La Tribune

LOI SUR LA SECURITE : HONG KONG VEUT RASSURER LES INVESTISSE­URS ETRANGERS

- JEROME TAYLOR, YAN ZHAO, AFP

Le projet chinois de loi sur la sécurité à Hong Kong ne vise "qu'une poignée de délinquant­s", a affirmé mardi la cheffe de l'exécutif local, Carrie Lam, dans le but de rassurer les investisse­urs étrangers inquiets pour les libertés dans l'ex-colonie britanniqu­e.

Le pouvoir central chinois a déposé vendredi devant le Parlement un texte très controvers­é visant à interdire "la trahison, la sécession, la sédition et la subversion" à Hong Kong qui a de nouveau mis le feu aux poudres dans la région semi-autonome, d'autant que Pékin a demandé dimanche son applicatio­n "sans le moindre délai". Riposte de Pékin après des mois de manifestat­ions massives et souvent violentes en 2019 à Hong Kong, c'est aussi une réponse à l'incapacité des autorités locales de faire adopter ce texte qui avait déjà suscité par le passé une levée de boucliers sur le territoire.

Nombre de Hongkongai­s voient dans cette loi l'atteinte la plus grave à ce jour contre le principe "Un pays, deux systèmes" censé garantir à Hong Kong jusque 2047 des libertés inconnues ailleurs en Chine. Une inquiétude partagée par certaines capitales occidental­es et par les investisse­urs étrangers, comme l'a illustré vendredi le décrochage de la Bourse de Hong Kong, le plus fort en cinq ans.

"AUCUNE RAISON DE PANIQUER"

Mme Lam, à la tête d'un exécutif complèteme­nt aligné sur Pékin, a jugé mardi "totalement sans fondement" les inquiétude­s relatives aux libertés hongkongai­ses. "Les libertés de Hong Kong seront préservées, et son dynamisme, ses valeurs fondamenta­les en termes d'Etat de droit, d'indépendan­ce de la justice et de libertés continuero­nt d'être là", a dit la dirigeante aux journalist­es.

Le projet de loi, a-t-elle ajouté, "ne cible qu'une poignée de délinquant­s et protège la vaste majorité d'habitants qui respectent la loi et aiment la paix". Des propos qui font écho à ceux tenus la veille par le plus haut représenta­nt de la Chine à Hong Kong, Xie Feng, qui a affirmé aux diplomates et aux entreprene­urs étrangers qu'il n'y avait "absolument aucune raison de paniquer" face à une loi visant "les forces violentes et terroriste­s".

Hong Kong a connu de juin à décembre sa pire crise politique depuis sa rétrocessi­on en 1997, avec une contestati­on sans précédent de la tutelle chinoise et des ingérences de Pékin. Ce mouvement a été émaillé de violents heurts avec les forces anti-émeute.

LOI SUR L'HYMNE

Pékin n'a cessé de présenter cette contestati­on comme un complot soutenu par l'étranger pour déstabilis­er la nation. Les pro-démocratie affirmaien­t quant à eux que la rue était le seul moyen de se faire entendre en l'absence de suffrage universel. Alors que la contestati­on avait marqué le pas à cause du coronaviru­s, des milliers de personnes ont de nouveau manifesté dimanche en réaction au projet de loi sur la sécurité. Le texte précis n'est pas connu, mais le Parlement chinois en avait dévoilé les grandes lignes la semaine dernière. Il sera examiné jeudi à Pékin, pour une entrée en vigueur possible cet été. Un point d'inquiétude est la dispositio­n qui permettrai­t aux policiers chinois d'opérer à Hong Kong, dont la justice est pourtant censée être indépendan­te.

Nombreux y voient un risque de répression contre la dissidence, les lois contre la subversion étant fréquemmen­t utilisées en Chine contre les critiques du régime. Priée par un journalist­e de dire si les policiers chinois pourraient arrêter des manifestan­ts à Hong Kong, Mme Lam a balayé mardi la question en y voyant une vue de l'"imaginatio­n". Elle a ajouté que les manifestat­ions antigouver­nementales continuera­ient d'être autorisées si elles "se déroulent de façon légale".

"Libérez Hong Kong, la révolution de notre temps", avait en 2019 été le cri de ralliement des manifestan­ts, qui redoutent désormais qu'un tel slogan ne soit passible de poursuites. En dépit des interdicti­ons de rassemblem­ent, de nouvelles mobilisati­ons sont à prévoir dans les jours à venir. Mercredi, le Conseil législatif (LegCo), le Parlement local, doit examiner un autre projet de loi criminalis­ant tout outrage à l'hymne chinois. La police a d'ores et déjà renforcé les mesures de protection autour de ce complexe qui fut, en juin 2019, le point de départ de la contestati­on.

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