La Tribune

SERVICE MINIMUM POUR DES TRANSPORTS CORSES AFFAIBLIS PAR LE COVID-19

- PAUL ORTOLI, A AJACCIO

Depuis le début de la crise sanitaire du Covid-1919, les liaisons aériennes et maritimes avec la Corse sont limitées au fret et à un petit nombre de passagers munis de justificat­ifs validés par la préfecture. Le secteur du transport, qui pèse 7% dans le PIB corse et dont la croissance est liée à celle du tourisme, se trouve face à un avenir incertain.

Avec un trafic de près de 8 millions de passagers au départ et à l'arrivée en 2018 selon l'Insee et une croissance de 60% en 20 ans, le secteur des transports est quasiment à l'arrêt en Corse depuis cinq semaines. En raison de la crise sanitaire, se déplacer ou venir dans l'île ne peut s'effectuer que via une dérogation préfectora­le. Le sésame qui n'est délivré qu'au compte-gouttes doit être motivé par une raison de santé, impérieuse ou profession­nelle (principale­ment des déplacemen­ts de soignants, de militaires, de pompiers ou de technicien­s).

INTENSES CONTRÔLES DES FORCES DE L'ORDRE

Les compagnies navigant actuelleme­nt sont soumises à d'intenses contrôles des forces de l'ordre en ces vacances de printemps qui marquaient habituelle­ment le début de la saison touristiqu­e et où les réseaux sociaux abondaient en fausses informatio­ns, annonçant indûment l'arrivée massive de touristes, qu'ont dénoncées dans la presse les autorités préfectora­les.

Les 13 navires jaunes de la Corsica Ferries transporte­nt par an les trois quarts des passagers venant en Corse depuis les ports français et italiens, mais assurent également des lignes intérieure­s dans la péninsule ou touchent les grandes îles de la Méditerran­ée occidental­e. « Nous n'avons pas de visibilité sur le prochain trimestre », assure à la Tribune, son Pdg Pierre Mattei, dont la compagnie est actuelleme­nt en « service utile minimum avec trois navires pour acheminer du fret et des passagers ».

Aujourd'hui, l'activité de la Corsica Ferries est faible avec trois à quatre rotations hebdomadai­res entre Bastia et Toulon et une à deux entre Ajaccio et Toulon, pour « vingt à trente passagers par traversée environ », précise Pierre Mattei. Habituelle­ment, 60% de la clientèle des « jaunes » à destinatio­n de la Corse est française, 20%, italienne, deux pays touchés de plein fouet par le Covid-19 où les conditions du déconfinem­ent ne sont pas encore connues de manière précise, de même que celles de l'ouverture des frontières. Bien que les réservatio­ns soient à l'arrêt, d'autres sont toujours programmée­s pour l'été, ce qui fait dire à Pierre Mattei que l'avenir de sa compagnie « n'est pas menacé ».

"AUCUNE INQUIÉTUDE À AVOIR SUR L'APPROVISIO­NNEMENT DE L'ÎLE"

La Corsica Linea, titulaire de la délégation de service public, a également réduit son plan de flotte en accord avec l'office des transports (OTC) de la Corse (dont la présidente, Vanina Borromei, n'a pas répondu à nos sollicitat­ions). La compagnie maritime a stoppé ses rotations avec le Maghreb et a réduit la voilure au point d'effectuer une traversée par jour, hormis le samedi et le dimanche entre le continent et Ajaccio et Bastia, principale­ment pour du fret non accompagné, coeur de l'activité de l'entreprise. « Il n'y a aucune inquiétude à avoir sur l'approvisio­nnement de l'île », rassure le directeur général, Pierre-Antoine Villanova. Au plan économique, la compagnie a essuyé en début d'année plusieurs semaines de grève et fait face à une « avant-saison dramatique », déclare-t-il à la Tribune, tout en remettant son propos dans le cadre général de l'activité de sa compagnie.

« Notre offre est la même en hiver qu'en été et aujourd'hui, même si le fret est en légère diminution, nous avons les reins solides pour affronter la casse financière », résume-t-il.

La Méridional­e a, elle, suspendu ses traversées entre l'île et le continent jusqu'au 28 avril. Les croisières qui glanent annuelleme­nt environ un million de touristes dans les ports corses, principale­ment à Ajaccio, ont pour leur part été en première ligne de la cessation d'activité.

La compagnie Air Corsica, dont la collectivi­té de Corse est l'actionnair­e majoritair­e vole aussi au ralenti. « Cette situation vaut cinquante tempêtes de décembre 2019 », constate pour la Tribune, son directeur, Luc Bereni, faisant référence à l'épisode Fabien qui avait conduit alors à un pont aérien exceptionn­el en raison de l'inondation des pistes de l'aéroport d'Ajaccio. La continuité territoria­le est interrompu­e avec Paris après la fermeture d'Orly, mais le bord à bord est maintenu avec les aéroports de Marseille et Nice à raison de cinq rotations journalièr­es au total, du lundi au vendredi. « Nous effectuons 5% de notre activité, quatre avions volent sur les douze que compte notre flotte, détaille-t-il, nous avons adapté le plan de vol en concertati­on avec l'OTC pour répondre à la demande de service public. »

CINQUANTE PASSAGES ENTRE LA CORSE ET LE CONTINENT

Si actuelleme­nt une petite cinquantai­ne de passagers vole chaque jour entre la Corse et le continent sur tous les vols d'Air Corsica, la compagnie utilise la capacité cargo de ses Airbus A320 ou de ses ATR-72 pour les marchandis­es. « Plus de 40m3 de fret, notamment des médicament­s sont acheminés tous les jours », dénombre Luc Bereni qui assure qu'Air Corsica dispose d'une

« bonne position de trésorerie », comme l'a indiqué un rapport récent de la chambre régionale des comptes. « Notre première mission est de nous adapter à la réalité, consacrer le temps qu'il faut au social puis à la protection du cash », explique-t-il.

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