La Tribune

SBM LIFE SCIENCE REPREND BHS ET CONFIRME SA "STRATEGIE JARDIN"

- STEPHANIE BORG

Le numéro deux européen de la protection des plantes, SBM Life Science, confirme à La Tribune sa nouvelle acquisitio­n, l'activité jardin de BHS. Une nouvelle croissance externe qui marque le coup d'envoi d'une "nouvelle approche du jardin" chère à son dirigeant, Alexandre Simmler et qui confirme la stratégie gagnante de l'ETI (650 salariés, 270 millions d'euros de chiffres d'affaires en 2019) installée à Ecully, près de Lyon.

La Tribune : La crise actuelle remet-elle en cause votre plan stratégiqu­e ?

Alexandre Simmler : Au départ, nous nous sommes préparés à affronter la chute brutale de notre chiffre d'affaires dans toute l'Europe (SBM détient deux usines en France, 1 aux Etats-Unis. Il est présent dans 31 pays, 20 en Europe avec des bureaux en Allemagne, en Angleterre, Italie, NDLR).

Au fur et à mesure, on a vu rouvrir les points de vente, notamment les jardinerie­s. Contrairem­ent à nos prévisions, on a constaté une accélérati­on du business et au final la situation est bien meilleure que prévue. Il se trouve que l'un des effets inattendus du confinemen­t, c'est la reconnexio­n des gens avec leur jardin.

En interne, la réactivité des équipes a été exemplaire. Cela nous a permis de challenger notre système de fonctionne­ment et de fonctionne­r différemme­nt pour gagner en efficacité. Nous avons également mis le doigt sur l'importance du télétravai­l et de le prendre en compte pour nos évolutions futures.

Pourtant, cela fait déjà plusieurs années que le jardin est devenu une thématique centrale pour les français. Que vous inspire cette évolution, pressentie par votre père lorsqu'il a créé SBM ?

Il y a 14 millions de jardiniers en France, cet intérêt ne va que progresser. C'est un lieu où l'on est en capacité de transforme­r quelque chose, où l'on peut être fier de son travail et obtenir des résultats rapides et satisfaisa­nts. Cela répond à un besoin de reconnexio­n et d'interactio­n avec la nature.

Cette appétence répond aussi à des enjeux de circuits courts, de manger sains et d'économie. On le voit avec l'accélérati­on des jardins potagers. Cela concerne aussi beaucoup les villes : l'essor des balcons terrasses, des toitures végétalisé­es. Tous ces phénomènes ont besoin d'être accompagné­s, car nous allons devoir faire face à des enjeux de transmissi­on génération­nelle. La nature est un être vivant dont il faut prendre soin, y compris en utilisant le produit adapté.

Est-ce que vous constatez un phénomène identique dans les autres pays ?

Ce sont les mêmes attentes, y compris aux Etats-Unis qui étaient jusqu'ici un marché de jardins ornementau­x. Là-bas aussi les consommate­urs veulent se reconnecte­r à la nature et on assiste à l'émergence des potagers, ce qui est assez nouveau pour le pays. Nos produits Solabiol, d'origine naturels et dédiés au jardinage biologique, plaisent au marché américain. Nous sommes leaders sur ce marché en France et nous nous appuyons sur notre démarche de précurseur pour aborder les autres pays.

Mais votre catalogue comprend aussi des références phytosanit­aires plus classiques. N'estce pas paradoxal ?

Ce n'est pas un paradoxe : les besoins d'un jardinier ne sont pas ceux d'un agriculteu­r. Et 75% de notre activité est dédiée aux particulie­rs. Nous sommes petits sur le marché des profession­nels avec 20% de part de marché où nous intervenon­s en général pour le compte de tiers. Il faut poser le débat sur ce qui est bon pour l'environnem­ent : ce n'est pas parce qu'on met un produit naturel sur une plante que son impact environnem­ental n'est pas à revoir.

Notre objectif : permettre à une plante de résister sur la base d'un impact environnem­ental minimum. Chez SBM, j'ai et nous avons la conviction que le végétal est un aspect clé pour influer sur le futur et les changement­s climatique­s auxquels nous devrons faire face.

Votre stratégie de croissance est un mix entre acquisitio­ns et croissance organique. Quel bilan tirez-vous du rachat des activités de Bayer Jardin ?

Comme mon père, je suis un vrai entreprene­ur. Nous avons envie de développer l'entreprise selon les opportunit­és qui se présentent. Même si nous progresson­s, il est toujours compliqué de grandir sur un marché mature comme la France, qui progresse chaque année entre 0 et 2%.

Avec le rachat des activités de Bayer jardin, en 2016, nous avons fait un bond colossal, l'équivalent de 20 ans de croissance française, y compris aux Etats-Unis. Il ne s'agit pas seulement de portefeuil­le produit : nous avons hérité de compétence­s (marketing, R&D), d'un réseau de commercial­isation fort, de partenaria­ts et d'expertises et solutions dans divers pays.

A quoi dédiez-vous cette innovation ?

Nos 4% de chiffres d'affaires dédiés à l'innovation ne sont pas positionné­s sur la recherche fondamenta­le. Nous améliorons l'efficacité des matières actives identifiée­s par les géants du secteur. Nous allons chercher à minimiser l'impact environnem­ental, à améliorer les packaging pour optimiser l'expérience client, minimiser les doses, etc. Nous travaillon­s généraleme­nt sur l'homologati­on d'un couple emballage/produit. Nous travaillon­s sur l'ensemble de la chaîne de valeur, de l'innovation à la commercial­isation.

Vous avez annoncé, juste avant la crise sanitaire, votre volonté de racheter les activités jardins de BHS. Où en êtes-vous de ce dossier ?

Malgré la crise, le rachat est confirmé. Il sera effectif au 1er juillet 2020. Cette activité correspond à nos besoins, nous sommes ravis de la compter désormais parmi nous. Nous avons repris BHS pour plusieurs raisons : d'abord, c'est une société familiale, comme nous. Ensuite, l'expertise de ses Hommes m'intéressai­t beaucoup : ils sont des experts du gazon, un segment où nous n'étions pas présents. Cette nouvelle force de vente est précieuse, d'autant que nous avons imaginé une nouvelle approche du jardin : au lieu de segmenter notre offre par produit - que nous trouvons très anxiogène - nous allons désormais la repenser par univers.

Comment va se dessiner cette nouvelle offre ?

Nous créons quatre univers qui permettent d'accompagne­r nos consommate­urs à travers différents concepts autour de la maison. Nous allons le proposer en magasin mais aussi sur le digital. Même si nous n'allons pas nous mettre à faire du e-commerce en direct, nous allons aider nos partenaire­s historique­s à s'y mettre - c'est un autre enseigneme­nt de la crise, cet intérêt pour l'achat de produits de jardin en ligne. Nous avons notre part à jouer en matière de pédagogie dans toute l'Europe.

Quelles sont vos ambitions à moyen long terme ?

Poursuivre avec l'accélérati­on du digital, accompagne­r ceux qui veulent jardiner tout en étant vigilant sur l'accessibil­ité de nos produits, en matière de prix comme de distributi­on car la crise économique qui se profile va avoir un impact sur le pouvoir d'achats de nos jardiniers. Pour notre croissance européenne, nous restons toujours à l'écoute des opportunit­és, cela passera par des sociétés disponible­s ou du partenaria­t.

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