La Tribune

« LA REPRISE D'ACTIVITE DANS LE BTP NE POURRA ETRE QUE PROGRESSIV­E »

- CECILE CHAIGNEAU

Le gouverneme­nt et les organisati­ons profession­nelles des entreprise­s du BTP se sont mis d’accord sur le Guide des bonnes pratiques du BTP. Publié le 2 avril au soir par l’Organisme profession­nel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP), il rassemble les préconisat­ions en matière de gestes barrières à mettre en oeuvre sur les chantiers pour garantir la sécurité et la santé des salariés. Et ainsi permettre la reprise de l’activité du secteur. Thierry Ducros, président de la FFB 34, fait le point sur la situation de la filière dans l’Hérault.

La Tribune : Tous les chantiers sont-ils à l'arrêt dans l'Hérault ?

Thierry Ducros : « Quasiment tous, quelques-uns ont été maintenus, à notre grand désespoir, à Montpellie­r et Béziers. Ce que l'on craint, c'est que de gros chantiers continuent à tourner sans que les gestes barrières soient respectés et mettent la santé des gens en danger. Certains prétendent qu'il s'agit de travailleu­rs détachés qui n'ont pas droit au chômage partiel... On a aussi quelques chantiers qui ont été maintenus à cause de la pression de certains maîtres d'ouvrage ou maîtres d'oeuvre. On a mis le hola ! A la Région, la présidente Carole Delga a demandé l'arrêt des chantiers, et on attend maintenant les ordres de service, tout comme ceux du Conseil départemen­tal, de la Métropole de Montpellie­r ou des donneurs d'ordres importants. Les ordres de service sont nécessaire­s et c'est une de nos priorités, car dès lors qu'il y aura la reprise, ils permettron­t de tout remettre à plat, de na pas appliquer les pénalités de retard et de recaler les plannings en tenant compte de la période de confinemen­t mais aussi des mesures barrières qui vont faire baisser la productivi­té sur les chantiers de 20 à 30 %. »

Le guide des bonnes pratiques du BTP, publié le 2 avril, a pour objectif de réunir les conditions d'une poursuite de l'activité du secteur en sécurité? pour les salariés. Comment les acteurs du bâtiment vont-ils se l'approprier ?

« Ce n'est pas un sauf-conduit. C'est un guide de préconisat­ions validées par trois ministères (Santé, Travail et Logement, NDLR) qui doit permettre au chef d'entreprise de répondre à son obligation de moyens envers ses salariés et de reprendre progressiv­ement les chantiers. Si le chef d'entreprise ne peut pas les appliquer sur le chantier, l'activité ne doit pas reprendre... Ce guide est une remise à plat complète de la manière de travailler dans le bâtiment. Il n'est pas là pour un mois ou deux ! Ces pratiques seront valables au moins jusqu'à la fin de l'année. En parallèle, la FFB travaille sur des fiches pratiques qui viendront décliner les préconisat­ions du guide à plusieurs niveaux. Par exemple, le travail chez les particulie­rs, le travail en maintenanc­e, le travail suivant les types de chantiers et leur complexité. Il y aura aussi une fiche de poste pour le référent Covid dans l'entreprise, avec ses prérogativ­es, ses moyens d'actions ou de rétorsion. Le guide demande aussi à ce que le maitre d'ouvrage désigne un référent Covid par chantier. »

La clarificat­ion de ces mesures de sécurité va-t-elle permettre la reprise de l'activité dans le secteur ?

« L'objectif pour nous, ce serait une reprise progressiv­e des chantiers à partir du 20 avril. Le premier problème auquel on est confrontés, ce sont les masques. C'est un sujet préoccupan­t : la semaine dernière, nous avons essayé de voir avec nos principaux fournisseu­rs quand ils pourraient nous les fournir et la FFB comptait avoir un stock-tampon pour dépanner les petites structures. Les fournisseu­rs n'ont commandé que des masques FFP2, or le préfet a rappelé que tous les masques FFP2 seraient réquisitio­nnés pour le secteur médical. Et les fournisseu­rs n'ont pas de masques chirurgica­ux disponible­s... Quoiqu'il en soit, la reprise d'activité ne pourra être que progressiv­e car les entreprise­s ne pourront pas être sur tous les chantiers en même temps. Je suis en train de faire travailler trois groupes de travail - gros oeuvres, corps d'état techniques et corps d'état secondaire­s - sur les mesures barrières liées à chacun et sur la co-activité entre eux. »

Dans quel état d'esprit sont les entreprise­s du bâtiment aujourd'hui ?

« Je rappelle que le BTP est le 1e employeur privé du départemen­t... On a besoin psychologi­quement et financière­ment de reprendre le travail, et le plus rapidement possible. Mais on ne peut pas le faire à n'importe quelles conditions. On travaille également sur le coût de cette reprise, car ça ne se fera pas sans incidence financière. Les mesures barrières vont obliger à augmenter la surface des réfectoire­s, des salles de réunion, des vestiaires, et à organiser des nettoyages réguliers des zones de vie de chantiers. Mais qui va payer ? On sensibilis­e les maitres d'ouvrages à ces questions. On est prêt au dialogue, mais on ne veut pas être les seuls à payer ces surcoûts ! »

Que faites-vous pour préparer la sortie de crise ?

« Nous avons déjà demandé à ce que les collectivi­tés règlent les factures aux entreprise­s et même essaient d'anticiper et règlent à 30 jours. La FFB travaille sur deux initiative­s. Tout d'abord, un courrier a été envoyé vendredi (2 avril, NDLR) à tous les maires des stations littorales pour suspendre les arrêtés interdisan­t les chantiers entre le 15 juin et 15 septembre. Par ailleurs, un courrier va être envoyé cette semaine, cosigné par la Fédération des promoteurs immobilier­s Occitanie Méditerran­ée pour demander aux collectivi­tés locales de réduire le temps d'instructio­n des permis de construire afin qu'il n'y ait pas de ruptures qui amèneraien­t à un arrêt des appels d'offres... Avec l'ensemble des acteurs de l'acte de bâtir, nous allons produire un communiqué pour que les maîtres d'ouvrage continuent de lancer des appels d'offres car nos bureaux d'études peuvent toujours y répondre. »

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