La Tribune

BORDEAUX : LE COWORKING VEUT CROIRE EN LA PROMESSE DES BEAUX JOURS (2/4)

- ANNE FARTHOUAT

Le télétravai­l oui, mais plus à la maison ! Après deux mois de confinemen­t général et plusieurs semaines de reprise partielle des crèches, écoles, collèges et lycées, le "home office" a fait son temps. Mais le besoin de nouveaux espaces hors les murs de l’entreprise reste d’actualité, voire plus prégnant que jamais : les salariés ne sont pas pressés de renouer avec les longs trajets domiciles-travail, et les entreprise­s, en quête de réduction des coûts, pourraient bien être tentées de limiter leurs surfaces de bureaux. C’est en tout cas sur ce postulat que misent les espaces de coworking pour relancer leur activité post-Covid.

"On assiste à un changement de culture : jusqu'à récemment le télétravai­l était mal perçu en France, mais les entreprise­s sont en train d'ouvrir les chakras". Gérant de Wigi coworking et viceprésid­ent de l'associatio­n Comet, Éric San Augustin reste convaincu, malgré le trou d'air créé par le confinemen­t, que le coworking est "un business d'avenir". Et il n'est pas le seul. Des "petits" indépendan­ts aux grands espaces de bureaux partagés, en passant par les structures hybrides type Mamaworks ou Héméra, tous s'attendent à voir de nouveaux clients toquer à la porte à la rentrée.

"Il va y avoir des changement­s dans la manière de travailler, les entreprise­s vont mettre en place deux ou trois jours de télétravai­l par semaine, elles auront besoin de moins de superficie dans leurs locaux, et de louer des postes flexibles dans des bureaux partagés", abonde ainsi Alexandra Patat, gérante de Mamaworks Bordeaux. Elle n'exclut pas d'ailleurs de bâtir une offre "time share", où une entreprise pourrait louer des bureaux deux ou trois jours par semaine, et une autre louer ces mêmes bureaux les jours restants. Alors que l'incertitud­e s'abat sur de nombreux secteurs économique­s, le bail commercial, qui engage l'entreprise sur un rythme triennal renouvelab­le (sur 3-6-9 ans), fait assurément pâle figure face aux conditions de résiliatio­n ultra souples proposées par les espaces coworking (un à deux mois de préavis).

"CONSERVER UNE VITRINE"

En démontrant que le travail à distance était capable de fonctionne­r, le confinemen­t a en réalité "accéléré en France une transforma­tion globalemen­t à l'oeuvre sur le marché de l'immobilier de bureau", analyse pour sa part Christophe Burckart, directeur général d'IWG France, implanté à Bordeaux à travers ses marques Spaces, Régus, HQ et Signature. À termes, "les entreprise­s pourraient conserver un environnem­ent de travail vitrine" dans leurs territoire­s d'implantati­on, et "louer des bureaux partagés à coûts variables pour leurs collaborat­eurs", imagine-t-il.

IWG s'est d'ailleurs imposé en leader mondial du marché par un maillage de plus en plus fin des territoire­s, et la possibilit­é offerte à ses clients de "naviguer" entre ses espaces de bureaux, au gré de leurs besoins. Un réseau "essentiel" pour Christophe Burckart, puisqu'il permet de "fluidifier au maximum le télétravai­l des clients".

"LES COLLABORAT­EURS NE VOUDRONT PAS D'UN BUREAU FROID"

"Oui le télétravai­l en bureaux partagés pourrait bien se développer en France, à l'image de ce qui s'est fait en Grande-Bretagne ou au Canada", acquiesce Julien Parrou Dubosq, fondateur d'Héméra. "Mais les collaborat­eurs ne voudront pas d'un bureau froid, sans espaces communs, sans conviviali­té. Il faut pouvoir leur proposer plus que ça."

C'est justement l'ADN de ces espaces hybrides qui mêlent openspace et bureaux privatifs, avec une activité événementi­elle non négligeabl­e (15 % en l'occurrence pour Héméra) : offrir aux coworkers l'accès à une "communauté" bien identifiée, dans un lieu propice aux rencontres profession­nelles, et faire vivre ce réseau. On y privatise le bar ou la terrasse pour une soirée après une journée de travail, on y organise une rencontre profession­nelle dans l'atrium, et on y consolide au passage son activité. Autant de traits communs avec Mamaworks, qui met aussi "à profit toute l'expertise hôtelière du groupe" pour créer un espace "chaleureux et bienveilla­nt". Et consolider ainsi son activité événementi­elle, qui représente près d'un tiers de son chiffre d'affaires.

Un modèle d'avenir en tout cas pour Héméra, qui ouvrira prochainem­ent un nouvel espace de

1.900 m2 du côté de la place Ravezies, à Bordeaux, dédié aux entreprise­s de l'IA et de la data. "On veut pouvoir créer une cohérence dans chacun de nos espaces", précise Julien Parrou Dubosq.

Lire aussi : Héméra va ouvrir un 2e espace de coworking à Bordeaux, en partenaria­t avec Clairsienn­e

Connue pour le déploiemen­t exponentie­l des espaces de coworking ces dernières années, passés d'une vingtaine en 2016 à près de 80 aujourd'hui selon l'associatio­n Comet, la métropole bordelaise, et avec elle la Nouvelle Aquitaine, pourraient donc bien avoir une carte à jouer dans les mois qui viennent. La Région et l'associatio­n Coop tiers lieux ne s'y trompent d'ailleurs pas : toutes deux préparent un plan de communicat­ion conjoint sur l'intérêt du télétravai­l en tiers lieux, à paraître prochainem­ent, selon l'associatio­n.

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A lire aussi les trois autres volets de notre dossier :

Comment les coworkings bordelais ont traversé la crise sanitaire ? (1/4)

"La crise a révélé la nécessité de créer un statut pour les espaces de coworking" (3/4) 70 % des espaces Wellio occupés à la Cité numérique (4/4)

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