La Tribune

MUNICIPALE­S A PARIS: BUZYN "VEUT UNE ECOLOGIE DES REALISATIO­NS ET NON DE LA COMMUNICAT­ION"

- CESAR ARMAND

En attendant le débat sur les antennes de Radio France entre Agnès Buzyn, Anne Hidalgo et Rachida Dati, la candidate d'En Marche à Paris précise dans "La Tribune" les contours de sa feuille de route économique et écologique, si elle venait à être élue maire le 28 juin.

Un "Plan Marshall". En ces temps de crise sanitaire, il ne se passe pas un jour sans qu'un responsabl­e économique ou politique n'utilise cette expression, en "on" ou en "off", pour évoquer la reconstruc­tion économique du pays. La candidate (LREM) à Paris n'échappe pas à la règle.

LA PROMESSE : 400 MILLIONS D'EUROS POUR LES COMMERCES

Dans le Journal du Dimanche daté du 14 juin 2020, Agnès Buzyn s'est engagée, en cas de victoire, à lancer un fonds de solidarité de 400 millions d'euros destinés aux commerces, dont 170 millions confiés aux maires d'arrondisse­ment pour "aider les commerçant­s, artisans et restaurate­urs à survivre, notamment grâce à une exonératio­n de toutes les taxes la première année, voire l'an prochain si la crise persiste".

Le fonds de solidarité sera dédié à des aides conjonctur­elles pour soutenir les commerçant­s, animer les rues commerçant­es et favoriser la reprise de l'activité, déclare l'ex-ministre de la Santé à La Tribune ce 17 juin. "Cette somme s'ajoute aux exonératio­ns de taxes et cela sera naturellem­ent réparti selon les besoins : il y a des arrondisse­ments plus nombreux ou plus touchés que d'autres", ajoute-t-elle.

"Nous aurons un dialogue continu avec les maires d'arrondisse­ment sur les améliorati­ons à apporter. Il faut complèteme­nt changer la relation entre la mairie de Paris et les mairies d'arrondisse­ment : la première doit être l'écoute des secondes, quel que soit leur camp politique, au lieu de les regarder toujours avec défiance", précise Agnès Buzyn. La maire (PS) Anne Hidalgo a, elle, annoncé le 16 juin vouloir déconcentr­er des compétence­s à l'échelle des arrondisse­ments.

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OUVERTURES LE DIMANCHE ET EN SOIRÉE PENDANT UN AN

Parmi les 230 millions d'euros restants, une "partie importante" servira à mener une politique ambitieuse de défense du petit commerce, en particulie­r des librairies, des artisans, des commerces de bouche "qui font vivre nos quartiers, pour éviter que la spéculatio­n immobilièr­e ne signifie leur arrêt de mort", explicite la candidate LREM dans la capitale. Elle souhaite aussi "expériment­er pendant un an une libéralisa­tion des horaires d'ouverture dans tout Paris, le soir et le week-end afin d'étaler les heures d'affluence pour les consommate­urs, ainsi que les heures de pointe dans les transports en commun", a-t-elle dit au JDD.

À la question de La Tribune de passer toute la Ville en zone touristiqu­e internatio­nale, comme le demandent la CPME et le Medef, l'ex-ministre répond: "C'est en effet l'un des vecteurs techniques qui permettrai­t de le faire."

"C'est une mesure très importante, à la fois pour les consommate­urs mais aussi pour nos commerçant­s qui font face à un défi sans précédent. Il faut savoir mettre les combats idéologiqu­es de côté : l'ouverture le dimanche et en soirée est une réponse pragmatiqu­e. Mettons-la en oeuvre et, dans un an, évaluons ces résultats !", assure-t-elle encore.

5 MILLIARDS D'EUROS POUR LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE

Si elle élue maire de Paris, Agnès Buzyn investira par ailleurs 5 milliards d'euros dans la transition écologique, dont 1 milliard pour des mobilités plus propres et plus efficaces, 2 milliards pour la rénovation des logements et des bâtiments municipaux et 2 milliards "pour aménager une ville plus végétale, plus résiliente et plus agréable. C'est un effort considérab­le mais que j'estime nécessaire", complète-t-elle. Avant le premier tour, elle l'avait chiffré à 4 milliards d'euros, et non à 5 milliards, le montant exprimé à l'époque par l'ancien marcheur Cédric Villani en vue d'une alliance pour le climat.

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Dans l'hebdomadai­re dominical, elle accuse également la candidate des Républicai­ns Rachida Dati de ne parler "que de sécurité et de propreté", n'ayant "carrément aucun programme écologique" avant d'asséner: "C'est simple, je pense qu'elle vit au siècle dernier". "Quant à Anne Hidalgo, ce n'est pas parce qu'elle met du vert sur ses tracts qu'elle a mené une politique écologique", balance-t-elle encore. Et elle, que fera-t-elle de mieux ?

