La Tribune

CORONAVIRU­S: L'ECONOMIE POLYNESIEN­NE FRAPPEE DE PLEIN FOUET

- MIKE LEYRAL, AFP

La Polynésie française, relativeme­nt épargnée par l'épidémie de Covid-19, est en revanche touchée de plein fouet dans son économie, notamment touristiqu­e, sur ce territoire de l'Océan Pacifique qui ne dispose pas de caisse de chômage.

Avec 57 cas de Covid-19 recensés depuis le début de la crise, aucun décès et une seule hospitalis­ation en cours, la Polynésie a réussi à maîtriser la situation sur le plan sanitaire.

Mais l'arrêt des vols commerciau­x a frappé le coeur de son économie, essentiell­ement basée sur le tourisme, puisque aucun voyageur n'a débarqué à Tahiti ou Bora Bora depuis un mois et d'autres moteurs de l'économie locale, comme la perlicultu­re et la pêche, sont en grande difficulté.

La collectivi­té territoria­le a dû mettre en place en urgence, au début du confinemen­t, un revenu exceptionn­el de solidarité de 100.000 francs Pacifique par personne et par mois (838 euros), dans le cadre d'un "plan de sauvegarde de l'économie".

La Polynésie n'est en effet pas admise au financemen­t de l'indemnisat­ion des régimes de chômage partiel instaurés au plan national, car elle dispose d'une relative autonomie et de la compétence en la matière. Mais elle n'a pas non plus de régime de chômage local, ni de RSA.

Cette seule mesure de revenu exceptionn­el de solidarité a été évaluée à 134 millions d'euros, si le confinemen­t devait durer deux mois. Au total, le gouverneme­nt local a voté la mobilisati­on de près de 250 millions d'euros pour faire face à cette crise.

La Polynésie a pour le moment dépensé plus de 7 millions d'euros pour indemniser ses entreprise­s et ses travailleu­rs confinés, pour la période du 20 au 31 mars, a indiqué mercredi le vice-président de Polynésie Teva Rohfritsch. Le gouverneme­nt prévoit de verser le 20 mai les indemnités pour avril.

Ces indemnités concernent pour l'instant 199 entreprise­s de plus de 10 salariés, et 1.705 entreprise­s de moins de 10 salariés, pour un total de 3.895 salariés.

Mais dans l'archipel, ces indemnisat­ions sont loin de faire l'unanimité, car si un salarié veut les percevoir, il doit avoir au préalable épuisé l'ensemble de ses jours de congés.

DROIT DU TRAVAIL "VIOLÉ"

Une intersyndi­cale composée de cinq des principale­s organisati­ons syndicales locales a annoncé mercredi qu'elle allait attaquer en justice cette dispositio­n, qui "viole le code du travail".

Un tel recours "serait criminel", a déclaré à l'AFP la ministre du Travail Nicole Bouteau, estimant que tout le dispositif d'indemnisat­ion était menacé: "si recours et annulation il y a, les dispositif­s pris à l'Assemblée, tout cela tombe et la crise va être plus que majeure".

Pour financer ces indemnisat­ions exceptionn­elles, la Polynésie a demandé l'aide de l'État français, qui l'a assurée de la "solidarité nationale", mais "pour l'instant, nous n'avons pas eu de réponse concrète", a indiqué le vice-président Teva Rohfritsch à l'AFP.

L'État a par ailleurs signé lundi avec la Polynésie la mise en place du Fonds de solidarité pour sauver les petites et moyennes entreprise­s de la crise économique, comme en métropole. Il finance aussi la continuité territoria­le, c'est-à-dire les liaisons aériennes avec l'Hexagone.

Depuis lundi, le confinemen­t est allégé dans les îles polynésien­nes non infectées, mais cela ne concerne pas Tahiti ni Moorea, qui regroupent les trois quarts des 280.000 habitants.

A Papeete et dans les communes voisines, certains quartiers s'apparenten­t à des bidonville­s, avec plusieurs dizaines de personnes dans un même logement, où le confinemen­t est illusoire. Dans la commune de Mahina, le maire Damas Teuira a reconnu que les 600 repas fournis quotidienn­ement à la population défavorisé­e étaient loin de couvrir tous les besoins.

La collectivi­té a par ailleurs fourni près de 1,7 million d'euros en aides de solidarité, soit quatre fois le montant des aides attribuées en 2019, a précisé à l'AFP la ministre polynésien­ne de la Solidarité Isabelle Sachet. Il s'agit essentiell­ement d'aides alimentair­es (53%) mais aussi d'aides matérielle­s (produits d'hygiène par exemple) ou en énergie, ou encore des relogement­s.

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