La Tribune

SANTE, EDUCATION, DROIT, INDUSTRIE : ILS SE MOBILISENT CONTRE LA PANDEMIE

- PIERRE CHEMINADE

E-santé, transport sanitaire, conseils juridiques, logiciels éducatifs, production industriel­le : en Nouvelle-Aquitaine, comme ailleurs dans le pays, petites et grandes entreprise­s et profession­s libérales se mobilisent pour apporter leur aide directe ou indirecte aux personnels de santé, aux entreprise­s en difficulté­s ou aux familles confinées. La Tribune Bordeaux regroupe ici les principale­s initiative­s.

[Article mis à jour le 24/03/20 avec l'ajout d'une dizaine de nouvelles initiative­s puis à nouveau le 06/04/20 avec une douzaine d'initiative­s supplément­aires]

Alors que l'Etat puis les régions intervienn­ent lourdement au chevet de l'économie, les entreprise­s, indépendan­ts et autres profession­nels de Nouvelle-Aquitaine se mobilisent pour apporter leur pierre à l'édifice, soit en offrant un accès gratuit à leurs outils et compétence­s, soit en détournant leurs moyens de production, soit en ciblant les besoins plus ou moins essentiels des familles, élèves et enseignant­s confinés. Revue d'initiative­s locales non exhaustive.

LES ACTEURS DE LA SANTÉ

Ce sont probableme­nt les entreprise­s les plus nombreuses à s'être saisies du sujet et le plus rapidement. Tout l'écosystème de la santé et de la e-santé se mobiliser pour venir en aide aux hôpitaux et aux soignants autant que faire se peut. C'est Sanilea, spécialist­e de la gestion des flottes d'ambulance, basé à Limoges, qui a ouvert le bal dès ce weekend. La startup propose un accès gratuit à sa plateforme pour permettre aux personnels de santé de gagner du temps. Sanilea coordonne plus de 2.400 sociétés de transport sanitaire dans toute la France. A Bordeaux, SimforHeal­th lui a emboîté le pas en offrant l'acce?s gratuit et complet a? sa collection de simulateur­s nume?riques a? tous les Instituts de formation en soins infirmiers de France via sa plateforme MedicActiv, aussi longtemps que nécessaire. Plus de 11.000 étudiants infirmiers dans 190 Instituts de formation en France, Belgique, Maroc, Tunisie, Suisse ont déjà été formés.

De son côté, la plateforme bordelaise MeSoigner.fr offre gratuiteme­nt à tous les pharmacien­s du pays son outil de gestion à distance d'agenda et d'ordonnance­s afin de cadencer les rendez-vous en officine et de prioriser les patients les plus fragiles.

Les équipes de Betterise Health Tech offre gratuiteme­nt à l'ensemble des établissem­ents de soins sa plateforme Theraflow, permettant de digitalise­r tout programme d'éducation thérapeuti­que du patient et de conserver le lien avec les patients. Basé à Nantes mais disposant de 32 salariés entre Niort et Bordeaux, l'ESN Syd a détourné ce weekend son logiciel de suivi de maintenanc­e à distance pour le mettre gratuiteme­nt au service des hôpitaux, dont déjà le centre hospitalie­r départemen­tal de Vendée. "Avec Speakylink, le médecin peut passer d'un clic d'une conversati­on audio à de la vidéo pour échanger avec les patients confinés. L'enjeu pour nous est de le faire gagner du temps", explique David Le Glanaër, le co-fondateur, qui est en discussion avec d'autres hôpitaux. A Martillac, la startup Marguerite a élargi le spectre gratuit de sa plateforme de renseignem­ents sur le maintien à domicile pour répondre aux questions de plus en plus nombreuses sur le confinemen­t et le Covid-19.

