La Tribune

POUR PHILIPPE ETCHEBEST, 40% DES RESTAURANT­S FERMERONT "SI RIEN NE BOUGE"

- LATRIBUNE.FR (AVEC AFP)

Le déconfinem­ent mardi des restaurant­s "n'est pas synonyme de fin de crise" : le médiatique chef bordelais Philippe Etchebest estime que 40% des restaurant­s fermeront "si rien ne bouge" et réclame comme nombre de ses collègues, un fonds de solidarité pour sa profession éreintée par le COVID-19.

"Grande cuisine", terrasse spacieuse, employés masqués : le chef vedette de la TV est prêt à rouvrir mardi son restaurant "Le 4e mur", dans l'hypercentr­e chic de Bordeaux, avec un protocole sanitaire strict. Celui-ci prévoit un "référent Covid" chargé de "pister tout le monde", même les clients, qui devront porter le masque jusqu'à être attablés ou pour aller aux toilettes.

"Pour moi, tous les voyants sont au vert", mais combien n'auront pas cette "chance" ?, s'interroge-t-il vendredi lors d'un entretien avec l'AFP.

"Il y en a énormément qui ne pourront pas reprendre car avec la distance d'un mètre, de 30 couverts dans une petite salle, ils vont peut-être passer à 10. Et donc le seuil de rentabilit­é ne sera pas atteint", estime le chef, connu pour ses formules chocs dans son émission "Cauchemar en cuisine" sur M6.

Membre du Collectif des restaurate­urs du Sud-Ouest, un groupe de réflexion de profession­nels avec notamment le patron de la chaîne Bistrot Régent, Marc Vanhove, l'entreprene­ur milite depuis le confinemen­t pour la création d'un fonds de solidarité abondé par l'Etat, les assureurs et la profession elle-même.

Objectif : "limiter la casse" dans les quelque 220.000 bars et restaurant­s français - soit deux millions d'emplois directs et indirects, selon lui. En vain : "On a le sentiment de ne pas être pris au sérieux", regrette-t-il.

"La réouvertur­e n'est pas synonyme de fin de crise, il faut absolument que l'Etat nous aide (...) Une fois de plus, si rien ne bouge d'ici la fin de l'année, il y aura 40% de fermetures de restaurant­s", prédit le chef étoilé.

"Vous pouvez vous séparer de vos effectifs avec le chômage partiel (...) mais il y a une chose qui reste : ce sont les frais fixes sur lesquels on se bat depuis des semaines et des semaines. Il faut trouver un moyen pour que ces frais soient couverts", explique-t-il.

"SAUVER TOUT LE MONDE"

Les membres du collectif, à l'instar du président de la CCI de Gironde Patrick Seguin, considèren­t aujourd'hui les négociatio­ns entre restaurate­urs et assureurs comme "un combat perdu".

"On a abandonné de faire plier les assureurs pour la prise en charge d'un tiers de la perte d'exploitati­on, car ils nous ont promenés pendant des semaines et des semaines", a regretté M. Seguin. "Le gouverneme­nt a menacé de légiférer, mais n'a pas été plus loin".

"Ce que ne donnent pas l'Etat et les assurances maintenant, ça va coûter beaucoup plus cher après, car on comptera le nombre de faillites (...) et le chômage de masse qui va arriver", renchérit M. Etchebest. "C'est maintenant que les restaurant­s ont besoin d'aide, c'est maintenant qu'ils sont en train de crever".

Le collectif regrette l'effet illusoire de la victoire du restaurate­ur Stéphane Manigold contre Axa. "Tout le monde veut s'engouffrer dans la brêche", note Philippe Etchebest, mais seule une minorité de la profession est assurée pour la perte d'exploitati­on en cas de fermeture administra­tive, comme l'était le restaurate­ur parisien.

Or, étant donné le temps des procédures d'appel - jusqu'à 4-5 ans - même si les assureurs étaient in fine obligés de payer, "il ne resterait à ce moment-là plus beaucoup de restaurant­s", note M. Seguin.

"D'une manière ou d'une autre, il va falloir un dispositif - jouer sur la TVA, les charges sociales, ou la perte d'exploitati­on - qui permette de sauver tout le monde, de la crêperie jusqu'au 5 étoiles", conclut le président de l'UMIH-Gironde (Union des Métiers et des Industries de l'Hôtellerie) Laurent Tournier, qui regrette que son syndicat soit, au niveau national, partisan "d'une attaque frontale" des assureurs.

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