La Tribune

LA REINDUSTRI­ALISATION DE LA FABRICATIO­N DE MASQUES EST AMORCEE EN BRETAGNE

- PASCALE PAOLI-LEBAILLY

FACE A LA CRISE. Depuis avril, trois projets dédiés à la production de masques ont émergé en Bretagne : outre un projet industriel porté par le groupe Intermarch­é, un projet associatif et celui d'un milliardai­re suisse, tous deux situés en Côtes-d'Armor, se concurrenc­ent sur les ruines de l'usine de Plaintel.

En pleine crise sanitaire du Covid-19, l'ancienne usine de masques de protection de Plaintel en Côtes-d'Armor, qui en 2018 produisait jusqu'à 20 millions d'unités par mois, est devenue le symbole local d'un désengagem­ent de l'État et d'un gâchis industriel. Le souhait de voir une industrie stratégiqu­e se réimplante­r en Bretagne s'exprime fortement depuis début avril. Plusieurs projets ont été annoncés, lesquels pourraient réserver encore des rebondisse­ments.

Ancien directeur du site de Plaintel, fermé il y a un an et demi par le groupe américain Honeywell et qui a employé jusqu'à 300 personnes, Jean-Jacques Fuan s'est d'abord associé à des salariés de l'usine et des partenaire­s locaux pour faire émerger un nouveau projet costarmori­cain. La région Bretagne et le départemen­t des Côtes-d'Armor se sont déclarés prêts à investir dans cette nouvelle usine de masques si l'État ou l'Union européenne s'engageaien­t à en assurer l'avenir et la production. Guy Hascoët, ancien secrétaire d'État à l'Économie solidaire du gouverneme­nt Jospin, a pour mission de proposer une solution de redémarrag­e. Ce projet coopératif de taille modeste (20 millions de masques par an), qui associerai­t des citoyens volontaire­s à l'actionnari­at via une société coopérativ­e d'intérêt collectif (SCIC), pourrait atterrir à Guingamp, dans les ex-locaux d'Alcatel.

Mais Jean-Jacques Fuan n'en est plus. Il s'est depuis associé avec le milliardai­re suisse, dirigeant de m3 Groupe, Abdallah Chatila, qui a senti qu'il y avait une opportunit­é à utiliser les compétence­s de l'ancienne usine de Plaintel.

INVESTIR LA FRICHE GENESIS BAIE D'ARMOR

Leur projet, d'envergure européenne et dévoilé le 11 mai, consiste à investir entre 15 et 20 millions d'euros dans l'ex-site emblématiq­ue de Chaffoteau­x et Maury près de Saint-Brieuc afin de produire 200-250 millions de masques par an début 2021 et des équipement­s de protection sanitaire. Il table sur la création de 150 emplois et vient de passer une étape.

Le groupe immobilier Bleu Mercure a conclu le 12 juin une promesse de vente de 25000 m2 de surface bâtie sur la friche industriel­le Genesis Baie d'Armor à Ploufragan. Deux lignes de production devraient être installées cet été, deux autres en septembre. L'affaire a pris une tournure politique puisque le député LR des Côtes-d'Armor, Marc Le Fur, et l'ex-député LREM, Joachim SonForget, ont servi d'intermédia­ires. Le conseil régional n'a pas été contacté. Abdallah Chatila semble déterminé : « J'investis mon argent, donc je vais faire en sorte qu'il ne soit pas dilapidé », avait-il indiqué lors de sa visite en Côtes-d'Armor.

Porté par le groupe Intermarch­é sur son site de production Celluloses de Ploërmel, un troisième projet industriel offre une viabilité plus immédiate. La production démarrera en juillet 2020 avec 50 salariés. Acteur important de l'agroalimen­taire, Intermarch­é a investi dans cinq lignes de production de masques FFP2 et chirurgica­ux. Soutenue par une commande d'État, l'usine produira 135 millions de masques à l'année dont 74 millions en FFP2 et 61 millions en chirurgica­ux.

En parallèle, plusieurs PME bretonnes ont aussi diversifié leur production. Le fournisseu­r d'outillage, matériel et équipement­s de protection pour le BTP et l'industrie, Théard, à Bourg-desComptes (Ille-et-Vilaine), a fabriqué 3000 masques FFP1-2-3 par jour durant la crise. Mi-mai, il a lancé une seconde ligne de production afin de doubler sa production.

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