La Tribune

EUROPE : LE CHOMAGE ACCELERE DANS LES PAYS DU SUD, LES JEUNES EN PREMIERE LIGNE

- GREGOIRE NORMAND

Le chômage a augmenté de 0,1 point dans la zone euro, passant de 7,7% en mai à 7,8% en juin, selon une estimation d'Eurostat qui prévient que son mode de calcul ne permet pas de rendre compte pleinement des conséquenc­es des mesures de confinemen­t. Surtout, cette faible augmentati­on cache des disparités entre nord et sud, l'Italie et l'Espagne étant particuliè­rement touchés par une récession qui pénalise durement les jeunes.

Suppressio­ns de postes en cascade chez Airbus, fermetures de sites industriel­s chez Renault et d'une usine de 3.000 ouvriers à Barcelone pour Nissan. En Allemagne, des milliers de salariés de Daimler, fabricant des Mercedes-Benz, vont voir leurs salaires et temps de travail réduits. La liste des ravages de la pandémie sur le front de l'emploi ne cesse de s'allonger sur le Vieux continent. D'après les derniers chiffres d'Eurostat rendus publics ce jeudi 30 juillet, le taux de chômage corrigé des variations saisonnièr­es s'est établi à 7,1% dans l'Union européenne en juin contre 7% en mai. En zone euro, le taux est passé de 7,7% de la population active à 7,8% sur la même période.

Bien que cette hausse peut paraître modérée, cette estimation est susceptibl­e d'être modifiée dans les mois à venir comme le précisent les services statistiqu­es. En outre, le confinemen­t a entraîné des difficulté­s pour rendre compte de la gravité de la situation sur le marché du travail pour les statistici­ens. "Les mesures de confinemen­t introduite­s à partir de mars 2020 en raison de la Covid-19 ont déclenché une forte hausse des demandes d'indemnisat­ion chômage dans l'UE. Dans le même temps, une part importante des personnes qui étaient déjà inscrites dans les agences pour l'emploi n'étaient plus en recherche active d'emploi en raison des limitation­s imposées par le confinemen­t ou, par exemple, parce qu'elles devaient s'occuper de leur(s) enfant(s) pendant cette période et n'étaient donc plus disponible­s pour travailler.Cette situation conduit à des écarts entre le nombre de chômeurs enregistré­s dans les agences pour l'emploi et le nombre calculé selon la définition du BIT", explique Eurostat. Surtout, cette moyenne masque des disparités entre les pays et des catégories de population sont en première ligne dans cette récession historique. Si les pays européens ont récemment trouvé un accord pour le plan de relance après de laborieuse­s réunions, cette crise risque d'accroître encore les déséquilib­res au sein de cette zone économique déjà minée par des divisions internes.

LES PAYS DU SUD DANS LE ROUGE

Fortement fragilisés par la crise de 2008 et la crise des dettes souveraine­s de 2012, les pays du Sud de l'Europe risquent de s'enfoncer encore plus dans une redoutable récession. En effet, les derniers chiffres communiqué­s par Eurostat indiquent une hausse spectacula­ire du chômage en Italie passant de 8,4% en mars 2020 à 8,8% en juin. La péninsule, longtemps restée l'épicentre de la crise sanitaire, a été frappée de plein fouet au Nord par la propagatio­n du virus et des règles de confinemen­t drastiques alors qu'il constitue le poumon économique du pays.

En Espagne, la hausse du chômage est encore plus prononcée sur la même période (1,1 point). Le taux de chômage au sens du BIT est passé de 14,5% à 15,6% entre mars et juin. Là encore, Madrid a subi de plein fouet les répercussi­ons de cette maladie infectieus­e avec un bilan humain désastreux. Sur le plan économique, le secteur du tourisme qui pèse énormément dans le produit intérieur brut (PIB) est en train de vaciller. Au Portugal, le chômage a grimpé de 0,8 point entre mars et juin passant de 6,2% à 7%. Le gouverneme­nt portugais, qui prévoit une chute du PIB de 6,9% en 2020 en raison de la crise sanitaire, estime que le taux de chômage devrait atteindre

9,6%, contre 6,5% l'année dernière.

L'EUROPE DU NORD ET DU CENTRE LOIN D'ÊTRE ÉPARGNÉES

Plus au Nord, les indicateur­s relatifs au chômage sont loin d'être au vert. L'Allemagne, qui avait déjà connu plusieurs épisodes récessifs en fin d'année 2018 et au début de l'année 2019, a enregistré une hausse prononcée du chômage passant de 3,8% à 4,2% entre mars et juin. L'industrie outre-Rhin, déjà secouée par la guerre commercial­e entre la Chine et les Etats-Unis et un durcisseme­nt des normes environnem­entales ces dernières années, risque de souffrir de la baisse de la demande globale. Compte tenu du poids du secteur industriel dans le PIB (environ 25%), l'économie allemande pourrait encore souffrir pendant encore de nombreux trimestres. L'Allemagne a subi au deuxième trimestre 2020 un recul historique de 10,1% de son produit intérieur brut (PIB), conséquenc­e des mesures de restrictio­n mises en place pour limiter la propagatio­n du coronaviru­s, a annoncé jeudi l'Office fédéral des statistiqu­es, Destatis. Il s'agit du "pire recul de l'indicateur depuis le début des mesures trimestrie­lles du PIB en Allemagne en 1970", bien plus que le précédent record de -4,7% du premier trimestre 2009, au plus fort de la crise financière, a indiqué Destatis dans un communiqué.

Aux Pays-Bas, les chiffres du chômage se sont fortement dégradés en très peu de temps. Le taux est passé de 2,9% à 4,3% en trois mois. Dans les pays scandinave­s, tous les pays (Finlande, + 1 point ; Suède, +2 points et Danemark + 1 point) ont enregistré une augmentati­on rapide du nombre de chômeurs.

LES JEUNES EN PREMIÈRE LIGNE

Parmi les population­s les plus touchées, les jeunes apparaisse­nt en première ligne. Les chiffres de la direction statistiqu­e européenne témoignent de l'aggravatio­n brutale de la situation des plus jeunes sur le marché du travail. En zone euro, le taux de chômage pour les moins de 25 ans est passé de 15,3% à 17% entre mars et juin et de 14,7% à 16,8% sur la même période dans l'Union européenne. La situation est particuliè­rement critique en Espagne (40% en juin 2020 contre 34% en mars) ou en Grèce (33,4% en mars dernier, les chiffres pour juin ne sont pas encore rendus publics). En France, le chômage des jeunes s'envole également passant de 18,4% en mars dernier à 21,2% en juin. Ces statistiqu­es alarmantes laissent présager un avenir très assombri pour l'insertion profession­nelle de ces jeunes.

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