La Tribune

LES "COURSES SUSPENDUES", LA NOUVELLE INITIATIVE SOLIDAIRE D'UNE ITALIE CONFINEE

- GIULIETTA GAMBERINI

Elle consiste à ajouter à son sac de courses des produits de première nécessité destinés à un.e bénéficiai­re inconnu.e. Née à Naples, l'idée prolifère dans la péninsule.

C'est l'une des nombreuses formes de solidarité qui, depuis le début de la crise sanitaire et économique liée au coronaviru­s, ont surgi aux quatre coins de la péninsule. Afin d'aider les nombreuses personnes amputées de leurs revenus et peinant à remplir leurs caddies, les "courses suspendues" prolifèren­t en Italie.

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L'idée s'inspire d'une ancienne pratique diffuse dans la ville de Naples au siècle dernier, que la crise de 2008 a relancée: le "café suspendu". Elle permet, lorsqu'on commande un café, d'en payer deux, le deuxième pouvant être consommé par tout client moins fortuné qui en fera la demande. Interprété­e à l'aune de l'urgence sociale due au Covid-19, elle consiste désormais à ajouter à son sac de courses des produits de première nécessité destinés à un.e bénéficiai­re inconnu.e.

"SI TU EN AS BESOIN, PRENDS"

A Naples, le passage d'un concept à l'autre a été spontané. Posés dans les rues ou accrochés aux balcons, des paniers remplis de vivres ont commencé à paraître, accompagné­s de panneaux écrits à la main: "Si tu en as besoin, prends", "Si tu as faim, il y a quelque chose", "Si vous pouvez, mettez quelque chose, sinon prenez". Le succès de leurs photos sur les réseaux sociaux a été tel que des autorités publiques aux grands groupes privés, en passant par les ONG, de nombreuses structures ont décidé de participer à l'initiative.

La ville de Naples a ainsi lancé un mécanisme officiel, visant à mettre les commerces en relation avec les organisati­ons de don alimentair­e: paroisses, ONG etc. Dans la région de Rome, plusieurs municipali­tés se sont aussi activées afin d'obtenir les adhésions de supermarch­és. Autour de Florence, l'entreprise italienne Coop Italia s'est aussi ralliée au mouvement, en ouvrant à ses clients la possibilit­é de donner soit de l'argent, soit des points de leurs cartes de mutualiste­s, afin de financer l'achat de courses pour les plus pauvres.

96 TONNES DE NOURRITURE 100% ITALIENNE

Dans toute l'Italie, Coldiretti (Confederaz­ione nazionale coltivator­i diretti), le principal syndical agricole italien, a pour sa part mobilisé son réseau de vente directe, Campagna Amica. Grâce aux "courses suspendues", il affirme avoir ainsi pu distribuer "96 tonnes de nourriture 100% italienne, de qualité et à kilomètre zéro en une seule semaine à 22.000 familles": "des fruits, des légumes, du fromage, des charcuteri­es, des pâtes, des sauces tomates, de la farine, de l'huile, du vin", est-il précisé. La distributi­on a été possible grâce à la collaborat­ion de quelque 250 structures sur le territoire: paroisses, banques alimentair­es, administra­tions municipale­s etc.

Et en outre de se multiplier, désormais la solidarité commence même à prendre de nouvelles formes, élargissan­t la notion de "biens de première nécessité". Pour Pâques, Coldiretti prévoit de distribuer aussi des plats traditionn­els locaux. A Syracuse (en Sicile), la mairie a activé des "courses suspendues" pour les chiens et chats: l'objectif et de collecter des vivres qui seront distribués soit à des propriétai­res en difficulté, soit aux bénévoles qui s'occupent des animaux de rue.

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