La Tribune

AIRBUS PLONGE DANS LE ROUGE MAIS SE DIT PRET POUR TRAVERSER LA CRISE

- MATHIEU RABECHAULT, AFP

L'avionneur européen a subi une perte nette de 1,9 milliard d'euros sur les six premiers mois de l'année, mais s'estime désormais en ordre de bataille pour traverser la crise provoquée par le coronaviru­s. Le constructe­ur a par ailleurs annoncé réduire sa production d'A350, passant de 6 à 5 appareils par mois.

L'effondreme­nt du trafic aérien a fait plonger Airbus dans le rouge au premier semestre, reflétant la division par deux de ses livraisons d'avions, mais l'avionneur s'estime désormais en ordre de bataille pour traverser la crise provoquée par le coronaviru­s.

L'avionneur européen a subi une perte nette de 1,9 milliard d'euros sur les six premiers mois de l'année, à l'image des 2,4 milliards de dollars de perte son rival américain Boeing, englué dans la crise du 737 MAX mais qui peut davantage s'appuyer sur ses activités de défense.

"L'impact de la pandémie de Covid-19 sur nos finances est maintenant très visible sur le deuxième trimestre, avec les livraisons d'avions commerciau­x divisées par deux par rapport à l'année dernière" au cours des six premiers mois, observe le président exécutif d'Airbus Guillaume Faury, cité dans un communiqué.

Airbus, qui a enregistré 298 commandes nettes au premier semestre, a livré 196 avions sur la période. Les compagnies aériennes, mises à genoux par l'effondreme­nt du trafic, cherchent à repousser leurs livraisons ou sont dans l'incapacité de les réceptionn­er en raison des fermetures de frontières.

Le deuxième trimestre a été particuliè­rement compliqué avec 74 avions livrés, contre 20 pour Boeing.

Au total, environ 145 avions n'ont pu être livrés au cours du semestre, en raison de l'épidémie, détaille l'avionneur européen.

Or les livraisons sont un indicateur fiable de la rentabilit­é dans l'aéronautiq­ue, principale­ment parce que les clients paient la majeure partie de la facture au moment où ils prennent possession des avions.

Le chiffre d'affaires s'en ressent: à 18,5 milliards d'euros, il a baissé de 39% sur le semestre, de 48% pour la seule division Avions commerciau­x, à 12,5 milliards d'euros.

Conséquenc­e, l'avionneur européen enregistre une perte opérationn­elle de 1,6 milliard d'euros, pâtissant notamment d'une charge de 332 millions d'euros liée à la fin du programme du grosporteu­r A380 en 2021. Le groupe a en outre enregistré 900 millions d'euros de charges sur son résultat opérationn­el à cause du Covid-19.

"VISIBILITÉ LIMITÉE"

Sa trésorerie a fondu de 12,4 milliards d'euros, dont 3,6 milliards pour le paiement d'amendes en France, au Royaume-Uni et aux États-Unis à l'issue d'un accord conclu en janvier dans des affaires de corruption. "Notre ambition est de ne pas consommer de liquidités" au second semestre, avance Guillaume Faury.

Pour s'adapter à une reprise du trafic aérien qui ne devrait retrouver son niveau de 2019 qu'entre 2023 et 2025, l'avionneur a baissé ses cadences de production de 40% par rapport à ce qu'il prévoyait avant-crise, avec 40 Airbus A320 produits par mois (contre 60 en 2019), 4 A220 et 2 A330. L'avionneur effectue toutefois "un petit ajustement de la cadence de production de l'A350 de 6 à 5 appareils par mois".

Airbus produisait avant-crise 9 à 10 long-courriers A350 par mois, ce qui lui permettait d'atteindre l'équilibre sur ce programme.

Et malgré l'appel de responsabl­es locaux mercredi à maintenir le projet d'ouverture d'une nouvelle ligne d'assemblage pour l'A321 à Toulouse, Airbus maintient le gel du projet.

"Nous ne pouvons pas investir dans une nouvelle installati­on de production alors que [...] nous n'avons pas l'activité pour la remplir", justifie l'avionneur.

Pour s'adapter à la crise, Airbus taille dans les dépenses d'investisse­ments, revoit les dépenses de R&D à la baisse tout en "préservant les projets stratégiqu­es" et a annoncé la suppressio­n de 15.000 postes dans le monde, soit 11% de ses effectifs, dont 5.000 en France.

Lire aussi : Airbus: plus de 3.500 postes supprimés à Toulouse, FO craint "un cataclysme social"

Il estime la provision nécessaire pour financer ces mesures sociales entre 1,2 et 1,6 milliard d'euros.

"C'est une situation difficile et incertaine", a résumé Guillaume Faury lors d'une conférence téléphoniq­ue. "Mais avec les décisions que nous avons prises et maintenant mises en oeuvre, nous pensons être bien placés pour traverser cette période difficile dans notre industrie".

Lire aussi : Airbus va prendre des "décisions difficiles", "amères", "mais nécessaire­s pour protéger son avenir" (Guillaume Faury, CEO)

En raison d'une "visibilité limitée", notamment sur la reprise des livraisons, le groupe renonce à émettre des prévisions pour 2020.

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