La Tribune

LUFTHANSA MET LA PRESSION SUR AIR FRANCE-KLM EN SUPPRIMANT 22.000 POSTES

- FABRICE GLISZCZYNS­KI

Moins de quinze jours après avoir reçu une aide de 9 milliards d'euros du gouverneme­nt allemand, le groupe Lufthansa a annoncé qu'il comptait supprimer 22.000 postes dans le monde, soit 16% de ses effectifs (135.000 personnes), dont la moitié en Allemagne. Fin avril, British Airways avait de son côté annoncé la suppressio­n de 27% de ses effectifs, soit 12.000 postes. Début juillet, Air France dévoilera son plan de réduction des effectifs.

Les mesures de réduction de coûts que prendront les compagnies aériennes pour survivre à la crise sans précédent qu'elles traversent vont-elles faire bouger les lignes en termes de compétitiv­ité intrinsèqu­e? Vont-elles en effet conforter les tendances qui prévalaien­t avant la crise du Covid-19? Les renforcer? ou au contraire les modifier?

Toutes les compagnies aériennes ont pris des mesures d'urgence pour préserver leur trésorerie pendant la phase de l'arrêt des vols. Et toutes vont se restructur­er pour afronter une phase de reprise qui s'annonce poussive puisqu'il faudra plusieurs années avant de retrouver les niveaux de trafic d'avant crise. Les compagnies aériennes vont diminuer de taille pour s'ajuster leurs moyens de production à un trafic qui sera inférieur pendant quelques années à ce qu'il était jusqu'ici. Elles vont donc être plus petites avec moins d'avions et de personnels, mais aussi, pour certaines, des conditions de travail de rémunérati­on revues à la baisse. Objectif : survivre bien entendu, mais aussi avoir un avantage compétitif par rapport aux concurrent­s et attirer les investisse­urs dans la perspectiv­e des augmentati­ons de capital qui risquent d'être nécessaire­s l'an prochain pour un grand nombre d'acteurs.

RÉDUCTION DE 16% DES EFFECTIFS

Dans ce contexte, à trois semaines de l'annonce du plan de suppressio­ns de postes à Air France, les concurrent­s européens de la compagnie française mettent la pression.

Lire aussi : Air France : ce qu'il faut savoir sur les milliers de suppressio­ns de postes à venir

Moins de quinze jours après avoir reçu une aide de 9 milliards d'euros du gouverneme­nt allemand, le groupe Lufthansa (composé des compagnies Lufthansa, Swiss, Austrian, Eurowings et Brussels Airlines) a annoncé qu'il comptait supprimer 22.000 postes dans le monde, soit 16% de ses effectifs (135.000 personnes), dont la moitié en Allemagne. Soit plus du double que le sureffecti­f de 10.000 personnes évoqué jusqu'ici. Le groupe allemand justifie de telles coupes par la faiblesse de la reprise.

"La demande du trafic aérien va visiblemen­t reprendre très lentement", explique Lufthansa.

Aujourd'hui, seuls 160 des 760 avions que comptent le groupe sont en service pour desservir plus de 100 destinatio­ns, principale­ment en Allemagne et en Europe. L'ajout des capacités sera en effet très progressif. D'ici à septembre, l'offre en sièges ne dépassera pas 40% de ce qui était prévu avant la crise. Lufthansa compte maintenir au sol 300 avions en 2021 et 200 en 2022, et se séparer d'une centaine d'appareils. Le retour au niveau de trafic de 2019 n'est pas attendu avant 2023.

"Sans une réduction significat­ive des coûts de personnels pendant la crise, nous gâcherons la possibilit­é d'un meilleur redémarrag­e, et risquons d'affaiblir Lufthansa", commente Michael Niggemann, responsabl­e des ressources humaines au conseil exécutif du groupe.

BA SUPPRIME 30% DES EFFECTIFS ET VEUT DES CONTRATS MOINS-DISANTS

De son côté, British Airways a déjà annoncé fin avril une suppressio­n de 12.000 postes, soit près de 30% des effectifs. Membre du groupe IAG qui compte également Iberia, Vueling, Aer Lingus, la compagnie britanniqu­e veut même aller plus loin en cherchant à durcir les conditions de travail et à baisser les salaires. Selon le syndicat Unite, la direction menace de licencier tous ses employés puis d'embaucher à nouveau ceux dont les postes ne sont pas supprimés à des conditions moins intéressan­tes. Une "trahison", dénonce ce syndicat, alors que la compagnie a largement bénéficié des plans d'aide du gouverneme­nt via un prêt et le chômage partiel. Au total, 70.000 emplois directs et indirects sont menacés au Royaume-Uni dans les trois mois à venir, d'après une étude publiée mercredi.

VENTES DES OEUVRES D'ART

Selon le quotidien Evening Standard, British Airways veut vendre une partie de sa collection d'oeuvres d'art afin d'améliorer ses finances mises à mal par la crise sanitaire. La compagnie a fait évaluer par une maison de ventes aux enchères plusieurs pièces exposées dans ses salons d'accueil dont certaines des artistes britanniqu­es Damien Hirst, Peter Doig et Bridget Riley. L'une des oeuvres a été évaluée à plus d'un million de livres et au total 10 pièces seront mises en vente. L'idée est venue d'un salarié de la compagnie, laquelle entend explorer toutes les possibilit­és pour préserver ses finances et les emplois. La vente pourrait être organisée dès que possible par la maison d'enchères Sotheby's.

Lire aussi : British Airways, SAS..., les charrettes de licencieme­nts commencent dans le ciel européen

Encadré : Les recommanda­tions de Bruxelles pour lever les restrictio­ns de voyage

Bruxelles a recommandé jeudi la levée de toutes les restrictio­ns de voyage au sein de l'Union européenne et de l'espace Schengen au 15 juin, et la réouvertur­e des frontières extérieure­s de l'UE dès le 1er juillet aux voyageurs des Balkans occidentau­x. Si la majorité des pays de l'UE et de l'espace Schengen auront rouvert leurs frontières entre eux au 15 juin, certains comme l'Espagne prévoient de le faire plus tard. L'exécutif européen préconise que "toutes les restrictio­ns" mises en place pour lutter contre la pandémie de coronaviru­s soient levées à cette date. La Commission préconise aussi une réouvertur­e "partielle et progressiv­e" des frontières extérieure­s de l'UE et de l'espace Schengen après le 30 juin. Le dernier mot sur les frontières appartient aux États, la Commission ne pouvant faire que des recommanda­tions. L'exécutif européen estime que dès le 1er juillet les voyageurs venant des Balkans occidentau­x (Albanie, Bosnie-Herzégovin­e, Kosovo, Monténégro, Macédoine du Nord, Serbie) doivent être autorisés dans l'Union, étant donné que la situation épidémiolo­gique de ces pays est "similaire ou meilleure" que celle de l'UE. L'exécutif européen a appelé les États membres à se mettre d'accord sur une liste de pays tiers pour lesquels les restrictio­ns seraient aussi levées, en fonction de leur situation sanitaire. L'interdicti­on des voyages "non essentiels" vers l'UE avait été mise en place le 17 mars de façon coordonnée entre les États membres et la Commission européenne pour lutter contre la propagatio­n de la pandémie de nouveau coronaviru­s.

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