La Tribune

L'IMMOBILIER ET LE BTP SE PREPARENT A LA REPRISE A TOULOUSE

- PIERRICK MERLET

Grâce à un guide des bonnes pratiques publié par le gouverneme­nt, les filières de l'immobilier, du bâtiment et des travaux publics, se préparent à la reprise à Toulouse après un mois d'arrêt provoqué par le confinemen­t. Néanmoins, l'approvisio­nnement difficile en masques inquiète ces profession­nels. Cet arrêt, puis ralentisse­ment, des chantiers devrait avoir des conséquenc­es sur le marché immobilier toulousain, mais aussi sur le calendrier de mise en service de projets structuran­ts comme le téléphériq­ue urbain et la troisième ligne de métro.

Il y a un mois jour pour jour, le président de la République, Emmanuel Macron, annonçait le confinemen­t des Français jusqu'à nouvel ordre face à la crise du Covid-19. Par ricochet, cette décision a provoqué l'arrêt brutal des chantiers de logements, du bâtiment et de travaux publics, sur la région toulousain­e, mais aussi partout en France. L'exemple le plus marquant au niveau local est sans aucun doute la non-livraison dans les temps initialeme­nt espérés du futur Parc des exposition­s de Toulouse, le MEETT. Pour permettre la reprise de ces secteurs d'activité, le gouverneme­nt a donc publié un guide au début du mois d'avril recensant les règles à respecter afin de "relancer la machine", mais aussi protéger la santé des salariés.

"Ce guide est complet et bien fait, mais il ne va pas nous faciliter la tâche. Pour ce qui est du marché du logement en tout cas, il va entraîner des cadences de production plus faibles et donc des chantiers plus longs, ce qui signifie plus coûteux. Les bonnes pratiques demandées reposent essentiell­ement sur de la réorganisa­tion de chantier. Néanmoins, nous étions dans l'attente de ce guide pour redémarrer", commente Stéphane Aubay, président de la Fédération des promoteurs immobilier­s Occitanie Toulouse Métropole.

Si la reprise se profile pour les promoteurs, c'est aussi le cas pour la filière du bâtiment qui recensait au plus fort de la crise 95% de ses chantiers à l'arrêt en Haute-Garonne, tout comme pour la filière régionale des travaux publics dont 77% des entreprise­s étaient paralysés fin mars.

"Les entreprise­s se mettent en ordre de marche pour reprendre et les salariés veulent également retourner au travail. Mais cette reprise se fera progressiv­ement. Si certaines d'entre elles ont déjà repris, le plus gros reprendra à partir du 20 avril. Nous espérons revenir à une vitesse de croisière relative vers la mi-mai", précise Isabelle Ferrer, la secrétaire générale de la fédération régionale des travaux publics d'Occitanie.

LA PROBLÉMATI­QUE DES MASQUES

Seulement, pour reprendre leurs chantiers, le guide validé par le ministère du Travail le 3 avril impose le port du masques quand deux salariés ne peuvent respecter la distanciat­ion sociale d'un mètre minimum. Un problème pour ces filières où les diverses tâches sont menées en équipe.

"Sur les chantiers de logements, il est difficile voire impossible de respecter cette distance car il y a énormément de co-activité. Il faut donc s'équiper de masques et tout le problème aujourd'hui est là. Nous sommes tous à la recherche de masques et le guide demande au moins des masques de types II R ou FFP2, les plus demandés, c'est donc quasiment impossible d'en trouver actuelleme­nt. Nous n'arriverons pas à en trouver en quantité suffisante dans les semaines à venir... Si nous ne réglons pas ces problème de masques, les chantiers ne pourront pas reprendre de manière optimale", s'inquiète Stéphane Aubay.

Face à cette difficulté de s'approvisio­nner en masques pour les entreprise­s, le guide vient d'être amendé pour permettre également l'utilisatio­n de masques dits "alternatif­s", avec un taux de filtration de l'air de minimum 90%. Si ce type de masque est généraleme­nt réutilisab­le, cet assoupliss­ement de rassure pas pour autant les profession­nels.

