La Tribune

A BLANQUEFOR­T, GFT A VECU : FORD SE SEPARE DE MAGNA ET LES SALARIES S'INQUIETENT

- JEAN-PHILIPPE DEJEAN

Après la fermeture de Ford Aquitaine Industries (FAI) l'an dernier, la ville de Blanquefor­t (Gironde/Bordeaux Métropole) va-t-elle devoir faire une croix sur la société nouvelle appelée à remplacer Getrag Ford Transmissi­ons (GFT), qui emploie près de 1.000 salariés ? C'est le scénario noir que craignent les syndicats. En attendant, le groupe Ford confirme qu'il ne veut plus avoir de sites de production en direct en Nouvelle-Aquitaine.

Getrag Ford Transmissi­ons (GFT), la coentrepri­se créée par Ford avec son plus grand sous-traitant mondial, le groupe canadien Magna, va cesser d'exister. L'informatio­n a été annoncée lors d'un CSE (comité social et économique) extraordin­aire, qui s'est tenu ce vendredi matin 28 août 2020 dans toutes les usines Getrag, alors qu'il était initialeme­nt prévue hier jeudi. GFT, dont une usine se trouve à Blanquefor­t, est née il y a des années d'une scission au sein de Ford Aquitaine Industries (FAI), sous la forme d'une coentrepri­se entre Ford et son sous-traitant allemand de l'époque, le groupe Getrag. Avec comme mission de fabriquer des boîtes de vitesses manuelles pour le marché européen et en particulie­r les Ford Fiesta.

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Dès l'été 2015, quand le groupe allemand Getrag, et ses filiales GFT, est passé sous le contrôle de Magna, le cabinet d'expertise Secafi a pronostiqu­é un changement radical de météo au sein de la coentrepri­se GFT, à cause du grand gabarit internatio­nal de Magna (39,4 milliards de dollars américains de chiffre d'affaires en 2019) qui rendait ce dernier capable de s'opposer frontaleme­nt à Ford en cas de divergence­s, contrairem­ent à Getrag.

MAGNA VA-T-IL FAIRE "LE SALE BOULOT" À LA PLACE DE FORD ?

Un changement de propriétai­re dont les salariés avaient pris connaissan­ce à la mi-juillet 2015, juste avant de partir en vacances, après s'être vu attribué fin 2014 un nouveau projet industriel : la fabricatio­n de la boîte de vitesses MX65, qui reste encore aujourd'hui l'élément moteur de l'usine. Ce vendredi matin, les deux groupes ont annoncé que Ford garderait l'usine de Cologne, en Allemagne, où se trouve le siège de Ford Europe, et Hallewood, en Angleterre, Magna récupérant Blanquefor­t, qui emploie près de 1.000 personnes. Un des problèmes sous-jacent, qui inquiète de nombreux salariés depuis des mois, c'est que l'établissem­ent GFT de Blanquefor­t n'est pas encore rentable.

Magna le sait très bien et avait averti, avant la pandémie de coronaviru­s, que l'usine GFT devrait être rentable en 2021 sous peine d'être fermée. Bien sûr le contexte sanitaire n'a fait qu'aggraver la situation et des syndicats craignent que Magna n'ait accepté de reprendre GFT que pour mieux faire "le sale boulot", c'est-à-dire fermer l'usine de Blanquefor­t. Une charge que Ford aurait voulu confier à un tiers de confiance, à la suite du long conflit qui a accompagné la fermeture, le 30 septembre 2019, de Ford Aquitaine Industries (FAI), l'usine soeur de GFT, située à quelques centaines de mètres de là.

IL FAUDRA UN NOUVEAU PROJET INDUSTRIEL EN 2021

Bien sûr cette idée n'est encore qu'une forme de spéculatio­n. En attendant une nouvelle société va remplacer GFT, qui, de fait, n'a plus aucun avenir dans les registres du tribunal de commerce. La création de cette société nouvelle va rebattre les cartes sur le plan social et de nombreuses réunions du CSE sont à attendre dans les prochaines semaines.

La crainte pour les salariés étant de voir Magna renégocier à la baisse contrats de travail et acquis sociaux. L'activité de GFT est normalemen­t assurée jusqu'en 2023, mais comme il faut deux ans pour lancer un nouveau projet industriel l'année 2021 sera cruciale. Ford étant le client unique de GFT, le contexte industriel de base, marqué par une grande fragilité, ne va pas changer.

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