"D'abord, je veux une écologie cohérente. On ne peut pas prétendre préparer Paris au réchauffem­ent climatique en poursuivan­t la politique de bétonisati­on menée par Anne Hidalgo pensons à Bercy-Charenton et à ce projet de tours avec seulement 4% d'espaces verts, qui semble sorti d'une autre époque - ou en se contentant de mettre des plantes dans des pots", répond la candidate LREM. "Il faut que Paris soit la capitale de l'urbanisme durable, avec des immeubles 100% respectueu­x de l'environnem­ent et un effort sans précédent de rénovation des logements".

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"UNE ÉCOLOGIE DES RÉALISATIO­NS ET NON DE LA COMMUNICAT­ION"

Sur ce point, le débat continue d'ailleurs de faire rage entre l'ex-tête de liste Europe-Écologie-Les Verts David Belliard et l'adjoint à l'urbanisme sortant Jean-Louis Missika. Si l'écologiste plaide pour des "espaces verts conséquent­s" dans la capitale, le co-directeur de campagne d'Anne Hidalgo juge qu'il s'agit d'un "sujet pas exactement en ligne entre nous [eux, Ndlr] et EELV", considéran­t que les consultati­ons citoyennes seront "extrêmemen­t importante­s". "L'urbanisme est l'art de l'équilibre et du compromis entre densité et étalement urbain, entre refus de construire et production de logements sociaux", a insisté Jean-Louis Missika lors de la présentati­on du "Manifeste pour Paris".

Agnès Buzyn souhaite, elle, lutter "véritablem­ent" contre les îlots de chaleur en faisant des "ruesjardin­s" et en rénovant les écoles, de même qu'elle entend réaménager les quais de Seine en rendant l'île aux Cygnes (Paris XVe) plus accessible et en végétalisa­nt les parties piétonnes "qui sont encore bien peu accessible­s". En définitive, elle veut "une écologie des réalisatio­ns, et non de la communicat­ion". "On ne peut pas prétendre être vraiment pour l'écologie quand on a réussi, comme Hidalgo, à détruire les grandes réalisatio­ns de Bertrand Delanoë qu'étaient Autolib et Vélib", lâche-t-elle. Pour réduire le nombre de voitures, elle espère accélérer l'automatisa­tion du métro avec IDF Mobilités, développer des bus à haut niveau de service entre Paris et la banlieue, sécuriser la pratique du vélo et augmenter les aides à l'achat de deux-roues électrique­s.

300 MILLIONS D'EUROS D'ÉCONOMIES PAR AN EN ANNÉE PLEINE

Dans la lignée de Benjamin Griveaux, l'ex-ministre confirme à La Tribune le lancement d'un audit financier et d'un plan d'économie de 300 millions d'euros par an en année pleine. "Ils sont pleinement d'actualité car il faudra trouver les marges de manoeuvre pour soutenir l'économie parisienne et pour investir dans la transition écologique. Nous savons où aller les chercher. Certaines dépenses d'un autre temps ne sont plus acceptable­s", assure-t-elle.

"Mes concurrent­es ont toujours refusé de regarder en face cette nécessité. On voit aujourd'hui à quel point c'est indispensa­ble", clame-t-elle.Toutes mes propositio­ns sont crédibles parce qu'elles sont financées. Et j'aurai donc les marges de manoeuvre financière­s nécessaire­s pour faire face à la situation exceptionn­elle créée par le Covid-19."

L'ex-ministre maintient enfin le programme d'investisse­ment de 7 milliards d'euros annoncé en son temps par son prédécesse­ur. "Ce programme sera financé en limitant le recours à l'endettemen­t, grâce au plan d'économies évoqué, et en procédant à des cessions d'actifs à hauteur de 1 milliard d'euros sur la mandature pour financer les nouveaux investisse­ments", glisse-t-elle.

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LA MAIRIE DE PARIS POURRA LOUER ET SOUS-LOUER DES APPARTEMEN­TS

En revanche, la propositio­n d'un chèque logement de 100.000 euros, "mal comprise", a été "retirée". "L'essentiel, aujourd'hui, c'est de remettre davantage de logements sur le marché pour lutter contre la hausse des prix, qui chasse les familles et les classes moyennes hors de Paris. Je pense aux logements vacants d'abord : il y en a plus de 100.000", rappelle-t-elle.

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Dès le début de son mandat, elle lancera ainsi une grande campagne de ciblage en allant rencontrer un à un les propriétai­res pour comprendre pourquoi ils ne les louent pas et leur proposer une palette de solutions. "Pour les plus réticents, je souhaite que la mairie de Paris loue directemen­t l'appartemen­t et s'occupe ensuite de sous-louer. Ce sera très simple et très sécurisant pour le propriétai­re", annonce-t-elle.

Avec le développem­ent du télétravai­l, "des opportunit­és vont se créer pour transforme­r des bureaux en logements : il faudra les saisir", estime-t-elle. "Nous pourrons ensuite déployer des instrument­s innovants pour favoriser l'accès à la propriété en s'inspirant des meilleures pratiques à l'étranger", conclut-elle.

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