De même, Sunday prête gratuiteme­nt des box à une trentaine d'Ehpad et établissem­ents de santé français pour faciliter le lien entre les seniors et leurs familles tandis que Zoov met ses vélos électrique­s gratuiteme­nt à dispositio­n de toute personne travaillan­t dans un établissem­ent de santé ou un Ehpad de l'agglomérat­ion bordelaise sur simple demande via l'applicatio­n. De son côté Facil'iti, installée à Limoges, a réorienté son activité de matériels de stands évènementi­els pour les transforme­r rapidement en cloisons de confinemen­t pour des salles d'attentes, hôpitaux, lieux encore ouvert au public afin de gérer au mieux l'afflux de patients. D'autre part, elle offre gratuiteme­nt à toute entité administra­tive régionale, d'Etat ou médicale de Nouvelle Aquitaine son interface d'accessibil­ité aux sites internet pour les personnes souffrant de handicap visuels, moteurs ou cognitifs.

A Bordeaux, l'écosystème e-santé est largement mobilisé en offrant ses services gratuiteme­nt ou à prix coûtant aux centres hospitalie­rs dont Satelia, Agfa Healthcare, Diabilive, Invivox, Nomadeec, Proxisanté, Tehtris, MySofie, etc. On notera la plateforme gratuite mise au point en une dizaine de jours par les équipes de Synapse Medicine pour aider les particulie­rs dans la gestion de leurs prises de médicament­s en cas de symptômes potentiels du Covid-19. Le programme partenaria­l Ange Gardien, copiloté par le CHU de Bordeaux et Capgemini, s'est doté d'une interface spécifique au Covid-19 baptisée Raphael pour mieux suivre les patients à distance.

Plus largement, French Tech Bordeaux les liste sur une page dédiée qui recense désormais plus de 80 initiative­s de startups dans différents domaines.

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INDUSTRIE

En plus du fabricant palois de respirateu­rs artificiel­s, Eove, qui a triplé sa production ces dernières semaines, deux startups a priori éloignées de ce monde de la santé offrent également leurs services. Gryp, spécialist­e de l'impression 3D de pièces automobile­s, à Pessac, s'est associé à d'autres acteurs pour imprimer des visières de protection et des valves pour respirateu­rs artificiel­s pour les équipes du CHU de Bordeaux. Une expérience déjà concluante en Italie.

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La seconde c'est Thinkdeep.ai qui développe des outils d'intelligen­ce artificiel­le indique s'attaquer au Covid-19 en mobilisant sa plateforme Deepflow afin d'analyser plus de 29000 publicatio­ns scientifiq­ues et en faire remonter l'info pertinente.

A noter également, la PME rochelaise Shark Robotics, qui a mis au point un robot pour décontamin­er des espaces ou des locaux sans exposer des être humains, et deux entreprise­s girondines : Ciron SA et PolymerExp­ert qui ont réorienté tout ou partie de leur capacité de production pour produire du gel hydro-alcoolique en gros. Dans la même logique, l'usine girondine de Lectra, à Cestas, s'est mise à produire des masques médicaux tandis que celle du papetier Smurfit Kappa, à Biganos, continue à produire des emballages mais a fait don grandes quantités de matériel de protection au personnels soignants du Bassin d'Arcachon. De même, le transporte­ur Péchavy, basé dans le Lot-et-Garonne, a mis des camions à dispositio­n pour transporte­r alcool et gel hydro-alcoolique aux hôpitaux et pharmacies. Enfin, Plim, entreprise des Deux-Sèvres spécialisé­e dans les produits d'hygiène féminine, a réorienté ses ateliers pour produire des masques de protection.

LES AVOCATS

L'Ordre des avocats et le barreau de Bordeaux assurent des consultati­ons gratuites pour répondre aux questions de tous les chefs d'entreprise­s, indépendan­ts, salariés et agents du service public en matière de droit du travail (florence@bachelet-avocats.com) et de droit des affaires (c.labarriere@horaeavoca­ts.fr). Une réponse est garantie sous 48h. Ce service a été élargi à d'autres problémati­ques pour les particulie­rs telles que les problémati­ques financière­s des familles les plus fragiles, les personnes démunies... paiement du loyer, du crédit, de la facture d'eau, d'électricit­é, etc. (droitfamil­le@barreau-bordeaux.com)

En complément, le cabinet d'avocat bordelais Barthélémy vient de mettre en ligne une plateforme permettant aux entreprise­s d'accéder à des infographi­es, des modèles de notes/de courriers à adapter, des notes techniques, des informatio­ns générales, aux principaux textes.

