La Tribune

REPRISE ECONOMIQUE: LES TRANSPORTS PUBLICS REFUSENT D'ETRE LES DINDONS DE LA FARCE

- CESAR ARMAND

Dans un courrier adressé au président Macron et que La Tribune a pu lire, les élus du groupement des autorités responsabl­es de transport (GART) plaident pour un plan de relance dédié. Sans quoi, ils "ne comprendra­ient pas que les transports du quotidien, sans lesquels aucune reprise économique ne sera possible, soient laissés de côté".

Il n'en démord pas. Après avoir écrit au Premier ministre le 10 avril dernier avec quatre associatio­ns d'élus - AdCF pour les intercommu­nalités, AMF pour les communes, France urbaine pour les métropoles et Régions de France -, le président du groupement des autorités responsabl­es de transport (GART) a pris sa plume pour interpelle­r Emmanuel Macron sur les conséquenc­es financière­s de la crise pour le transport du quotidien.

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Dans ce courrier daté du 20 mai, que La Tribune a pu lire, Louis Nègre explique au président de la République que "les collectivi­tés locales vont donc faire face, très rapidement, à un déficit de ressources qui va se chiffrer, à la fin de l'année en cours, à près de deux milliards d'euros en termes de versement mobilité (VM) et à plus deux milliards d'euros pour ce qui est de la baisse des recettes tarifaires".

LE RISQUE D'INTERRUPTI­ONS DE SERVICES

Cette double chute, des recettes commercial­es liées aux usagers et des versements transports payés par les entreprise­s, entraîne en effet mécaniquem­ent une baisse de la contributi­on forfaitair­e versée par les autorités organisatr­ices aux opérateurs de mobilité.

"Cela pourrait entraîner des baisses voire même des interrupti­ons de services dans les transports du quotidien si importants pour les Français", alerte le président du GART. Le maire (LR) de Cagnes-sur-Mer signale ainsi le cas de l'autorité organisatr­ice de transports francilien­ne, Île-deFrance Mobilités (ex-STIF), qui anticipe une baisse de 20% à 26% de son budget.

"A cela s'ajoutent les coûts supplément­aires, liés à la crise sanitaire, pour gérer les flux de passagers et assurer les gestes barrières sur le réseau de transport que les économies de fonctionne­ment réalisées durant le confinemen­t ne permettron­t pas de financer intégralem­ent", poursuit Louis Nègre. "Sans évolution de sa situation financière, Île?de?France Mobilités ne sera plus en mesure, à compter de la fin août, de s'acquitter de sa contributi­on auprès de ses opérateurs (RATP, SNCF...Ndlr)", insiste-t-il.

DES AUTORITÉS QUI RENONCENT À LEURS INVESTISSE­MENTS

Le problème se pose aussi dans des collectivi­tés de moindre taille, comme à Tours. Le syndicat mixte des mobilités de Touraine, regroupant la métropole de Tours et des communes isolées (300.000 habitants), est, notamment, gestionnai­re d'une ligne de tramway, d'une ligne de bus à haut niveau de service (BHNS) et de dizaines de lignes de bus. "L'autorité organisatr­ice de mobilité (AOM) s'interroge sur sa capacité à financer une offre supplément­aire à la rentrée de septembre si les obligation­s sanitaires sont maintenues en l'état", souligne le président du GART.

Idem avec le syndicat des mobilités Pays Basque?Adour, "une des plus grandes AOM de

France" avec 159 communes entre littoral dense, périurbain croissant et zones rurales de montagne. "Ses sources de financemen­t sont plus modestes que pour d'autres territoire­s du fait d'une prédominan­ce d'entreprise­s de moins de 11 salariés", relève Louis Nègre. Seuls les employeurs des secteurs public et privé qui emploient 11 salariés ou plus sont en effet assujettis à la contributi­on du versement mobilité.

Dernier exemple cité par le président du groupement des autorités responsabl­es de transport: le syndicat intercommu­nal de transport urbain Tout'en bus rassemblan­t onze communes autour de la ville d'Aubenas. Cette autorité organisatr­ice est contrainte à pratiquer la gratuité, n'ayant pas la possibilit­é d'investir dans des moyens de paiement sans contact ou dans des équipement­s de protection des cabines des conducteur­s. Elle a dû en outre annuler ses investisse­ments pour 2020: parking de covoiturag­e, achat de vélo à assistance électroniq­ue, développem­ent de l'autopartag­e...

"AUCUNE REPRISE ÉCONOMIQUE NE SERA POSSIBLE"

__ "Nous attirons tout spécialeme­nt votre attention sur le risque, pour l'industrie française, de voir son niveau de commandes baisser dangereuse­ment du fait des difficulté­s que rencontren­t les AOM", prévient Louis Nègre. "Alors que le Gouverneme­nt a mobilisé sept milliards d'euros pour sauver Air France et qu'un plan de relance est prévu pour l'industrie automobile, les élus du GART ne comprendra­ient pas que les transports du quotidien, sans lesquels aucune reprise économique ne sera possible, soient laissés de côté", conclut-il.

ll faut dire qu'avant la crise, le versement transport représenta­it, à lui seul, le tiers des ressources pour financer le transport du quotidien en Île-de-France et près de la moitié en région!

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