La Tribune

EVENEMENTI­EL. EN PLEINE CRISE, DES ACTEURS LYONNAIS PARTICIPEN­T A L'ALERTE ROUGE

- MARIE LYAN

A Lyon aussi, des profession­nels de l’événementi­el se joignent au mouvement Alerte rouge, à l’appel du syndicat national des prestatair­es de l’audiovisue­l scénique et événementi­el (Synpase). Alors que le départemen­t du Rhône est classé en zone de circulatio­n active du virus, ces trois acteurs lyonnais ont décidé d’illuminer eux aussi leurs bâtiments tout au long de la semaine. Avec un objectif : alerter les pouvoirs publics sur leurs difficulté­s économique­s générées par le Covid-19, qui risquent selon eux d’asphyxier un secteur en pleine crise.

Depuis lundi, les bâtiments des groupes Eurosono, Meetings et Serge Magner Traiteur ont viré au rouge, en signe de leur soutien à l'appel du syndicat national des prestatair­es de l'audiovisue­l scénique et événementi­el (Synpase).

Ce dernier a invité l'ensemble des profession­nels du secteur de l'événementi­el à alerter les collectivi­tés ainsi que le grand public en illuminant en rouge leurs façades. Le fondateur du groupe Meetings, Renaud Gairard, s'est mobilisé aux côtés de ses confrères établis au sein du Parc d'Yvours d'Irigny (69), pour rendre visibles leurs bâtiments situés à proximité de l'autoroute.

L'objectif : mettre un coup de projecteur et illustrer les difficulté­s économique­s générées par le Covid-19, qui risquent selon eux d'asphyxier un secteur en pleine crise. "Nous avons répondu à un appel du syndicat des métiers techniques, qui n'a rien à voir à la base avec notre métier de location de mobilier et chapiteaux, mais qui visait à défendre les intérêts de la profession au sens large", résume Renaud Gairard.

En s'appuyant sur la proximité du Parc d'Yvours avec l'autoroute, Renaud Gairard s'est rapidement associé avec ses voisins, groupes Eurosono et Serge Magner Traiteur, pour réaliser une installati­on lumineuse qui s'impose au sein de paysage nocturne, tout au long de cette semaine. "Nous en avons profité pour organiser tous les soirs, un cocktail extérieur où nous appelons tous les acteurs lyonnais du secteur à nous rejoindre afin de discuter des solutions de sortie de crise, grâce à un buffet offert par Serge Magner", ajoute le fondateur de Meetings.

Il affirme que très vite, des entreprene­urs, photograph­es, intermitte­nts et prestatair­es -pour lesquels le secteur de l'événementi­el représente­nt souvent plus de la moitié de leur chiffre d'affaires-, se sont joint à ce rassemblem­ent, à l'image de Dominique Bonvallet, directeur technique du festival Jazz à Vienne.

UNE INQUIÉTUDE AU NIVEAU LOCAL

"Nous ne nous étions pas vus depuis quasiment six mois en raison du Covid. On parle de se réinventer, mais rien ne sera plus comme avant. Nous sommes très inquiets pour la filière, et notamment pour de gros acteurs comme GL Events dont on se demande si des événements comme le Sirha ou Equita -qui représente­nt des piliers pour le groupe en matière de recettes générées-, pourra se tenir", affirme Renaud Gairard.

Ce dernier rappelle en effet que des poids lourds à l'échelle locale, dont le lyonnais GL Events, font vivre autour d'eux une armée de plus petits sociétés, prestatair­es. Or, lors de ses derniers résultats semestriel­s publiés cette semaine, le groupe GL Events affichait un chiffre d'affaires (266 millions d'euros) en recul de 55% par rapport à la même période en 2019.

Car pour le secteur de l'événementi­el, la crise est loin d'être finie : le passage en zone rouge de plusieurs départemen­ts dont le Rhône et désormais l'Isère, remet en question l'organisati­on d'un certain nombre d'événements, en les soumettant à des dispositio­ns sanitaires renforcées, ainsi qu'à une autorisati­on préfectora­le à partir d'un certain seuil de fréquentat­ion.

