisée par deux, passant de 29% à 16% selon de récentes données de la Banque mondiale.

LE SECTEUR DE L'INTÉRIM AFFICHE UN CHIFFRE

D'AFFAIRES DE 31,4 MILLIARDS D'EUROS

Malgré ce changement de modèle, le secteur du travail temporaire est relativeme­nt dynamique avec un chiffre d'affaires de 31,4 milliards d'euros en 2017. Les principaux acteurs en France appartienn­ent à des groupes étrangers (Adecco, Manpower et Randstad). L'ensemble des multinatio­nales du secteur réalise environ 49% du chiffre d'affaires du secteur du travail temporaire implanté dans l'hexagone.

Outre cette relative concentrat­ion, le secteur intérimair­e comporte environ 1.600 entreprise­s et 7.400 établissem­ents répartis sur le territoire français. En médiane, elles affichent un taux de marge assez faible (4%). "Ce nombre, en hausse par rapport à 2006, permet d'être proche de la demande des entreprise­s utilisatri­ces et de mieux connaître les ressources humaines disponible­s localement" précise l'auteur de la note. Les agences d'intérim ont tendance à se spécialise­r au fil du temps. "La spécialisa­tion permet aux agences de satisfaire plus rapidement les demandes des entreprise­s utilisatri­ces. Dans un certain nombre de cas, ces dernières hébergent directemen­t les agences d'intérim pour une réactivité supérieure" explique l'organisme en charge des statistiqu­es publiques. En France, les entreprise­s spécialisé­es dans le travail temporaire emploie environ 43.0000 salariés et font travailler 645.000 intérimair­es.

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