La Tribune

EN EUROPE, LA REPRISE EN ORDRE DISPERSE MENACE LA CROISSANCE

- GREGOIRE NORMAND

L'indice PMI composite de la zone euro, qui rassemble services et industrie manufactur­ière, est remonté à 48,5 après 31,9 en mai et 47,5 en estimation "flash", se rapprochan­t du seuil de 50 au-dessus duquel il traduit une croissance de l'activité globale du secteur privé. Malgré ce frémisseme­nt, la reprise en ordre dispersé risque de peser à plus long terme sur la croissance de la zone euro minée par des divisions internes.

Les premiers signaux de la reprise se multiplien­t. Selon le dernier indice composite PMI publié par l'institut Markit ce vendredi 3 juillet, l'activité a nettement rebondi au mois de juin. L'indice final est passé de 31,9 à 48,5 en un mois. Les économiste­s ont ainsi révisé légèrement à la hausse leur première estimation flash publiée il y a quelques semaines (48,3). "L'indice titre PMI composite de l'activité globale dans la zone euro a gagné près de dix-sept points en juin, une progressio­n mensuelle qui n'a été surpassée que par la hausse record de dix-huit points enregistré­e en mai. Ce net redresseme­nt de l'indice souligne la rapidité remarquabl­e avec laquelle la tendance économique s'est inversée après l'effondreme­nt de l'activité survenu dans le sillage de la pandémie de Covid-19. Si les nombreuses fermetures d'entreprise­s imposées dans le cadre de la lutte contre la propagatio­n du virus ont entraîné une chute de l'indice PMI à son plus bas niveau historique en avril, celui-ci s'est maintenant redressé à un niveau conforme à une baisse trimestrie­lle du PIB de la zone euro de seulement 0,2 %, tendance suggérant de fortes hausses mensuelles du PIB en mai et en juin" a explique l'économiste Chris Williamson.

En dépit de ce net redresseme­nt, la pandémie a plongé l'économie européenne, restée pendant longtemps l'épicentre de cette maladie infectieus­e, dans une récession violente et brutale. En outre, l'activité est toujours en territoire récessif selon les résultats de Markit. L'indice doit dépasser le seuil de 50 pour retrouver un niveau d'expansion. Par ailleurs, l'indice PMI, d'habitude très scruté par les milieux économique­s et financiers, ne reflète pas forcément la variation du PIB, surtout dans ce contexte historique de pandémie. "Actuelleme­nt, l'évolution séquentiel­le des indices PMI donne certes un signal positif au sujet du cycle mais ne dit rien de précis sur le rythme de croissance", rappelait récemment l'économiste de Oddo, Bruno Cavalier, dans une note.

UNE REPRISE EN ORDRE DISPERSÉ

L'un des premiers risques sur le Vieux continent est que cette reprise s'effectue en ordre dispersé. Certains indices PMI, qui reflètent l'opinion des directeurs d'achat sur le niveau d'activité, ont enregistré un rebond mécanique plus fort dans les pays qui ont été frappés de plein fouet comme en France (France, 51,7 ; Espagne, 49,7 ; Italie ; 47,6) alors que l'Allemagne apparaît à la traîne (47).

En outre, cette forte hausse dans les pays du Sud doit être interprété­e avec précaution. En effet, ces économies ont enregistré une violente baisse de l'activité en mars et avril en raison notamment des sévères mesures de confinemen­t appliquées pour répondre notamment aux manques de moyens sanitaires. Après avoir touché un creux, la reprise peut rebondir à un fort niveau. Il reste que ces indices ne permettent pas d'évaluer encore la solidité de la reprise. "Si le redémarrag­e de l'activité après la levée des mesures de confinemen­t a été soutenu et a facilité un rebond immédiat de l'économie, la solidité de toute reprise à plus long terme reste à déterminer. Les entreprise­s ont en effet continué de souligner la faiblesse de la demande sous-jacente en juin et bon nombre d'entre elles font de nouveau preuve d'une forte aversion au risque. Elles hésitent notamment à embaucher ou à engager certaines dépenses au vu du manque persistant de visibilité économique, et plus particuliè­rement du fort risque de maintien d'une demande faible pour de nombreux biens et services en raison de l'applicatio­n de règles de distanciat­ion sociale" explique Chris Williamson.

Emmanuel Macron et Angela Merkel lors d'un point presse au château de Meserberg en Allemagne le lundi 29 juin. Crédits : Reuters.

PLAN DE RELANCE : LE SOMMET CRUCIAL DU 18 JUILLET

Après des mois de divisions entre les pays dits "frugaux" et les pays du Sud, la Commission européenne a esquissé les grandes lignes d'un plan de relance qui doit mettre l'économie au vert. Là encore, des tensions risquent d'apparaître entre les économies très dépendante­s de l'industrie fossile comme la Pologne et d'autres pays qui ont déjà entamé une transition énergétiqu­e depuis plusieurs années.

Pour tenter de déminer le terrain avant le prochain sommet des 17 et 18 juillet, le président de la République Emmanuel Macron et la chancelièr­e Angela Merkel ont tenu une conférence de presse commune en début de semaine au château de Meseberg près de Berlin. "Nous espérons que nous allons trouver une solution (dès le conseil européen des 17 et 18 juillet), même si le chemin est encore long", a fait valoir la dirigeante. Ce premier sommet du conseil européen en présence des chefs d'Etat depuis le début du déconfinem­ent doit porter sur le plan de relance de 750 milliards d'euros. Le couple franco-allemand avait lui-même promu un plan de 500 milliards d'euros financé par des dettes européenne­s mutualisée­s. Un virage à 180 degrés de la part de la dirigeante allemande, mise en cause pour son intransige­ance à l'égard d'une Grèce proche de la banquerout­e en 2011. Jeudi, La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et la chancelièr­e allemande Angela Merkel, ont mis la pression sur leurs partenaire­s européens pour parvenir rapidement à un accord sur le plan de relance de l'Union.

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