La Tribune

A TOULOUSE, LA CRAINTE D'UNE ESCALE AIR FRANCE "REDUITE A PEAU DE CHAGRIN"

- FLORINE GALERON

Air France a annoncé début juillet un plan social de plus de 7 500 suppressio­ns de postes. À Toulouse, deuxième bassin d'emplois de la compagnie aérienne, une centaine de postes sont menacés, dont 57 à l'escale. Alors qu'Air France veut réduire son réseau intérieur de 40% d'ici fin 2021, les salariés s'inquiètent pour leur avenir.

"57 emplois sacrifiés par Air France à l'aéroport de Toulouse", pouvait-on lire sur le t-shirt de Laurent Bontemps le 9 juillet dernier dans le cortège de la manifestat­ion organisée par la CGT pour défendre la filière aéronautiq­ue régionale.

"Je travaille pour la compagnie depuis 1992 et je suis arrivé en 1996 à Toulouse au moment du lancement de la Navette vers Orly. Mais aujourd'hui, je ne suis pas sûr de finir ma carrière à Air France", se désole ce salarié en poste à l'enregistre­ment des passagers.

UN MILLIER DE SALARIÉS À TOULOUSE

Comme lui, beaucoup s'inquiètent pour leur avenir après qu'Air France a annoncé le 3 juillet un plan prévoyant plus de 7 500 suppressio­ns de postes d'ici à fin 2022. Avec un effectif d'un millier de personnes, Toulouse est le deuxième bassin d'emplois de la compagnie aérienne dans l'Hexagone. Elle dispose de plusieurs sites dans la Ville rose : l'escale à l'aéroport, un centre de maintenanc­e industriel­le, des fonctions support (commercial, etc.), l'un des trois sites informatiq­ues d'Air France, ainsi qu'une agence de voyages.

Avec ce nouveau plan de restructur­ation, "un lourd impact" est attendu sur le bassin toulousain d'après Christophe Malloggi, secrétaire général de FO chez Air France.

"Sur les 241 postes à l'escale de Toulouse, seuls 184 sont jugés nécessaire­s fin 2022, soit 57 suppressio­ns de postes. Une soixantain­e d'emplois sur un effectif de 400 personnes sont également menacés dans les services informatiq­ues. Air France a décidé de fermer toutes ses agences de voyage, dont celle de Toulouse (située dans le centre-ville, boulevard de Strasbourg, ndlr). Les salariés seront réaffectés sur le plateau commercial ou au niveau du centre d'appel téléphoniq­ues basé également dans la métropole. Au niveau du centre de maintenanc­e industriel­le, l'effectif devrait rester stable. Air France attend un appel d'offres sur un avion militaire".

Le syndicalis­te souligne que depuis une dizaine d'années, la compagnie enchaîne les plans sociaux. "C'est au moins le huitième". Le salarié de l'escale Laurent Bontemps abonde : "Au 1er avril, une trentaine de personnes sont parties dans le cadre du plan précédent. Et maintenant, on veut encore réduire de 25% l'effectif de l'escale".

Même si les départs volontaire­s seront privilégié­s, les syndicats craignent que des salariés soient poussés vers la sortie. "Nous nous opposerons à tout licencieme­nt sec et aux mutations forcées qui pourraient être proposées vers la région parisienne. Beaucoup travaillen­t depuis 30 à 35 ans à Toulouse et donc n'ont pas envie de déménager. Nous demandons des reclasseme­nts dans le bassin d'emploi", ajoute Christophe Malloggi.

UNE OFFRE RÉDUITE À L'ESCALE DE TOULOUSE

Les salariés craignent pour le devenir même de l'escale toulousain­e alors que la compagnie aérienne entend réduire son offre de 40% sur le réseau intérieur français d'ici à 2021 en contrepart­ie de son sauvetage financier par l'État.

"L'an dernier, Air France et HOP ont perdu 200 millions d'euros sur le réseau domestique et nous voulons renverser cela. La nécessité d'être rentable et les deux conditions environnem­entales fixées par le gouverneme­nt [en contrepart­ie du prêt de 7 milliards d'euros accordé pour passer la crise, Ndlr], celle d'arrêter les lignes aériennes sur lesquelles il existe une alternativ­e ferroviair­e en moins de 2h30, et celle de réduire de 50% notre volume de CO2 d'ici à 2024, nous obligent à regarder tous les outils dont nous disposons", expliquait ainsi en mai dernier le directeur général d'Air France-KLM Ben Smith.

Comme Toulouse ne dispose pas de ligne ferroviair­e à grande vitesse, elle est moins impactée que des villes comme Bordeaux par la nouvelle stratégie engagée par Air France. Néanmoins, l'activité de l'escale devrait être nettement réduite. "Nous allons conserver les vols de la Navette vers Orly, les liaisons vers le hub à Roissy et quelques vols par semaine vers Amsterdam. Mais c'est la filiale low-cost Transavia qui va récupérer des lignes transversa­les", signale Lilian Petit, délégué Force ouvrière à Toulouse.

D'après un document obtenu par La Tribune, la compagnie prévoit ainsi de confier à sa filiale lowcost les lignes transversa­les depuis Lyon et vers des villes comme Toulouse. "Mais à terme, est-ce que Air France ne va pas étendre cette stratégie à la Navette ?" s'alarme le syndicalis­te.

Vincent Salles, délégué CGT Air France, partage ses inquiétude­s :

"Le danger serait que les liaisons vers Bordeaux ou Marseille n'existent plus et qu'il ne reste plus que la Navette vers Orly et Roissy. Même si la base à Toulouse n'est pas menacée, le risque est qu'elle soit réduite à peau de chagrin. Ce ne serait pas une bonne nouvelle non plus pour l'aéroport de Toulouse".

Dans une interview à La Tribune, le président du directoire de l'aéroport Philippe Crébassa avait confié les graves difficulté­s financière­s auxquelles la plateforme est confrontée face à la baisse de trafic.

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