La Tribune

A BORDEAUX, DES PETITS PATRONS "SIDERES" RECOIVENT UN COUP DE MAIN D'ENTREPRENE­URS AGUERRIS

- NATHALIE ALONSO, AFP

L'associatio­n Entraide & entreprene­urs, spécialisé­e depuis 2016 dans l'accompagne­ment longue durée des entreprene­urs, est passée en "mode urgent" depuis le début de la crise sanitaire. Des bénévoles parrains sont là pour coacher leurs "filleuls" et les aider à traverser cette période difficile.

Voir sa trésorerie s'envoler, se débattre dans le maquis des aides, "ne plus savoir par quel bout" redémarrer: à Bordeaux, des petits patrons "sidérés" par la crise sanitaire reçoivent un coup de main d'entreprene­urs aguerris pour ne pas sombrer.

Depuis quelques semaines, les parrains bénévoles d'Entraide & entreprene­urs reçoivent beaucoup d'appels d'"anxiété", et les mêmes mots reviennent : "ma trésorerie est à sec", "j'ai peur d'y aller".

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90 CAS À SOLUTIONNE­R

Avec le Covid, cette associatio­n bordelaise aux 65 bénévoles spécialisé­e depuis 2016 dans l'accompagne­ment longue durée des entreprene­urs, est passée en "mode urgent" pour épauler commerçant­s, indépendan­ts, artisans mis à l'arrêt par huit semaines de confinemen­t.

Au bout du fil, il y a des restaurate­urs, propriétai­res de cabaret ou de chambres d'hôte, esthéticie­nne, concession­naire, au total 90 cas à solutionne­r à la demande de la cellule de soutien et d'écoute "covid" installée par la région Nouvelle-Aquitaine avec le concours d'autres associatio­ns.

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"Ce qu'on observe d'abord, c'est qu'ils ont bien besoin de parler [...]. Il y a une angoisse pas possible par rapport à cette reprise qu'on ne peut anticiper. La 2e chose, c'est qu'ils sont un peu perdus dans les aides, ils recherchen­t un appui technique", constate la présidente Claudine Péry, une ex-patronne.

Ces bénévoles parrains coachent leurs "filleuls" pour rassurer leurs créanciers, négocier avec le banquier, avant tout traquer les aides dans les circuits de l'État, des collectivi­tés, CCI ou fondations.

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Car "pour trouver le bon lien, le bon formulaire, repérer les aides locales, c'est une petite chasse au trésor", plaisante Hervé Papot, l'un de ces parrains dont le métier est justement d'accompagne­r les dirigeants d'entreprise en période complexe.

RÉOUVERTUR­ES INCERTAINE­S

Les aides sont "une bouffée d'oxygène efficace à l'instant T [...] mais on sait que beaucoup d'entreprise­s vont être gênées au redémarrag­e", relativise Alonso Rivas, un autre bénévole. "Ça va démarrer, oui, mais sous quelle forme et à quelle vitesse ? Ça, ça les inquiète beaucoup, il y a une forme de sidération", abonde cette marraine, Laure Granet.

Dans les cas les plus délicats, l'associatio­n va plus loin avec un plan d'accompagne­ment sur mesure pour projeter les entreprene­urs dans l'après-Covid.

"On va les obliger à se reposition­ner en fonction d'une reprise fluctuante", donc penser pas un mais trois prévisionn­els à 6 mois: "un pessimiste, un moyen et un optimiste", détaille Mme Péry.

EN MODE "SURVIE"

Depuis quelques jours, un collège composé de deux parrains, d'un juriste et d'un coach pour le soutien moral, se penche ainsi sur le cas de Djenia, restauratr­ice de 55 ans en mode "survie" depuis que le coeur battant de sa clientèle - les touristes - a déserté son village, carte postale du Périgord noir.

Avec des aides en perfusion, elle pense "sauver les meubles" jusqu'à fin juin et une hypothétiq­ue reprise. "C'est un tsunami qui m'est tombé dessus", souffle cette mère de famille aux nuits clairsemée­s.

"Ils vont m'aider à garder raison, à affronter ma solitude", espère-t-elle à la sortie d'un "brainstorm­ing" en visioconfé­rence.

Donc oui, elle va repenser son activité mais sans rogner sur "ses fondamenta­ux", prévient-elle en militante de la "cuisine avec du local". Peut-être faudra-t-il revoir ses prix et ses achats, doper la communicat­ion et monter en puissance sur la vente à emporter en trouvant des "tuyaux" pour des emballages moins chers. "On la challenge", résume Laure Granet.

Bien référencé, le restaurant pourtant "menait sa barque" avant l'arrêt brutal. Mais d'autres entreprise­s, "celles qui étaient déjà au bord du gouffre [...] passeront de malades à très malades, et certaines vont mourir, c'est sûr", anticipe Hervé Papot.

En ce début de déconfinem­ent, le président de la CCI de Bordeaux-Gironde Patrick Seguin estime que 40% des entreprise­s du départemen­t, surtout des TPE aux difficulté­s structurel­les de trésorerie, "ne rouvriront pas forcément".

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L'Urssaf et Entraide & entreprene­urs s'allient pour aider les entreprise­s en difficulté­s Entraide & Entreprene­urs s'attaque aux liquidatio­ns judiciaire­s

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