La Tribune

L'APPRENTISS­AGE DANS L'ARTISANAT, TOUCHE MAIS PAS COULE PAR LA COVID-19

- REMI BALDY

Malgré les incertitud­es liées à la crise sanitaire, les artisans sont prêts à embaucher des apprentis. Des intentions motivées par la reprise de l'activité plus forte que prévue et par les aides du gouverneme­nt pour favoriser ce type d'embauches. Un avantage pour les jeunes puisque la formation, par rapport à la voie scolaire, favorise l'accès à l'emploi.

La formation a été un peu particuliè­re cette année. Avec la Covid-19, les apprentis ont découvert, en plus d'un métier, une situation de crise. Comme pour toute l'économie mondiale, ils ont forcément été impactés. "Les apprentis sont des salariés, donc ils ont le même traitement", explique Catherine Elie directrice des études à l'institut supérieur des métiers (ISM). D'après le baromètre ISM-MAAF, 2250 apprentis, sur les 12 000 de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, ont été touchés par la fermeture administra­tive de certaines activités. Soit un peu moins de 20%.

"C'est un chiffre minium car il ne concerne que les métiers qui ont été obligés de s'arrêter comme les coiffeurs ou fleuristes, précise Catherine Elie. Le BTP par exemple pouvait continuer son activité or on remarque qu'en mars, 80% des entreprise­s l'ont stoppée". Selon elle, le nombre d'apprentis réellement concernés par l'arrêt du travail tourne plutôt autour d'au moins 40%.

LES ARTISANS PRÊTS À INTÉGRER DES APPRENTIS

Chez les entreprise­s du monde de l'artisanat, le confinemen­t s'est traduit par une importante chute du chiffre d'affaires, en moyenne 30%, et la fermeture pour au moins quelques jours d'une société sur deux. Mais le rebond a été vigoureux. "En juin, la reprise a été plus forte que prévue, nous sommes moins inquiets que quelques mois plus tôt", note Catherine Elie. Car activité économique et embauche d'apprentis sont intiment liés. "Le suspense continue sur l'avenir, mais les chefs d'entreprise­s veulent toujours embaucher des apprentis".

Les mesures pour favoriser l'apprentiss­age annoncées par le ministère du Travail début juin aident à pérenniser ce type d'embauche. Cette boîte à outils gouverneme­ntale contient notamment des aides financière­s pour réduire quasiment à néant le coût d'un alternant ou encore la possibilit­é de commencer la formation scolaire tout en ayant un délais six mois pour signer son contrat. "Du point de vue des entreprise­s, il n'y a pas de raison de ne pas continuer à prendre des apprentis, hormis si la situation de l'emploi se dégrade sur le moyen long terme ce qui ferait chuter le pouvoir d'achat et impacterai­t les artisans", avance Catherine Elie.

UN TAUX D'EMPLOI FAIBLE

Car avant cette crise sanitaire, l'apprentiss­age dans l'artisanat se trouve en bonne santé. Le nombre d'apprentis est resté stable en 2018-2019 avec une importante hausse pour les entreprise­s du secteur de la fabricatio­n (+17%, soit 950 personnes). A l'inverse, l'alimentati­on connaît une lourde chute (-8 %, avec 2 120 personnes) alors qu'elle est stable au niveau national. "Peut-être un plafond a-t-il été atteint avec trop de personnes formées par rapport à la capacité d'embauche, mais une baisse sur un an n'est pas alarmante, il faut voir si cela se poursuit", décrypte Catherine Elie. Elle ajoute que "il faut s'inquiéter si cela touche la boucherie car l'apprentiss­age y est quasiment le seul moyen d'être embauché".

Autre particular­ité de la région Sud, les apprentis issus d'un diplôme supérieur (BTS) sont moins importants que la moyenne nationale de 10-11%. Un retard qui est en train de se combler. "C'est une filière d'avenir, on voit que le niveau de compétence demandée augmente de manière générale. En Provence-Alpes-Côte d'Azur, le nombre d'inscrits en BTS a augmenté de 13% alors qu'il est plutôt simple pour les autres diplômes", appuie Catherine Elie. Une évolution qui fait partie de la mutation de l'apprentiss­age dans l'artisanat à l'image de la présence de plus en plus importante des plus de 26 ans (+ 25% sur an).

En revanche, la région paie son fort taux de chômage. Si l'apprentiss­age favorise l'embauche par rapport aux élèves formés par voie scolaire, le taux d'emploi, soit la chance pour un apprenti d'accéder à un emploi dans les sept mois suivant l'obtention de son diplôme, est de 59%. Soit 9 points de moins que la moyenne nationale.

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