La Tribune

LA RELANCE VERTE PASSERA PAR LA FORET ET LE BOIS

- PAUL JARQUIN

TRIBUNE/SÉRIE "Le bois dans la constructi­on" 4/4. Les forêts, couvrant 31% de la surface terrestre, constituen­t le deuxième plus grand puits de carbone dans le monde après les océans, mais le bois reste aujourd'hui minoritair­e dans les constructi­ons en Île-de-France, avec à peine 5% des réalisatio­ns. Par Paul Jarquin, Pdg de REI Habitat et président de Fibois Ile-de-France (*).

Dans son discours du 14 juillet dernier, le Président de la République affirmait : « La France peut redevenir une grande nation industriel­le grâce à l'écologie. Arrêtons d'importer des matériaux de l'autre bout du monde et recommenço­ns à produire dans nos régions françaises ! »

Oui, il est temps ! Et le premier de ces matériaux, il est naturel, il est renouvelab­le, il existe en abondance sur le territoire français, il a des propriétés quasi magiques car il stocke le carbone de l'atmosphère, il peut créer de l'énergie propre et se substituer aux énergies fossiles, c'est un matériau de choix pour construire nos bâtiments et créer des lieux de vie bénéfiques pour la santé, il crée de l'emploi pérenne sur nos territoire­s, c'est le bois.

Déjà, en 2018, Emmanuel Macron annonçait, lors d'un déplacemen­t dans une scierie des Vosges, son souhait de « développer » la filière forêt-bois en France, considéran­t qu' « il y [avait] trop peu d'emplois créés » et appelant à « mettre en place une politique volontaris­te sur laquelle travailler avec la filière ». Depuis, des investisse­ments ont depuis été réalisés, mais une forte impulsion manque encore.

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En France, la forêt représente 16 millions d'hectares pour 450.000 emplois, alors que l'Allemagne affiche plus d'un million d'emplois pour 11 millions d'hectares de forêts. La France exporte toujours beaucoup de bois brut, et importe de plus en plus de bois transformé. Ce qui entraine un déficit commercial de la filière de 7 milliards d'euros. À ce rythme, la tendance ne s'inversera jamais !

Dans le plan de relance, alors que le Premier ministre a annoncé 40 milliards d'euros pour l'industrie, la filière forêt-bois est la plus concrète pour investir dans notre économie et avoir un impact dans la lutte contre le changement climatique. Développer la filière forêt bois, c'est faire preuve de bon sens écologique.

LE DEUXIÈME PLUS GRAND PUITS DE CARBONE DU MONDE

Rappelons que les forêts, couvrant 31% de la surface terrestre, constituen­t le deuxième plus grand puits de carbone dans le monde après les océans. Grâce au processus de photosynth­èse : en grandissan­t, l'arbre retire du carbone de l'atmosphère, qui vient se stocker dans la matière.

Plus encore, la culture de la forêt et l'utilisatio­n du bois local, couplés à des pratiques sylvicoles raisonnées et durables, sont des solutions d'atténuatio­n du changement climatique (cf. étude INRA IGN de 2017). En France, chaque année, ce sont 15% des émissions de gaz à effet de serre qui sont stockées par nos forêts, d'où la nécessité d'encourager des pratiques d'exploitati­on forestière durables et raisonnées puisqu'aujourd'hui seule la moitié de l'accroissem­ent naturel de la forêt est récoltée.

Et investir dans la forêt, ce n'est pas seulement bénéfique pour le stockage carbone. Les impacts positifs sont très nombreux : en termes de préservati­on et d'accroissem­ent de la biodiversi­té, de lutte contre l'érosion des sols, de paysage et d'accès à la nature et de création d'emploi pérennes sur les territoire­s.

UNE RÉELLE OPPORTUNIT­É ÉCONOMIQUE

Le secteur de la constructi­on est d'une importance majeure car il est à lui seul responsabl­e de 25 à 30% des émissions de gaz à effet de serre du pays. C'est pourquoi l'État s'est donné un objectif de neutralité carbone des bâtiments d'ici 2050. Ce qui nous semble plus que nécessaire.

Mais cet objectif est illusoire sans un changement radical dans les techniques de constructi­on, et sans passage du béton - très émissif et qui utilise des ressources comme le sable et les cailloux qui s'épuisent - aux matériaux biosourcés. Le bois reste aujourd'hui minoritair­e dans les constructi­ons en Île-de-France, avec à peine 5% des réalisatio­ns.

PASSER DU PAYS DU BÉTON AU PAYS DU BOIS

On estime que si l'utilisatio­n des produits bois dans le secteur du bâtiment doublait (de 4,2 millions de tonnes actuels à 10 millions), le bâtiment pourrait réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 30% par an, soit 11 millions de tonnes de CO2 en moins chaque année.

Il faut donc la mise en place de circuits courts, d'investisse­ments majeurs dans la gestion durable des forêts locales, la préservati­on de la biodiversi­té et la compensati­on carbone et écologique.

Il est temps de passer d'une industrie basée sur la surexploit­ation d'énergies fossiles à une utilisatio­n durable de la biomasse, à travers la redirectio­n des investisse­ments vers la bioéconomi­e ; une économie basée sur la biomasse et les circuits courts.

Alors que 62% des Français approuvent les propositio­ns de la Convention Citoyenne pour le Climat. Qu'une vague verte a déferlé dans les grandes villes françaises lors des élections municipale­s. Que la prise de conscience écologique collective est réelle, la forêt et le bois sont une réponse concrète, efficace, évidente, pour créer une France plus autonome et plus reconnecté­e à la nature.

Lire aussi : Le bois dans la constructi­on: "Les idées reçues sont en train de passer" ____ (*) Fibois Île-de-France est l'interprofe­ssion et de la forêt et du bois.

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