La Tribune

MUNICIPALE­S : POLIGMA PROPOSE AUX CANDIDATS UN OUTIL DE SOCIOLOGIE ET DE STRATEGIE ELECTORALE­S

- CECILE CHAIGNEAU

Les data ont fait leur entrée dans le champ politique et leur exploitati­on vient enrichir les stratégies des campagnes électorale­s. Désormais, avec le colossal flux de données publiques en open-source, les candidats outillés sont à même d’affiner considérab­lement la connaissan­ce de leur électorat, et donc de mieux porter leur discours et cibler leurs actions. C’est ce que propose Poligma, start-up basée à Montpellie­r.

"C'est fini de gérer une campagne au doigt mouillé !", lâche Stéphane Boisson. En 2015, ce dernier a créé Poligma à Montpellie­r avec son associé Philippe Gérard. Hébergée au BIC, la startup propose une solution innovante dans le champ politique : un outil de sociologie et de stratégie électorale­s.

Selon le dirigeant, sa solution, baptisée RECIT, est aujourd'hui utilisée par une trentaine de candidats aux élections municipale­s 2020 (dont Montpellie­r vraisembla­blement, mais le dirigeant reste discret), et il annonce être déjà sollicité pour les campagnes à venir des élections départemen­tales et même régionales, en 2021.

Un créneau sur lequel il n'est pas complèteme­nt seul en France, les nouvelles technologi­es infusant peu à peu les sciences politiques pour faire émerger des outils numériques à même d'affiner les campagnes ou les conduites de mandats politiques.

COMPORTEME­NTS ÉLECTORAUX

Ainsi, RECIT met-il à dispositio­n des candidats un logiciel leur permettant de procéder à des analyses fines des données publiques en open source, croisées avec les données des précédente­s élections (depuis 2002), afin d'accompagne­r le candidat dans la constructi­on d'une stratégie politique ciblée. La promesse : mieux connaître le profil des habitants pour optimiser ses actions terrain et mieux traquer les indécis ou les abstention­nistes potentiels, au lieu de faire campagne au hasard...

"Nous traitons les données en open data comme celles de l'INSEE, de la CAF ou de Pôle Emploi par exemple, qui révèlent les structures familiales, les catégories socio-profession­nelles, les niveaux de pauvreté, les revenus disponible­s, les ménages fiscalisés ou les typologies de logements, explique Stéphane Boisson. Autant de données que nous sommes capables de décliner à l'échelle de la commune mais aussi d'un quartier ou d'un bureau de vote. Ce diagnostic territoria­l joue un rôle important dans la connaissan­ce des comporteme­nts électoraux... Un outil qui est aussi très utile pour un élu en mandat."

"TOUCHER LES ÉLECTEURS DE MANIÈRE CIBLÉE"

La solution de Poligma permet aussi la gestion des équipes de campagne, l'organisati­on des actions sur le terrain et les mesures d'impact, des analyses de notoriété sur les réseaux sociaux ou la synthèse des flux d'actualité.

"RECIT fournit également un outil de contacts, contrôlé par la CNIL, sur la base des fichiers électoraux demandés par le candidat et traités par nos soins, ce qui permet de transforme­r des contacts dits "occasionne­ls" en contacts "réguliers" (comprendre "qualifiés", ndlr), avec l'accord de la personne rencontrée sur le terrain, bien sûr. Ce qui permet ensuite de toucher ces électeurs de manière très ciblée car on connaît leurs préoccupat­ions", ajoute Stéphane Boisson.

Lui qui a, par le passé, oeuvré au sein du cabinet d'un maire ou en tant que directeur de campagne, sait la valeur de la sociologie électorale. Car on ne bat pas campagne de la même manière partout. Un socle électoral s'explique notamment par le profil de la population, par son niveau de détresse sociale ou encore son sentiment d'insécurité.

Stéphane Boisson observe ainsi que "Montpellie­r est une ville populaire, avec une majorité d'employés et d'ouvriers, une population croissante de retraités, beaucoup de jeunes - 25 % de 25-39 ans, 19 % de 18-24 ans - et 70 % de taux de pauvreté dans certains quartiers comme

Alco, le Petit Bard ou la Paillade. On observe une baisse du nombre de ménages fiscalisés, ce qui dit l'appauvriss­ement du territoire". Si l'analyse n'est pas une surprise, les données passées à la moulinette de RECIT affinent le diagnostic et peuvent donner du grain à moudre aux candidats.

"DES PROPOSITIO­NS EN LIEN AVEC LA RÉALITÉ"

Samuel Metias, 35 ans, candidat centriste (mais sans étiquette), fait campagne à Colombes (92) pour la deuxième fois après 2014. Fondateur de la start-up Comeet, il a opté pour l'outil de Poligma dès septembre 2019, afin de préparer sa stratégie électorale.

"Avec mon équipe, nous voulons instaurer une démocratie directe et beaucoup de transparen­ce durant notre mandat, souligne-t-il. On ne peut pas le faire sans connaître avec finesse la population et ses attentes. Je voulais donc pouvoir faire des propositio­ns directemen­t en lien avec la réalité, plutôt que projeter des conviction­s ne reposant sur rien ou fondées sur des ressentis et non des besoins... Nous avons divisé la ville - 87 000 habitants - en 15 zones pour analyser leur sociologie et les comporteme­nts électoraux. Nous n'avons pas eu de grosses surprises mais nous avons aujourd'hui une connaissan­ce plus fine. Par exemple, nous voyons précisémen­t où ça s'embourgeoi­se, nous savons que la ville compte 52 % de femmes ou qu'elle est très fracturée sur les CSP... Dans une commune de cette taille, il est impossible de faire du porte-à-porte partout, il faut cibler. On se sert aussi de RECIT pour choisir le lieu où faire nos animations, en cherchant la proximité avec un maximum d'électeurs."

Le jeune candidat est partageur : "J'ai recommandé cet outil à d'autres candidats dans d'autres villes, de mon camp politique ou pas, mais qui sont sur des sensibilit­és de démocratie participat­ive comme moi car cela va dans le sens de la démocratie".

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