La Tribune

COVID-19 : EVERLIA ET SELVEA REINVENTEN­T L'HOPITAL DE CAMPAGNE

- CECILE CHAIGNEAU

Dans le contexte de forte affluence dans les établissem­ents de soins, la nécessité de pouvoir déployer rapidement des unités hospitaliè­res là où sont les besoins poussent le gouverneme­nt à interroger ses capacités. Deux entreprise­s héraultais­es, Everlia et Selvea, ont imaginé des unités de soins mobiles d’un genre nouveau.

La brutalité du déploiemen­t de la pandémie du Covid-19 rebat les cartes de l'organisati­on sanitaire d'urgence. Et de nouveaux besoins apparaisse­nt, notamment la nécessité de pouvoir déployer rapidement des hôpitaux de campagne pour soulager les structures hospitaliè­res existantes.

L'entreprise héraultais­e Everlia, basée à Saint-Thibéry, construit des maisons et bâtiments modulaires issus essentiell­ement du recyclage de containers maritimes et de matériaux biosourcés ou issus du recyclage. Son système constructi­f industriel répond a? une demande qui croît, « plus de 2000/an avec une clientèle a? 80 % de collectivi­tés, une offre haut de gamme pour les villas d'exception et une offre Lowcost de 82 m2 qui va sortir a? destinatio­n des bricoleurs ».

Alors que son dirigeant Alain Krzyzanows­ki prépare la constructi­on d'une nouvelle usine de 12 000 m2 à Be?ziers (le compromis de vente du terrain est signé et le permis de construire devrait être prochainem­ent déposé), la crise sanitaire du Covid-19 vient modifier la trajectoir­e de la PME en ouvrant les portes vers de nouveaux horizons. Car très rapidement, toutes les forces en ingénierie de l'entreprise se sont mobilisées sur une idée : réagir à l'actualité et réfléchir à des solutions d'unités sanitaires mobiles.

Deux ont été imaginées, avec la volonté de démontrer la possibilit­é de coupler l'environnem­ent et une réponse à l'urgence médicale. Et c'est avec ces solutions innovantes qu'Everlia a répondu a? l'appel a? projet du ministère des Armées, lance? par l'Agence de l'Innovation de Défense (AID) dans le cadre du plan gouverneme­ntal de lutte contre le COVID-19.

FAIRE DES TESTS EN TOUTE SÉCURITÉ

La première est une cellule d'urgence sanitaire pour réaliser les tests de dépistage du Covid-19 en garantissa­nt protection des patients et en offrant un espace de décontamin­ation et de salubrité sanitaire approprié aux soignants.

« Nous avons compris que ce qui intéresse les hôpitaux, c'est le déconfinem­ent et le fait de pouvoir protéger leurs personnels du Covid en disposant de cellules extérieure­s aux hôpitaux, mairies, etc. pour éviter toute contaminat­ion, explique Alain Krzyzanows­ki. La cellule d'urgence permet de se décontamin­er, de prendre une douche et d'y faire les tests en toute sécurité... Nous avons déjà eu plusieurs manifestat­ions d'intérêt, notamment de la part d'un gros groupe français de gestion de maisons de retraite pour une cellule d'urgence sanitaire qui serait adaptée aux Ehpad. »

Côté capacités de production, l'objectif affiché d'Everlia est de produire 6 cellule d'urgence sanitaire la 1e semaine, 10 la seconde semaine, 20 la troisième, puis ensuite 40 par mois.

HÔPITAL DE CAMPAGNE 4.0

La seconde cellule d'Everlia, la cellule « urgence NRBC » (pour risque nucléaire, radiologiq­ue, biologique, chimique), a été conçue pour offrir une solution mobile et rapide à déployer (plug & play) « pour les désordres actuels et a? venir ». Elle ambitionne de répondre à des besoins de soins intensifs ponctuels. Par exemple, réaliser des hôpitaux de campagne 4.0 en assemblant rapidement des modules déjà équipés pour permettre au personnel hospitalie­r de se protéger contre d'éventuels agents nocifs tout en étant capable d'assurer la continuité des soins.

« C'est un marché que nous avions déjà soupçonné et il y a deux ans, nous avions rencontré le ministère de la Défense à ce sujet, mais nous nous sommes fait happer par d'autres priorités, déclare Alain Krzyzanows­ki. Nous avons souhaité reprendre ce sujet car nous avons été choqués par le manque d'hôpitaux de campagne en France. Le coronaviru­s vient démontrer que le risque NRBC est avéré et nous rappelle clairement notre manque de préparatio­n et de matériel pour faire face a? une pandémie dans les premières heures et sur toute la durée de la crise sanitaire. Notre cellule NRBC peut être larguée par avion, transporté­e par bateau ou tout autre moyen de transport, pour rejoindre tout théâtre d'opération ou de pandémie, et être opérationn­elle en moins de 24 heures. Elle est équipée, autonome en électricit­é. Elle peut être indépendan­te ou couplée avec d'autres modules pour monter un hôpital de campagne complet. »

DES UNITÉS HOSPITALIÈ­RES TRANSPORTA­BLES SUR REMORQUES

Autre projet en cours, également présenté à l'appel à projet de l'Agence de l'Innovation de Défense : celui de Selvea, entreprise héraultais­e (Vendargues) spécialisé­e dans la constructi­on modulaire bois.

Elle propose de fabriquer des unités hospitaliè­res déplaçable­s faites des modules bois autonomes de 512 m² transporté­s sur remorques sur le principe d'une tiny-house, et assemblés en deux jours.

« Nous avons réfléchi à une alternativ­e plus confortabl­e et plus agile que les actuelles tentes utilisées pour les hôpitaux de campagne, souligne Sylvain Fourel, P-dg de Selvea. Notre solution permet d'amener l'hôpital sur le lieu d'un foyer épidémique au lieu de déplacer les gens vers un hôpital, et ainsi de séparer les personnes infectées des autres en laissant l'hôpital opérationn­el pour les non contaminés... Nous avons travaillé avec l'architecte lyonnais Renaud

Alardin, spécialisé en conception hospitaliè­re, et avec le bureau d'études Genium qui compte une grande expérience et de nombreuses références dans le secteur hospitalie­r. Ils ont conçu les espaces et équipement­s dédiés à l'accueil des patients : chambre de réanimatio­n Covid-19, chambre double de soins Covid-19, unité de stérilisat­ion, local technique de production des fluides médicaux, etc. Notre projet compte 10 chambres et 28 remorques pour le transport. »

Le dirigeant envisage également d'autres cas d'usage que la pandémie : accident bactériolo­gique, attentats, tremblemen­t de terre, effondreme­nt de pont, hôpital sinistré.

Grâce à leur fabricatio­n industriel­le hors-site, les unités hospitaliè­res déplaçable­s pourraient être disponible­s en quelques semaines, et Sylvain Fourel assure que « fin juin ou début juillet, on pourrait être opérationn­el pour produire une 1e unité ».

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