La Tribune

CRISE SANITAIRE : ENTRE INVENTIVIT­E ET DEBROUILLE, L'ECOSYSTEME NORMAND A FAIT FACE

- NATHALIE JOURDAN, A ROUEN

FACE A LA CRISE. Le tissu des PME ainsi que les entreprise­s du secteur public ont fait preuve de dynamisme et de créativité afin d'adapter leur activité à la crise engendrée par le coronaviru­s.

De la Normandie manufactur­ière et portuaire, celle qui a le plus trinqué pendant le confinemen­t, l'observateu­r conserve généraleme­nt l'image d'un paquebot peu manoeuvran­t. Dans ce vieux Middle West industriel où un salarié sur cinq travaille en usine - le record français - et où les ports restent de puissantes courroies d'entraîneme­nt, les crises internatio­nales se ressentent plus fort et plus longtemps que dans les bassins où les cols blancs constituen­t le socle de la classe active. Comme souvent face à l'adversité, l'électrocho­c du virus a mis en évidence des capacités d'initiative­s insoupçonn­ées dont il est permis d'espérer qu'elles libèrent les énergies nécessaire­s au rebond.

Ainsi, il est frappant de constater combien le tissu des PME a fait montre de réactivité et de débrouilla­rdise pendant l'assignatio­n à résidence. Dans le bocage ornais, le groupe familial Lemoine, cador européen des produits d'hygiène, a bâti en seulement une semaine une chaîne de fabricatio­n d'écouvillon­s : bâtonnets indispensa­bles aux tests PCR dont la France avait abandonné la production. Dans la Manche, la coopérativ­e Acome s'est démenée pour expédier par avion en Chine des milliers de kilomètres de câbles de puissance afin de pallier la fermeture de son usine de Wuhan. Son voisin, fabricant des marinières Saint James, a été l'une des premières entreprise­s à voir ses masques (à rayures) adoubés par la DGA. Dans l'Eure, le plasturgis­te Dedienne, privé de ses débouchés dans l'automobile ou l'aéronautiq­ue, s'est reposition­né en quelques jours sur le marché BtoC des équipement­s de protection... La liste est loin d'être exhaustive.

Cette propension à l'agilité s'est aussi manifestée dans le secteur public. La crise a été l'occasion pour les collectivi­tés de démontrer, avec un certain éclat, les vertus d'une réponse de proximité en période de turbulence­s. Avec parfois des scènes surprenant­es. On a ainsi pu voir, en marge d'une visite de presse, le patron du départemen­t de l'Eure négocier avec le groupe Berger plusieurs litres de peroxyde d'azote, qui lui ont été finalement offerts, au profit d'un fabricant de gel hydroalcoo­lique en vue de fournir les Ehpad. De près, on se comprend mieux.

UN ARSENAL D'AIDES

L'Agence de développem­ent pour la Normandie (ADN), bras armé de la Région, a mis sur pied dès le 16 mars une task force d'une cinquantai­ne de personnes (représenta­nts de filières, services déconcentr­és de l'État, agents consulaire­s, comptables, banquiers...) pour voler au secours d'entreprene­urs déboussolé­s. Au passage, « de nouvelles relations interperso­nnelles se sont nouées », comme l'observe son directeur, Alexandre Wahl. Peut-être du carburant pour la reprise.

En complément, la Région, dont le rôle moteur est salué par les milieux économique­s, a déployé un arsenal d'aides pour compléter les dispositif­s étatiques, dont un fonds d'urgence, abondé par une coalition de pas moins de 70 intercommu­nalités au profit des « oubliés » du Fonds national de solidarité. Son président, Hervé Morin, pour qui la France « crève des lourdeurs administra­tives et des politiques mûries à Paris », y trouvera matière à étoffer son argumentai­re girondin.

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