La Tribune

SHELL PRET A S'ENDETTER MASSIVEMEN­T... POUR PAYER DES DIVIDENDES ?

- JEROME MARIN

Malgré le plongeon des cours du brut, et leur fort impact sur sa rentabilit­é, la compagnie anglo-néerlandai­se ne prévoit pas pour l'instant de baisser le montant de ses dividendes.

Touché, comme l'ensemble du secteur, par le plongeon des cours du pétrole - tombés à 25 dollars pour le baril de Brent à Londres -, Shell protège ses arrières. Mardi, la compagnie anglonéerl­andaise a annoncé avoir obtenu une nouvelle ligne de crédit, d'un montant de 12 milliards de dollars (11 milliards d'euros). Celle-ci vient s'ajouter à une précédente facilité de 10 milliards de dollars, obtenue en décembre 2019.

Dans un communiqué, Shell explique simplement que cette opération lui permet de renforcer sa flexibilit­é financière, portant ses liquidités disponible­s à plus de 40 milliards de dollars. Mais pour les analystes, la société cherche surtout à protéger le versement de dividendes à ses actionnair­es, alors que le repli des cours devrait fortement impacter ses profits. Selon Shell, une baisse de 10 dollars du prix du baril représente en effet un manque à gagner de 6 milliards de dollars.

15,2 MILLIARDS EN 2019

En 2019, les dividendes versés par Shell s'étaient élevés à 15,2 milliards de dollars, soit quasiment l'intégralit­é de son bénéfice net de 15,8 milliards. Pour maintenir un tel niveau, la société devra, cette année, piocher dans ses liquidités. Malgré tout, elle ne prévoit pas, pour l'instant, de baisser le montant de ses dividendes.

Car ces derniers sont primordiau­x pour soutenir un cours boursier en forte baisse. Déjà pénalisée par l'émergence de la finance responsabl­e, qui se détourne des titres des grandes compagnies pétrolière­s notamment, son action est désormais emportée par la chute récente des cours. Elle a ainsi chuté de plus de 40% depuis le début de l'année. Son dernier atout: ses dividendes aux rendements très élevés. Dividendes qu'il faut donc absolument préserver.

BAISSE DES INVESTISSE­MENTS

Dans ce contexte, le groupe préfère prendre d'autres mesures. La semaine dernière, il a annoncé la suspension de son programme de rachat de ses propres actions, une baisse de ses investisse­ments prévus en 2020 (de 25 milliards à 20 milliards de dollars) et un programme d'économies allant de 3 milliards à 4 milliards de dollars. Les autres majors pétrolière­s, comme Total, ont adopté la même stratégie: moins de dépenses mais le maintien des dividendes.

À Londres et à New York, le baril de brut évolue à son plus bas niveau le début des années 2000. Les cours sont victimes d'un double choc. Un choc de demande, d'abord, précipité par l'épidémie de coronaviru­s et ses conséquenc­es sur l'économie. Un choc d'offre, ensuite, en raison du conflit opposant l'Arabie saoudite et la Russie. Et certains analystes n'excluent plus désormais la possibilit­é d'un baril proche des 10 dollars au cours des prochaines semaines. De quoi remettre sur la table la question des dividendes?

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