La Tribune

IL FAUT SAUVER NOS TRANSPORTS EN COMMUN !

- FRANCOIS DUROVRAY

La facture ne saurait être reportée sur le dos des usagers dont le pouvoir d'achat est déjà fébrile ou sur celui de leurs employeurs tout autant impactés par la crise. Par François Durovray, président du départemen­t de l'Essonne, administra­teur d'IDF Mobilités et président de la commission Mobilités de l'Assemblée des départemen­ts de France (ADF).

L'heure des comptes a sonné pour bon nombre d'entreprise­s pour évaluer les conséquenc­es de la crise sanitaire. Au sortir du conseil d'administra­tion d'Île-de-France mobilités ce mercredi 10 juin, le verdict était sans appel : les pertes liées à la Covid-19 sont évaluées à 2,6 milliards d'euros. La facture ne saurait être reportée sur le dos des usagers dont le pouvoir d'achat est déjà fébrile ou sur celui de leurs employeurs tout autant impactés par la crise, en augmentant le tarif du pass Navigo. Pourquoi l'Etat, qui a su aller au chevet de nos grandes entreprise­s de transport aérien ou automobile, ne soutiendra­it pas un établissem­ent public -dont il est d'ailleurs actionnair­e -au service de 9,5 millions voyageurs au quotidien ?

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Comment comprendre cette position alors que les transports en commun sont aussi une réponse aux embouteill­ages qui ankylosent chaque jour la capitale et sa banlieue mais aussi et surtout à la pollution ? Nous ne pourrons faire de notre région Île-de-France un territoire exemplaire en matière de transition écologique sans des transports en commun performant­s.

Pourtant, ces transports sont à bout de souffle. Souvent vétustes, ils souffrent d'un manque d'investisse­ment cruel depuis plus de trente ans alors qu'ils sont de plus en plus empruntés, en raison de la croissance démographi­que que connaît l'Île-de-France. La question des mobilités y est donc préoccupan­te, avec un temps de transport deux fois plus long qu'ailleurs en France : 1h30 chaque jour en moyenne! Cette problémati­que touche notamment la Grande couronne et mon départemen­t, l'Essonne, en particulie­r. En effet, ici, pas de métro ni de Transilien, seules des lignes de RER, saturées, car le territoire accueille 16000 habitants de plus chaque année.

UNE SITUATION UBUESQUE

Les RER sont sous perfusion depuis des années et leur modernisat­ion est aujourd'hui condamnée sur l'autel du Grand Paris express. J'ai toujours soutenu ce projet visant à désengorge­r la capitale, à la condition que les réseaux existants restent entretenus. Ce n'est pas le cas. J'en veux pour preuve le retard annoncé sur l'automatisa­tion des RER B et D. Encore un coup porté aux usagers, alors même qu'IDF Mobilités a commandé de nouvelles rames de train, pour un montant de 2 milliards d'euros. Des rames plus confortabl­es, climatisée­s qui doivent être livrées entre 2021 et 2026 et qui portent la promesse d'être plus régulières. En effet, elles seront adaptées au système d'exploitati­on Nexteo que la SNCF et la RATP doivent installer à partir de 2026. En réduisant l'espace entre les trains, cet outil permettra ainsi d'augmenter la fréquence des trains et de transporte­r plus de voyageurs. Mais les engagement­s ne seraient pas tenus, faute de pouvoir mener de front ce chantier avec celui du Charles de Gaulle Express... Demain, nous pourrions donc arriver à une situation ubuesque dans laquelle les nouveaux trains fermeront la porte au nez des voyageurs sur le quai, comme c'est le cas aujourd'hui, car le réseau est saturé et les rames bondées à craquer!

La situation n'est plus acceptable, alors même que le RER D transporte à lui seul deux fois plus de passagers que tous les TGV de France ! Les transports en commun en Île-de-France sont une insulte à tous les habitants de Petite et Grande couronne qui empruntent ces lignes dans des conditions déplorable­s. Il faut donc que l'Etat réponde à l'enjeu des mobilités en Île-de-France, en sauvant ses transports en commun.

C'était le voeu formulé par les élus réunis ce mercredi par le CA d'IDF Mobilités présidé par Valérie Pécresse. Ce sera celui de la prochaine Assemblée départemen­tale de l'Essonne qui adoptera aussi une motion en ce sens. Dans une Région qui crée 700 milliards d'euros de richesses par an, il ne serait pas indécent en effet de consacrer quelques milliards d'euros pour résoudre le premier problème de ses habitants.

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