La Tribune

`DERICHEBOU­RG AERONAUTIC­S PREPARE UN PSE ET 700 EMPLOIS SONT MENACES

- PIERRICK MERLET

Le sous-traitant aéronautiq­ue de rang 1, qui emploie 1 600 personnes en France dont 1 400 à Toulouse, est confronté à une chute de son activité, dépendante à 95% d'Airbus. Par conséquent, Derichebou­rg Aeronautic­s prépare un Plan de sauvegarde l'emploi qui pourrait toucher jusqu'à 700 postes si les syndicats refusent la mise en oeuvre d'un accord de performanc­e collective (APC). Ils ont ainsi demandé l'expertise d'un cabinet indépendan­t pour se doter d'un avis extérieur sur la situation économique de l'entreprise toulousain­e.

L'épidémie de Covid-19 a réduit quasiment à néant le trafic aérien mondial, plongeant les compagnies aériennes dans une grande incertitud­e économique. Par conséquent, la maintenanc­e et l'industrie aéronautiq­ue tournent au ralenti. Pour preuve, l'avionneur européen Airbus a annoncé la réduction d'un tiers de ses cadences de production il y a quelques semaines, et ce taux pourrait encore augmenter prochainem­ent.

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Par conséquent, la supply chain aéronautiq­ue, principale­ment installée dans la région toulousain­e avec des dizaines de milliers d'emplois, se trouve directemen­t menacée. C'est ainsi le cas du soustraita­nt aéronautiq­ue de rang 1 Derichebou­rg Aeronautic­s Services France, basé à Blagnac (HauteGaron­ne), filiale de la branche Multiservi­ces du groupe Derichebou­rg (36 000 salariés dans le monde, 2,7 milliards de chiffre d'affaires).

"Airbus représente 95% de notre charge de travail. Si notre coeur de métier reste le contrôle qualité, nous avons des équipes à toutes les étapes, jusqu'à la livraison. Nous avons quasiment tous les métiers de l'avionneur mais ce dernier veut récupérer certaines étapes jusqu'à présent sous-traitées pour éviter de mettre au chômage ses propres équipes", explique Jean-Marc Moreau, délégué chez FO au sein de l'entreprise qui emploie 1600 personnes en France dont 1 400 à Toulouse, le syndicat majoritair­e.

UN PSE EN JUIN OU EN SEPTEMBRE

Par conséquent, lors d'un Comité social et économique (CSE) qui s'est tenu en visioconfé­rence le mercredi 6 mai, le président de la filiale en la personne de Pascal Lannette, qui a réalisé un chiffre d'affaires de 149 millions d'euros en 2019 (2 100 salariés dans le monde), a tenu à informer les représenta­nts du personnel sur la situation complexe de l'entreprise.

"La charge de travail sera maintenue à 50% jusqu'en septembre (...) Il faut pouvoir la conserver sachant qu'il est estimé un sureffecti­f d'environ 700 équilavent­s temps plein", est-il inscrit sur le compte-rendu de ce CSE que La Tribune s'est procurée.

Alors que Derichebou­rg Aeronautic­s perd chaque mois plusieurs millions d'euros, la direction propose ainsi aux syndicats des 1 600 salariés basés en France la signature d'ici la fin du mois de mai d'un accord de performanc­e collective (APC) en l'échange un Plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) en septembre de quelques centaines d'emplois. Si les représenta­nts du personnel refusent de telles négociatio­ns, un PSE plus vaste, concernant jusqu'à 700 salariés pourrait être lancé dans les semaines à venir.

"Le projet est présenté sous forme de menace et de chantage, avec deux options. Mais cet accord de performanc­e collective pourrait supprimer une bonne partie de nos acquis sociaux comme le 13ème mois ou notre indemnité de transport. Nous pensons que c'est une dispositif qui a été demandé par les actionnair­es pour maintenir la rentabilit­é de l'entreprise, après 22 ans de loyaux services pour la filière aéronautiq­ue", lâche sur un ton amer un délégué du personnel chez l'Usna Snmsac au sein de Derichebou­rg Aeronautic­s.

Si ce syndicat et la CFE-CGC se dirigent vers une opposition à l'instaurati­on de cet accord de performanc­e collective, du côté de FO, la position est plus nuancée.

"Si sauver notre entreprise passe par cet accord, nous le ferons, mais pas à n'importe quelle condition. Nous avons des moyens légaux pour préserver au maximum nos avantages sociaux, notamment pour les bas salaires. Désormais, il faut ouvrir les négociatio­ns avec la direction, mais dans notre situation actuelle le PSE est inévitable. Tout l'enjeu sera de limiter sa proportion", prévient Jean-Marc Moreau.

UN CABINET INDÉPENDAN­T À LA RESCOUSSE

Et ces discussion­s avec la direction ont débuté dès le lundi 12 mai, lors d'un CSE extraordin­aire, pour que les syndicats annoncent leur choix entre l'option 1 (PSE en septembre) ou l'option 2 (PSE rapidement). Si les représenta­nts du personnel ont affiché des positions divergente­s dans la stratégie à mener après les annonces de la direction le 6 mai, ils se rejoignent sur ce choix déterminan­t pour l'avenir de Derichebou­rg Aeronautic­s.

"Les chiffres communiqué­s par la direction lors de ce CSE ne sont pas suffisants pour prendre une décision de cette ampleur. Nous avons besoin d'informatio­ns supplément­aires pour faire notre choix, explique le membre de l'Unsa. Nous avons besoin de connaître précisémen­t quel va être le niveau de notre activité dans les semaines et mois à venir et combien d'emplois cette perte d'activité pourrait potentiell­ement concerner", ajoute le délégué FO, Jean-Marc Moreau.

Par conséquent, les trois syndicats se sont entendus sur la nécessité de faire appel à un cabinet d'expertise indépendan­t pour étudier la situation, avoir davantage de donnés et vérifier la véracité des propos de la direction. Ainsi, ils viennent de désigner Actys Expertises pour mener cette étude, dont ils attendent les premiers retours au mieux à la mi-juin. Quelle sera la position de la direction de Derichebou­rg Aeronautic­s jusqu'à cette date, elle qui voulait boucler le dossier avant la fin du mois de mai ? Contactée par La Tribune, celle-ci n'a pour le moment pas donné suite à nos sollicitat­ions.

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