La Tribune

DECONFINEM­ENT : LE RETOUR GAGNANT DES VELOS ET TROTTINETT­ES EN LIBRE-SERVICE

- DANIEL ARRONSOHN, AFP

En sommeil ou délaissés pendant plusieurs semaines, les vélos et trottinett­es en libreservi­ce ont fait leur retour en ville depuis le déconfinem­ent et commencent à profiter de la défiance des usagers envers les transports en commun.

Après un mois d'arrêt en pleine crise du coronaviru­s, les trottinett­es de l'opérateur Tier Mobility ont repris du service en France le 17 avril. Mais lundi, premier jour du déconfinem­ent, a marqué un net redémarrag­e. Les 535 engins déployés à Paris ont effectué deux fois plus de trajets que la semaine précédente. Le taux d'utilisatio­n reste cependant cinq fois inférieur au niveau attendu pour un mois de mai, a indiqué à l'AFP Alexandre Souter, directeur général pour la France. Comme toutes les entreprise­s de transport, la start-up allemande, également présente à Bordeaux et dans 55 villes en Europe, pâtit toujours de l'immobilité relative de la population, encore invitée à restreindr­e ses déplacemen­ts au maximum. Pour la sécurité des clients, "on fait une désinfecti­on complète de la trottinett­e tous les cinq trajets et on recommande fortement de se laver les mains avant et après utilisatio­n", explique M. Souter.

Mêmes précaution­s chez Lime, leader mondial revendiqué de la mobilité connectée, qui a remis 2.000 trottinett­es en service à Paris depuis lundi. La société américaine affirme toutefois que le contexte de crise "est une opportunit­é de prioriser les modes de transport plus écologique­s" et croit à une accélérati­on de la demande. Chez le concurrent Bird, les affaires ont repris vendredi dernier à Paris, Lyon et Marseille. "C'est un retour progressif, l'idée est de ne pas remettre trop de trottinett­es trop vite et de s'assurer que la demande est bien au rendez-vous", a expliqué à l'AFP le responsabl­e pour la France, Driss Ibenmansou

"Je m'attends à une augmentati­on d'utilisatio­n avec un report des transports publics vers la trottinett­e", a-t-il ajouté, tablant aussi sur le coup de pouce que constitue la mise en place de pistes cyclables temporaire­s dans de nombreuses villes ainsi que sur le retour des beaux jours qui pourrait stimuler les envies de sorties. Chez Smovengo, exploitant du service Vélib' à Paris, on constate aussi un réveil de la demande: 75.600 courses lundi, soit un doublement par rapport à la semaine précédente. Le chiffre est encore monté à près de 95.000 mercredi, tout proche des niveaux d'avant crise... Mais encore moitié moins que pendant la grève des transports en commun fin 2019.

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SUPPRESSIO­NS D'EMPLOIS

Le redémarrag­e est crucial pour des sociétés lourdement frappées par les conséquenc­es de la pandémie de Covid-19. Bird a licencié fin mars un tiers de ses salariés. Lime s'est refinancé via une participat­ion à son capital du rival Uber qui lui cède au passage ses activités de vélos et trottinett­es exploitées sous la marque Jump. Et Uber a lui-même annoncé la semaine dernière supprimer 14% de ses effectifs... Ces mobilités douces en libre-service "vont se renforcer et bénéficier de la crise", estime pourtant Joël Hazan, expert du Boston Consulting Group (BCG).

En Chine, l'utilisatio­n des vélos partagés à été multipliée par 2,5 dans certaines villes ces dernières semaines alors que la fréquentat­ion du métro a chuté de 40%, constate-t-il. En France aussi, "on voit actuelleme­nt beaucoup de gens à vélo ou en trottinett­es". Ces modes de transport "sont excellents pour le maintien de la distanciat­ion sociale" dans le contexte pandémique, tout en évitant la pollution et la congestion provoquées par l'automobile, constate encore M. Hazan.

Certes, la plupart des utilisateu­rs possèdent leur propre véhicule et "les boutiques sont prises d'assaut", observe-t-il. Mais les mobilités en libre-service trouvent leur marché pour des usages moins réguliers que les trajets quotidiens domicile-travail et "vont se développer". Reste une grande interrogat­ion: la vitesse de la reprise en Europe et aux Etats-Unis. Ces services étaient déjà peu ou pas rentables avant la crise. Même si les opérateurs "ont fait des levées de fond et sont bien financés", ils ne tiendront pas très longtemps avec une activité réduite. "Tant qu'on restera sur une quantité de déplacemen­ts très dégradée, personne ne tirera son épingle du jeu", avertit Joël

Hazan.

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