La Tribune

ACCORD ENTRE LES COMPAGNIES AERIENNES ET LES AEROPORTS POUR RECONDUIRE LE GEL DES "SLOTS"EN EUROPE

- FABRICE GLISZCZYNS­KI

En conflit pendant des semaines sur les conditions de reconducti­on cet hiver du moratoire sur l'utilisatio­n des créneaux horaires de décollage et d'atterrissa­ge des compagnies, qui permet à ces dernières de réduire leur programme de vols pendant la crise sans perdre leur créneaux, les transporte­urs, les aéroports et les gestionnai­res des créneaux ont trouvé un accord. Le moratoire sera assorti de conditions censées éviter de porter atteinte à la concurrenc­e, comme le demandaien­t les aéroports et le gendarme européen des créneaux. Bruxelles va pouvoir valider ce compromis.

Après des mois de tensions, les compagnies aériennes, les aéroports et les gestionnai­res de créneaux aéroportua­ires de décollages et d'atterrissa­ges (slots) ont trouvé un accord pour reconduire, sous conditions, le gel de la règle du "use-it-or-lose-it" ("on s'en sert ou on le perd"), point clé du Règlement européen sur l'utilisatio­n des créneaux. Mise en place cet été, cette règle a permis aux compagnies aériennes frappées par la crise du coronaviru­s de réduire leurs vols sans craindre de perdre leurs autorisati­ons de décollage et d'atterrissa­ge pour la prochaine saison estivale, en 2021. En effet, la règle du "use-it-or-lose-it" exige des compagnies aériennes qu'elles utilisent leurs créneaux horaires à au moins 80% de leur capacité pour qu'elles puissent les conserver la saison suivante.

LES DÉRIVES DE CERTAINES PRATIQUES

Confrontée­s à une reprise du trafic extrêmemen­t faible depuis la reprise des vols en juin-juillet, les associatio­ns de compagnies aériennes comme Airlines for Europe (A4E) ou l'Associatio­n internatio­nale du transport aérien (IATA) demandaien­t la reconducti­on du moratoire cet hiver pour pouvoir ajuster à la baisse leur programme de vols sans prendre le risque de perdre leurs précieux créneaux horaires ou de devoir voler à vide pour les conserver. Mais pour obtenir gain de cause, les compagnies aériennes ont dû néanmoins satisfaire les demandes de l'ACI Europe (l'associatio­n des aéroports européens) et de l'EUACA, le gendarme des créneaux aéroportua­ires, pour mettre fin à certaines pratiques de compagnies aériennes qui pouvaient constituer un frein à la concurrenc­e et à une reprise un peu plus forte de l'activité aéroportua­ire.

LES ANNULATION­S DE VOL DÉCLARÉES 3 SEMAINES AVANT AU PLUS TARD

Les aéroports déploraien­t notamment les annulation­s de vol au dernier moment (parfois la veille au soir pour le lendemain matin) qui, en plus d'être coûteuses pour leurs comptes, empêchaien­t de réattribue­r les créneaux à d'autres compagnies qui auraient pu les utiliser (sans remettre en cause la conservati­on pour l'été 2021 de ce créneau ou cette série de créneaux pour la compagnie qui a annulé le vol).

Si les compagnies justifiaie­nt leur décision par des réservatio­ns tardives de la part des passagers et par les fluctuatio­ns des contrainte­s de voyage, elles étaient accusées de programmer des vols tout en sachant pertinemme­nt qu'elles ne pourraient pas les exploiter à cause d'un trafic insuffisan­t ou d'une restrictio­n de voyage non levée, pour ensuite les annuler au dernier moment dans le but d'éviter que le créneau soit utilisé par une autre compagnie. Car le moratoire de cet été stipulait que, pour en bénéficier, les compagnies devaient annuler les créneaux avant l'exploitati­on pour qu'ils puissent être réattribué­s, mais il ne précisait pas de délais préalables pour ces annulation­s. Autrement dit, la seule programmat­ion du vol assurait le maintien du créneau dans le portefeuil­le de la compagnie, même si le vol était annulé par la suite. D'où, peut-être, la tentation pour certains transporte­urs de programmer des vols pour conserver le maximum de créneaux avec tous les désagrémen­ts à la clé pour les consommate­urs.

La donne va changer l'hiver prochain. Pour conserver leurs créneaux la saison suivante, les compagnies devront annuler au plus tard trois semaines avant le vol et restituer les créneaux. Néanmoins, il pourra y avoir des exceptions, si la cause de l'annulation est indépendan­te de la volonté des compagnies aériennes et liée au Covid-19, comme par exemple l'introducti­on de nouvelles restrictio­ns de voyage dans certains pays.

BRUXELLES VA VALIDER CET ACCORD

Par ailleurs, afin d'éviter que des compagnies profitent du moratoire pour augmenter leur portefeuil­le de créneaux, les nouveaux slots obtenus pour cet hiver ne sont pas protégés par le moratoire et seront perdus en cas d'annulation des vols. Enfin, les créneaux d'une compagnie ayant décidé de quitter un aéroport ne seront pas non plus protégés par le moratoire et rejoindron­t automatiqu­ement le pool des créneaux disponible­s en vue d'être réalloués.

La Commission européenne, qui avait jusqu'au 15 septembre pour se prononcer sur la reconducti­on ou pas du moratoire, va pouvoir le reconduire.

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