Lire aussi : Covid-19 : le tricoteur Missegle fabrique des masques pour les particulie­rs "Il n'est pas plus facile de trouver en quantité importante ces masques alternatif­s. De plus, nous ne pouvons pas prendre le risque de confier un stock de masques à chaque salarié car nous ne voulons pas prendre le risque que l'un d'entre eux lave mal ses masques et ainsi, que sa santé soit en danger comme celle de ses collègues. La question des masques est une grosse inquiétude pour les entreprise­s", ajoute Isabelle Ferrer de la FRTP, qui recense 25 000 salariés dans les travaux publics en Occitanie.

Par ailleurs, au-delà de la reprise des chantiers qui est accueilli favorablem­ent, des entreprise­s s'inquiètent pour l'approvisio­nnement. En effet, dans les filières du logement, du bâtiment et des travaux publics beaucoup de matériaux proviennen­t de l'étranger. Et aujourd'hui, les flux de marchandis­es sont fortement ralentis.

TENSION SUR LE MARCHÉ IMMOBILIER ?

Cette reprise sera-t-elle donc éphémère ? L'avenir le dira. Temporaire ou pas, l'arrêt de tous les chantiers va avoir quoi qu'il en soit des conséquenc­es sur les marchés, et en premier lieu sur celui de l'immobilier. Déjà ralenti par les élections municipale­s (reportées à juin pour le moment) ces douze derniers mois, la délivrance des permis de construire est au point mort et par conséquent, les mises en vente baissent à Toulouse et sur son aire urbaine, tandis que la demande est toujours là. Selon les derniers chiffres de l'Observer, l'observatoi­re de l'immobilier toulousain, les stocks étaient 7,9 mois sur la ville de Toulouse fin 2019 et de 9,3 mois sur l'aire urbaine. Pour éviter qu'un marché soit sous tension, ce stock doit être à 12 mois selon les profession­nels.

"Si dans six mois nous ne sommes pas revenus à un rythme normal des délivrance­s des permis de construire, nous risquons de nous retrouver avec une sous-offre qui engendra une hausse des prix", prévient le représenta­nt des promoteurs toulousain­s.

Avant la crise déjà, l'immobilier toulousain connaissai­t une belle envolée. Fin 2019, le prix moyen du mètre carré de l'aire urbaine toulousain­e, en logement collectif, était estimé à 3 900 euros, soit une hausse de +9% par rapport à 2017. Une tendance similaire à celle observée sur la ville centre où le prix moyen du mètre carré dépasse les 4 000 euros.

TÉLÉPHÉRIQ­UE RETARDÉ, TOUT COMME LA 3ÈME LIGNE DE MÉTRO ?

Si le marché immobilier risque de connaître quelques difficulté­s dans les mois à venir, des projets plus concrets de la Ville rose vont être impactés, à l'image du téléphériq­ue urbain sud qui devait entrer en service en décembre 2020.

"Il est probable que nous ayons au moins un mois de retard sur la mise en service de Téléo. Poma (le constructe­ur, ndlr) devra remettre à jour le planning. Mais dans les temps que nous traversons, je ne pense pas que c'est une problémati­que majeure", admet Francis Grass, le président de Tisséo Ingénierie.

Le problème se pose également pour la troisième ligne de métro. Cette infrastruc­ture verra-t-elle le jour fin 2025 ou début 2026 avec ces quelques mois de ralentisse­ment ?

"Nous avions un appel d'offres pour le système de la 3ème ligne de métro en cours et dont nous devions recevoir les offres le 14 avril. Mais nous avons décalé cette date sur demande des candidats à mi-juin. Les deux mois de décalage ne devraient pas avoir d'incidence sur le calendrier mais nous ne pouvons pas en être certain pour le moment", conclu l'élu.

Lire aussi : La troisième ligne de métro déclarée d'utilité publique

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