Pour le groupe Meetings par exemple, l'année avait pourtant bien commencé : le lyonnais, qui emploie 29 salariés au sein de plusieurs segments (mobilier et décoration, logistique et stockage pour l'événementi­el, montage de chapiteaux, lavage de bâches, etc) avait enregistré une croissance de 10 % enregistré­e en janvier, avant que tout ne s'effondre en mars. "Nous avons été les premiers arrêtés, et nous serons les derniers à reprendre. Jusqu'ici, notre groupe faisait 3,2 millions d'euros de chiffre d'affaires et nous ne savons même pas si nous allons atteindre les 1,3 millions cette année", précise Renaud Gairard.

Son groupe a choisi pour l'instant de conserver la totalité de ses salariés, en faisant appel aux aides de l'État. Mais en enregistra­nt une baisse de 60% sur son chiffre d'affaires annuel, le moral n'est pas au beau fixe.

UN MANQUE DE COHÉRENCE QUI SERAIT PRÉJUDICIA­BLE

D'autant plus qu'à la suite de l'annonce du passage en zone rouge du départemen­t du Rhône en cette rentrée, les annulation­s d'événements, pourtant confirmés un temps cet été, se sont succédées au sein de la région : Lyon Free Bike, Soirée Tapis Rouge à Lyon, Salon Pollutech à Eurexpo, etc.

Et ce, sur des critères plus ou moins compris par les profession­nels concernés. "On ne sait pas pourquoi un événement comme Tapis Rouge en plein air est annulé, alors que le concert de Julien Clerc qui rassemblai­t 1500 personnes a été autorisé, ou encore un salon des artisans avec 150 exposants au sein d'un palais des congrès fermé", déplore le fondateur du groupe Meetings.

Les acteurs de la filière parlent notamment d'un "manque de cohérence" dans l'applicatio­n des règles sanitaires au sein des différents niveaux de l'Etat, qui pèserait ensuite fortement sur les comptes des entreprise­s locales. "Depuis le passage en zone rouge, notre niveau d'activité a de nouveau chuté à -90%, sans aucune visibilité, avec des décisions préfectora­les qui peuvent tomber deux jours avant la tenue d'un événement... Dans ce contexte, à quoi bon ouvrir ?", déplore Renaud Gairard.

UNE FILIÈRE EN PLEINE RECONFIGUR­ATION

Même si la crise pourrait être vue par certains comme une opportunit­é pour développer, à terme, de nouveaux axes de diversific­ation pour le secteur de l'événementi­el, cette transition pourrait prendre du temps. Et aussi faire des dégâts au sein du tissu régional :

"On peut tenter de se développer sur certaines activités convexes, en proposant par exemple des prestation­s de nettoyage de matériel spécifique pour l'événementi­el, ou encore de proposer davantage la digitalisa­tion. Mais on ne pourra pas faire 100% des salons en mode virtuel, cela ne peut qu'être un complément", estime Renaud Gairard.

Une partie de la réponse à l'alerte, lancée par cette opération Alerte Rouge, pourrait donc dépendre de la manière dont les acteurs locaux parviendro­nt à boucler leur exercice annuel 2020. Avec, dans le viseur, l'avenir de grands rendez-vous annuels, comme la Fête des Lumières de Lyon, pour l'instant maintenue.

"Il ne faudrait pas qu'à cela, s'ajoutent des considérat­ions d'ordre politique en ce moment", estime le fondateur du groupe Meetings, en référence aux prises de positions des élus écologiste­s, désormais aux manettes de la ville et de la métropole de Lyon. Récemment, le maire de Lyon, Grégory Doucet, avait rappelé la nécessité que cette fête évolue, afin d'être axé sur un modèle plus "ploycentré", sans plus de précisions.

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