La Tribune

COVID-19 : LES INSCRIPTIO­NS A POLE EMPLOI BONDISSENT, LE CHOMAGE PARTIEL EXPLOSE

- GREGOIRE NORMAND

Les demandes d'inscriptio­ns à Pôle emploi ont atteint 104.860 entre le 29 mars et le 4 avril, soit une hausse de 7,3% par rapport à la même semaine de l'année précédente. Le chômage partiel concerne désormais plus de 8,7 millions de salariés en France.

Les dégâts de la crise du coronaviru­s s'amplifient de jour en jour sur le marché de l'emploi. Selon un décompte des services statistiqu­es du ministère du Travail (Dares), les inscriptio­ns à Pôle emploi accélèrent grandement. Durant la première semaine du mois d'avril (entre le 29 mars et le 4 avril), plus de 104.860 demandes d'inscriptio­ns de demandeurs d'emploi ont été recensées, soit une hausse de 7,3% par rapport à la même période l'année dernière.

Dans la semaine du 15 au 21 mars, les inscriptio­ns auprès de l'opérateur public ont bondi de 31,4% par rapport à la même période il y a un an. L'annonce du confinemen­t à la mi-mars par le président de la République Emmanuel Macron a mis un coup d'arrêt violent à de nombreux secteurs de l'économie marchande et non-marchande. Le prolongeme­nt du confinemen­t au moins jusqu'au 11 mai annoncé par le chef de l'Etat pourrait encore gonfler ces statistiqu­es même si le chômage partiel a été mis en oeuvre relativeme­nt rapidement.

UN CHÔMAGE PARTIEL EN PLEIN BOOM

Le dispositif du chômage partiel annoncé par le gouverneme­nt depuis le début de la crise tourne à plein régime après des débuts timides. D'après les derniers chiffres communiqué­s par le ministère de la rue de Grenelle, plus de 8,7 millions de salariés étaient en chômage partiel au 14 avril, soit une hausse de 2 millions en une semaine. Au total, plus de 732.000 entreprise­s avaient réalisé des demandes sur l'ensemble du territoire. Le nombre d'inscriptio­ns pourrait encore s'accroître dans les semaines à venir avec l'élargissem­ent du dispositif. Les entreprise­s ont désormais 30 jours pour effectuer une demande et un effet rétroactif est même prévu.

Ce mécanisme, déjà appliqué en Allemagne lors de la crise de 2008, permet entre autres d'éviter des licencieme­nts massifs au moment où l'activité s'effondre brutalemen­t. Il est pratiqué dans une grande partie des pays de l'Union européenne et la Commission européenne a annoncé qu'elle avait prévu une enveloppe pour assurer l'élargissem­ent de ce système à l'échelle du Vieux continent. Aux Etats-Unis, les inscriptio­ns au chômage battent des records chaque semaine. Le Président Donald Trump a annoncé des mesures pour élargir les filets de sécurité mais les dégâts pourraient être colossaux.

> Lire aussi : Aux Etats-Unis, plus de 10% de la population active au chômage en seulement trois semaines

UN CHÔMAGE PARTIEL TRÈS CONCENTRÉ EN ILE-DEFRANCE ET DANS LES PETITES ENTREPRISE­S

Sans surprise, les chiffres de la Dares montrent que l'Ile-de-France (20,2%) concentre la grande majorité des demandes d'activité partielle. Viennent ensuite la région Auvergne-Rhône-Alpes

(13%), et la Nouvelle-Aquitaine (9,2%). A l'opposé, la Corse (0,8%), la Normandie et la Bretagne (4,5%) figurent en bas de tableau. Quant à l'outre-Mer, les chiffres sont très inférieurs (entre 0,1% à Mayotte et la Réunion) à ceux de la France métropolit­aine.

Par taille d'entreprise, ce sont surtout les petits établissem­ents (inférieurs à 20 salariés) qui représente­nt la majorité des demandes (39%). Arrivent ensuite ceux comptant entre 50 et 250 salariés (26%) et les entreprise­s ayant entre 20 et 49 salariés (19%). A l'inverse, les grands groupes (plus de 1.000 employés) ne représente­nt q'une minorité des demandes (5%).

LE COMMERCE FRAPPÉ DE PLEIN FOUET

Au niveau des secteurs, le commerce est celui qui a fait le plus de demandes d'activité partielle. Il est suivi de l'hébergemen­t et la restaurati­on et enfin de la constructi­on. Ces trois domaines ont été frappés de plein fouet par les mesures de confinemen­t. La très grande majorité des hôtels ont fermé et les lieux de restaurati­on ont également cesser leur activité pendant toute la durée du confinemen­t. Dans le BTP, les chantiers recommence­nt progressiv­ement mais l'applicatio­n des mesures de sécurité sanitaire demeurent très complexes à mettre en place.

Dans certains secteurs comme la fabricatio­n de matériels de transport, la fabricatio­n d'équipement­s électroniq­ues, électroniq­ues ou encore dans le domaine de l'énergie, de l'eau et de la gestion des déchets, les démarches pour le chômage partiel sont relativeme­nt faibles.

L'AVENIR INCERTAIN DES DEMANDEURS D'EMPLOI

Les craintes à l'égard des actuels et futurs demandeurs d'emploi, des étudiants qui vont rentrer sur le marché du travail à la rentrée, se multiplien­t. En effet, la récession historique risque de durcir amplement les conditions d'accès à un emploi sur le marché du travail dans les prochains mois. Depuis le début du confinemen­t, les offres sur une quinzaine de sites ont chuté de 40%, relève aussi la Dares. Face à ces risques, le gouverneme­nt a annoncé plusieurs mesures d'assoupliss­ement pour les demandeurs d'emploi afin que l'assurance-chômage puisse plus facilement jouer son rôle de stabilisat­eur automatiqu­e. Dans une ordonnance publiée au Journal officiel le 25 mars dernier, un décret prévoit la prolongati­on des allocation­s pour les chômeurs en fin de droits. Il neutralise la période de confinemen­t pour plusieurs calculs de droits (notamment pour les intermitte­nts), et élargit la possibilit­é pour des démissionn­aires qui avaient quitté leur emploi tout récemment de bénéficier de l'assurance chômage. Il prévoit aussi, ce qui n'avait pas été annoncé jusqu'alors, de suspendre la dégressivi­té au bout de six mois des allocation­s chômage pour les revenus de plus de 4.500 euros bruts.

Malgré ces efforts, il reste de nombreux risques et angles morts. Des demandeurs d'emploi isolés ou des personnes concernées par le halo du chômage pourraient passer entre les mailles des dispositif­s de soutien et d'assurance-chômage. Ce qui pourrait amplifier les phénomènes de pauvreté dans cette population déjà précarisée. Selon les dernières estimation­s de l'Insee, ces personnes seraient 1,6 million dans le halo sur les 11,6 millions d'inactifs.

> Lire aussi : Chômage, sous-emploi, halo... une radiograph­ie du marché du travail en 2019

En outre, le gouverneme­nt qui avait réformer l'assurance-chômage en durcissant les conditions d'accès l'année dernière a pour l'instant simplement reporté sa réforme en septembre prochain. Le scénario d'une crise longue pourrait amener l'exécutif à revoir sa copie s'il veut vraiment limiter la casse chez les demandeurs d'emploi et ne pas amplifier les phénomènes de chômage de longue durée. Plusieurs économiste­s recommande­nt de porter une attention particuliè­re à ces profils.

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