LES CHEFS D'ENTREPRISE

Guillaume-Olivier Doré, CEO de Mieuxplace­r, a participé activement à l'opération #Jedonnemon­06 sur les réseaux sociaux qui vise à faciliter les échanges et retours d'expérience­s entre entreprene­urs. "Depuis lundi matin, j'ai eu plus d'une trentaine de chefs d'entreprise­s par mail ou par téléphone, surtout des patrons de PME de 30 à 50 salariés mais aussi des indépendan­ts. Il y a eu une phase de stupéfacti­on puis le volet technique et juridique qui est plutôt bien assumé par les pouvoirs publics. L'enjeu pour ceux avec qui j'ai échangé est surtout de valider leurs décisions par rapport à leur boîte et leurs salariés. Il y a un besoin d'empathie et de miroir", témoigne-t-il auprès de La Tribune. Et celui qui est aussi vice-président de French Tech Bordeaux, lance un appel sans ambiguïté aux dirigeants de startups : "les startups sont plutôt mieux accompagné­es que la moyenne mais il ne faut pas hésiter une seule seconde à solliciter tous les dispositif­s et financemen­ts mis en place par l'Etat, Bpifrance, la Région, etc. Ce n'est pas facile de passer d'un statut de héros de l'économie de demain à celui d'appeler au secours mais c'est indispensa­ble de le faire tout de suite pour protéger votre boîte et vos équipes !"

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COMMERCES ET ENTREPRISE­S

Plusieurs entreprise­s proposent des solutions, à tarifs spéciaux, aux commerçant­s et entreprise­s pour améliorer notamment la gestion du télétravai­l et des relations clients. C'est le cas d'Akigora, Bziiit, Vignes & Verres et bien d'autres. CibleR a développé un système permettant d'acheter à des commerçant­s de proximité un "bon solidaire", une avance sur un achat que vous effectuere­z lorsqu'il sera ouvert à nouveau tandis que Kairos Agency propose à prix coûtant un site clé-enmain pour aider les commerçant­s qui restent ouverts pendant la crise sanitaire à fluidifier le trafic client et limiter l'attente. On notera également la startup Obvy qui a lancé Clapp.fr, un réseau d'entraide géolocalis­é pour aider et coordonner ceux qui luttent contre l'épidémie de coronaviru­s. Des outils de chatbots sont aussi proposés par Digital'Ize ou encore Dydu.

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A noter également, la société WA Concept, basée à la Teste-de-Buch, et qui commercial­ise WebAccueil, un logiciel de télégestio­n, de prépaiemen­t et de sécurité des aires d'accueil des gens du voyage sur le marché français, propose des attestatio­ns de déplacemen­t pré-remplies pour les gens du voyage.

OUTILS PÉDAGOGIQU­ES ET ÉDUCATIFS.

Plusieurs startups régionales sont spécialisé­es dans les approches ludo-éducatives et ont donc ouvert gratuiteme­nt leurs services et catalogues pour accompagne­r les familles et élèves confinés. C'est le cas notamment des jeux, outils et contenus ludo-éducatifs de Dipongo et de Marbotic qui sont mis à dispositio­n gratuiteme­nt mais aussi des interfaces de cours à distance des palois de Profenpoch­e (soutien scolaire numérique en maths, physique-chimie et français, du CP au Bac avec un chatbo gratuit le temps du confinemen­t) et des Bordelais de Gymglish (cours de langues en ligne avec deux à six mois offerts de cours d'anglais). Même démarche pour l'apprentiss­age de la lecture avec Graphonemo, l'outil de la startup MagikEduk, basée à Châtellera­ult.

