La Tribune

METROPOLE DU GRAND PARIS: LA ROCAMBOLES­QUE REELECTION DU PRESIDENT PATRICK OLLIER

- CESAR ARMAND

Absent du premier tour après avoir perdu une primaire interne aux Républicai­ns, le président sortant de la métropole du Grand Paris, Patrick Ollier, a finalement été élu au second tour à la tête de cette structure qui compte plusieurs instances.

Qui aurait pu anticiper un tel scénario ? D'un côté, le "gaulliste" Patrick Ollier, président sortant (LR) de la métropole du Grand Paris (MGP), réélu pour le scrutin des municipale­s dans sa ville de RueilMalma­ison (Hauts-de-Seine) avec le soutien d'En Marche, mais défait lors d'une primaire interne aux Républicai­ns avec 44 voix sur 100. Pour être ensuite réélu, ce 9 juillet 2020, à la tête de la MGP, l'intercommu­nalité qui regroupe la ville de Paris et 131 communes, et ce, au bout de plus de cinq heures de votes et de tractation­s.

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De l'autre côté, le "bébé Pécresse" Vincent Jeanbrun, président (Libres !) du Forum métropolit­ain, syndicat mixte qui réunit Paris, des communes, la Métropole, les départemen­ts et la région Île-deFrance, réélu maire de L'Hay-les-Roses (Val-de-Marne) et vainqueur de la primaire interne aux Républicai­ns face à Patrick Ollier avec 55 voix sur 100. Avant d'être contraint de retirer sa candidatur­e face aux événements auxquels il va être confronté, contre toute attente.

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ACTE I : "JE NE SUIS PAS CANDIDAT À CE 1ER TOUR" (OLLIER)

Tout commence à 9h45 au palais des Congrès: le président parisien du groupe socialiste et apparentés de la MGP Emmanuel Grégoire propose la candidatur­e de l'ex-maire des Lilas (SeineSaint-Denis), Daniel Guiraud, "inquiet pour l'avenir de notre institutio­n". "Sa candidatur­e est d'abord celle de la défense de la Métropole", ajoute le premier adjoint d'Anne Hidalgo, première viceprésid­ente. Sans le nommer, Emmanuel Grégoire fait référence à la position inverse de Vincent Jeanbrun, qui, comme sa mentor Valérie Pécresse, a longtemps rêvé de supprimer la Métropole.

Prenant la parole, ce dernier entend "rassurer": "la MGP existe et doit perdurer". "Je crois au fait métropolit­ain: la pollution, les inondation­s, les rééquilibr­ages sont l'affaire de tous", poursuit Vincent Jeanbrun. Suivent ensuite les candidatur­es de Patrice Leclerc, président du groupe Front de gauche et maire (PCF) de Gennevilli­ers (Hauts-de-Seine) ainsi que de Philippe Laurent, maire (UDI) de Sceaux et ex-candidat à la tête de la Métropole en 2016, qui rendent hommage au travail de Patrick Ollier ces quatre dernières années.

"Je ne suis pas candidat à ce premier tour, je vous rassure", répond, "touché" par cette reconnaiss­ance, le président sortant de la Métropole.

Mais en politique, rien ne se passe jamais comme prévu. Parmi les 207 votants sur 208 conseiller­s métropolit­ains, Vincent Jeanbrun obtient 79 voix, talonné par Philippe Laurent (73). Est alors demandé une suspension de séance d'une heure. Chaque groupe politique s'enferme alors dans son espace dédié avant de revenir soixante minutes plus tard, comme prévu.

ACTE II : LES SUSPENSION­S DE SÉANCE SE MULTIPLIEN­T

De retour à leur pupitre, le socialiste Daniel Guiraud (16 voix) puis le communiste Patrice Leclerc (29 voix) annoncent leur retrait du second tour et appellent à voter pour le centriste Philippe Laurent. Le candidat des Républicai­ns (LR) Vincent Jeanbrun demande alors une suspension de séance de dix minutes.

En réalité, à l'heure dite, le maire de L'Hay-les-Roses et les siens tardent à revenir dans la salle. Le président du groupe LR, Eric Cesari, demande dix minutes supplément­aires. Le doyen André Santini, maire (UDI) d'Issy-les-Moulineaux et président de séance d'un jour, accepte.

Le délai imparti est terminé, mais le groupe majoritair­e demeure enfermé. Un maire sort et confie à La Tribune que Valérie Pécresse vient d'appeler Patrick Ollier, en haut-parleur pour lui signifier son soutien, et ce, en présence de son poulain Vincent Jeanbrun. Dans une autre salle, démarrent alors des négociatio­ns entre ce dernier, candidat investi par les Républicai­ns, le sortant Patrick Ollier, battu lors de la primaire interne, et le centriste Philippe Laurent. Avant que chacun ne sorte avec ses fidèles élus et ses équipes.

ACTE III : APPLAUDISS­EMENTS ET HUÉES

S'asseyant devant son micro, Vincent Jeanbrun dénonce, entre les applaudiss­ements et les huées, des "arrangemen­ts" et des "magouilles" et retire, à son tour, sa candidatur­e. Pendant ce temps, Patrick Ollier annonce sa candidatur­e au nom du rassemblem­ent, Philippe Laurent renonçant à la sienne bien qu'en tête au premier tour. Dans le couloir qui le mène vers la sortie, Vincent Jeanbrun lâche ses coups et compare la situation à "une ambiance de IIIème République délétère".

Suivi par l'ex-tête de liste des Républicai­ns à Paris Rachida Dati, et de nombreux élus parisiens, Vincent Jeanbrun improvise une conférence de presse. "Le candidat d'Anne Hidalgo va être élu président de la métropole du Grand Paris", balance-t-il. "Anne Hidalgo m'a appelé le lendemain de l'élection pour me dire que son candidat était Patrick Ollier", lâche Rachida Dati. Et ces derniers d'annoncer qu'ils créeront leur propre groupe à la MGP.

ÉPILOGUE : 133 VOTES SUR 137 SUFFRAGES EXPRIMÉS

Pendant le dépouillem­ent d'un scrutin de 2ème tour qui va voir triompher Patrick Ollier seul candidat, la maire (PS) de Paris, Anne Hidalgo, appelle la presse. "Ollier, c'est le choix du respect du vote des habitants de la métropole, c'est le respect de Paris qui a élu une maire de gauche avec une majorité écologiste", souligne l'actuelle première vice-présidente de la MGP.

A l'heure des résultats, et sans surprise, le président sortant, absent du premier tour, seul au second, obtient 133 votes des 137 suffrages exprimés sur 156 votants. "Ému", Patrick Ollier tend la main à Vincent Jeanbrun: "il a toute sa place dans la gouvernanc­e de la métropole du Grand

Paris". L'élection des vice-présidents, prévue à l'ordre du jour, est pourtant ajournée. Il est 15h15 et les ventres qui gargouille­nt sont pressés de se ruer vers le buffet.

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