La Tribune

COMMENT LE COVID-19 RALENTIT LES PROJETS DES FRERES (ETOILES) POURCEL

- CECILE CHAIGNEAU

Pour les célèbres frères Jacques et Laurent Pourcel, restaurate­urs montpellié­rains un temps étoilés et toujours réputés, l’année 2020 devait être celle d’un grand virage, avec l’ouverture au printemps du luxueux établissem­ent d’hôtellerie-restaurati­on au sein de l’Hôtel Richer de Belleval, à Montpellie­r. La crise sanitaire du Covid-19 a mis un sérieux coup d’arrêt à ce projet, mais aussi à celui du restaurant de plage Carré Mer, qui aurait dû rouvrir en mars à Villeneuve-lès-Maguelone.

En coeur de ville de Montpellie­r, l'Hôtel Richer de Belleval, bâtisse du XVIIe siècle, fait l'objet d'un important programme de restaurati­on depuis juillet 2017. Classe? en intégralit­é au titre des Monuments Historique­s, il a été acquis en 2017 par le groupe GGL (aménageur montpellié­rain) et sa filiale de promotion immobilièr­e Hélénis, en partenaria­t avec le groupe Cha?teau-Pourcel dirigé par les frères Pourcel, Jacques et Laurent, célèbres restaurate­urs montpellié­rains.

Le projet (12 à 14 M€ d'investisse­ment global) est haut de gamme : installer dans ce bâtiment de 2 000 m2 un hôtel de luxe Relais & Châteaux de 20 chambres (géré par le groupe Château-Pourcel), le nouveau restaurant gastronomi­que Le Jardin des Sens de Jacques et Laurent Pourcel (l'institutio­n montpellié­raine, triplement étoilé au Michelin de 1998 à 2006, avait fermé ses portes en mars 2016, après vingt-huit années d'existence), ainsi que la Fondation d'entreprise Hélénis GGL, dédiée a? l'art contempora­in.

MARBRE D'ITALIE BLOQUÉ AUX FRONTIÈRES

Après deux ans de lourds travaux, l'établissem­ent devait ouvrir ses portes au printemps 2020. C'était sans compter sur la crise sanitaire liée au Covid-19 qui a mis un sérieux coup d'arrêt au projet.

« Le chantier a été à l'arrêt pendant un mois, et il vient de reprendre ces jours-ci avec quelques corps de métiers, annonce Jacques Pourcel. Le problème, ce sont les matériaux, qui viennent d'Italie - par exemple le marbre pour les salles de bain - et qui sont bloqués aux frontières. Et les ouvriers sur le chantier travaillen­t au ralenti, les gestes barrières n'étant pas évidents pour certains métiers. »

Résultat : l'ouverture de l'établissem­ent ne se fera pas avant octobre 2020 au mieux, « peut-être plus tard, selon comment le chantier aura avancé », s'interroge Jacques Pourcel. Et ce n'est pas sa seule inquiétude. Le restaurate­ur et chef d'entreprise redoute aussi l'incertitud­e qui règne autour de l'ouverture des frontières à l'issue des périodes de confinemen­t imposées par les gouverneme­nts.

« Or la clientèle de l'hôtel est à 70 % étrangère, asiatique, américaine ou européenne, ce qui signifie donc un équilibre économique remis en balance, s'inquiète-t-il. On misait un chiffre d'affaires d'environ 700 000 € par mois, mais ça va être compliqué les premiers mois et on aura quand même 70 salariés. On est vraiment sur la prudence... »

Une vingtaine de salariés doivent basculer du restaurant Terminal#1 (le restaurant que les frères Pourcel avaient ouvert au sud de Montpellie­r en 2016, après la fermeture du Jardin des Sens et en attendant l'ouverture du nouveau Jardin des Sens à l'Hôtel Richer de Belleval) au futur nouveau restaurant. Depuis le 16 mars, ils sont au chômage partiel. D'autres salariés viendront s'ajouter. Certains, déjà recrutés, devaient prendre leur poste en juin et ont vu leur arrivée repoussée en septembre.

LE CARRÉ MER DANS L'EXPECTATIV­E

L'autre souci de Jacques et Laurent Pourcel, c'est leur adresse estivale : le restaurant de plage Carré Mer, qui aurait dû traditionn­ellement rouvrir en mars à Villeneuve-lès-Maguelone.

« L'an dernier, nous avions ouvert le 26 mars, rappelle Jacques Pourcel. Nous avons démarré le montage de la structure début mars et maintenu les travaux jusqu'à la 3e semaine de mars. Le montage représente un investisse­ment de 120 000 €, et nous avons déjà dépensé 80 000 €. Aujourd'hui, tout est arrêté, avec une grosse incertitud­e sur l'ouverture, on ne sait pas où on va... Or la saison n'est pas longue, environ cinq mois ! »

Au total, les frères Pourcel réalisent un chiffre d'affaires de 2,6 M€ sur la saison estivale. Mais Jacques Pourcel est pessimiste : « Si on ne peut pas ouvrir avant la mi-juillet, il y a des chances qu'on n'ouvre pas du tout car il resterait un mois et demi et ce ne serait pas rentable ».

Cinq personnes travaillen­t toute l'année sur cette table estivale, et 45 en pleine saison.

« Cette situation est exceptionn­elle, violente, subie, s'inquiète Jacques Pourcel. Les entreprise­s solides passeront le cap, mais les autres... Coté fournisseu­rs, on règle les factures, et il faut sortir les salaires en attendant d'être remboursés du chômage partiel. On est soucieux mais si jamais ça repart, comme la région n'a pas été trop touchée par le Covid-19, on se dit que les gens auront envie de sortir et reviendron­t ! »

AILLEURS

Le chef d'entreprise se réjouit toutefois des dispositif­s d'aides qui viennent soutenir les entreprise­s et les salariés.

« Les dispositif­s de soutien sont très importants en France, par rapport à ce qui se fait ailleurs, nous le voyons bien avec nos restaurant­s à l'étranger, observe-t-il. Au Sri Lanka, les établissem­ents ferment et personne n'a plus rien. Nous, nous maintenons 50 % du salaire de nos employés. Au Japon, tout est fermé jusqu'à fin avril, mais s'il existe des dispositif­s de soutien à l'économie, il n'y a aucune mesure pour les salariés. Au Vietnam, les restaurant­s ont fermé puis rouvert puis refermé, on tourne au ralenti. »

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