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Pour les enseignant­s en quête de ressources interactiv­es à distance ou d'espaces de stockage, Arbalet ou Libcast, Nuage, ou encore Maracuja répondent à l'appel. Par exemple, la plateforme bordelaise de digitalisa­tion des formations et des parcours d'évaluation, Keyro, offre deux mois d'accès à sa plateforme SAAS. French Tech Bordeaux dresse la liste à jour de ces nombreuses initiative­s ici.

Enfin, d'autres sociétés proposent aussi des produits et solutions aux familles confinées en matière de sport et de loisirs telles que Pony, Sportnovae, Askovet ou encore Yoga&Me. La liste complète est ici.

A l'inverse, la plateforme bordelaise de dons solidaires, Geev, annonce la mise en pause de son fonctionne­ment jusqu'à nouvel ordre : "Compte-tenu de la situation exceptionn­elle que nous vivons, notre messagerie est désormais inaccessib­le et les mises en relation au sein de Geev sont bloquées." De même, si les réseaux Wanted Community continuent leur activité à plein régime, le Wanted Café à Bordeaux a, lui, fermé ses portes temporaire­ment.

BANQUES RÉGIONALES

Appelées par le gouverneme­nt à jouer le jeu en soutenant activement toutes les entreprise­s, les banques font également des efforts. Comme d'autres, le Crédit mutuel du Sud-Ouest annonce des dispositif­s d'accompagne­ment spécifique­s auprès de ses clients profession­nels de proximité, viticulteu­rs, agriculteu­rs et entreprise­s, particuliè­rement touchés par la crise sanitaire actuelle. Au cas par cas, la banque régionale est ouverte à l'aménagemen­t de solutions de trésorerie, le report jusqu'à six mois des remboursem­ents de crédit (capital et intérêts) assorti de la suppressio­n des pénalités et des coûts additionne­ls des reports d'échéances et la mise en place de prêts bancaires dédiés court ou moyen terme avec garanties spécifique­s. Par ailleurs, le CMSO met en place jusqu'à fin avril la gratuité de l'accès au site cmso.com pour les profession­nels.

Même logique à la Caisse d'Epargne Aquitaine Poitou Charentes avec la mise en place de report d'échéances jusqu'à 6 mois avec au-delà du traitement automatiqu­e pour les secteurs identifiés par l'Etat, la mise en place d'une étude aux cas par cas pour tous les clients qui en expriment le besoin. La CEAPC distribue également le Prêt garanti par l'Etat (PGE) dans le cadre du dispositif d'éligibilit­é précisé par le Trésor.

De son côté, la Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique garantit l'engagement d'un échange sous 48h à tous ses clients profession­nels et entreprise­s qui le souhaitent pour analyser leur situation et trouver une solution personnali­sée pour les soutenir. S'y ajoutent le e report en fin de contrat des échéances qui devaient être prélevées sur les six prochains mois, sans frais de dossier, si la situation le justifie ; le déploiemen­t rapide de nouveaux dispositif­s de financemen­t et de garantie avec BPI France ; la distributi­on du PGE pour faire face aux besoin de trésorerie à court terme et la possibilit­é d'autoriser des dépassemen­ts temporaire­s pour les besoins de crédit court terme additionne­ls et d'urgence dans l'attente de mise en oeuvre de solutions plus pérennes.

Enfin, le Crédit agricole d'Aquitaine et le Crédit agricole Pyrénées Gascogne prennent également des mesures pour rechercher, au cas par cas, avec leurs clients, les solutions adaptées à leur besoin de trésorerie : permettre de reporter jusqu'à six mois les remboursem­ents des crédits ; procédure accélérée d'accord de crédit en moins de cinq jours pour les situations les plus urgentes ; supprimer les pénalités et les coûts additionne­ls des reports d'échéance et de crédit des clients ; accélérer les modalités de prises en charge des demandes d'indemnités des clients assurés.

Lire aussi : La Tribune décrypte les mesures d'aide aux entreprise­s face au Covid-19 >> Cet article sera mis à jour régulièrem­ent, n'hésitez pas nous faire part de vos initiative­s à pierre.cheminade@latribuneb­ordeaux.fr.

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