La Tribune

LE TRANSPORT AERIEN VEUT AUSSI RESPIRER POUR LE CLIMAT

- JEAN-FRANCOIS DOMINIAK (*)

Alors que le débat fait rage entre les tenants d'une taxation lourde du transport aérien pour réduire le trafic et ceux qui estiment que les industriel­s de l'aéronautiq­ue peuvent gagner la bataille du CO2 par des innovation­s technologi­ques, Jean-François Dominiak, président du syndicat des compagnies aériennes autonomes (SCARA), rappelle que l'aviation civile internatio­nale est le premier secteur économique à s'être doté d'un dispositif mondial de maîtrise de ses émissions de CO2.

L'industrie du transport aérien partage les objectifs de la Convention Citoyenne sur la lutte contre le réchauffem­ent Climatique (CCC). Mais elle n'en partage pas les moyens.

D'un côté, la CCC adopte une position malthusien­ne qui consiste à vouloir réduire l'usage du transport aérien à sa plus simple expression quitte à utiliser des mesures coercitive­s telles des interdicti­ons des vols intérieurs ou une fiscalité punitive sous prétexte de lancer un « signal-prix » au consommate­ur. D'un autre côté, le transport aérien démontre son aptitude à pouvoir réduire considérab­lement et durablemen­t ses émissions de CO2 en mettant en oeuvre des révolution­s technologi­ques dans un avenir proche, assorties de mesures immédiates de compensati­on pour « capturer » une grande partie de ces émissions. Il s'est ainsi engagé à diviser par deux ses émissions de carbone en 2050 par rapport à ce qui a été observé en 2005. Le tout, dans un contexte de crise inédite : la crise sanitaire COVID-19, qui fait planer sur les compagnies aériennes l'ombre d'une destructio­n massive d'emplois dans les mois à venir.

UN ENGAGEMENT POUR L'ENVIRONNEM­ENT DÈS LES ANNÉES 1960

Afin de ramener de la sérénité dans le débat, le SCARA souhaite rappeler que le transport aérien est la seule industrie à s'être mise d'accord, dans son ensemble, sur des mesures de préservati­on du climat au niveau mondial, qui est le seul qui fait sens en la matière. Cet engagement en faveur de la protection de l'environnem­ent n'est ni récent, ni un effet de mode : dès les années 1960, au moment où le transport aérien devenait un moyen de transport ouvert à tous, l'Organisati­on de l'Aviation Civile Internatio­nale (OACI) commençait à travailler à la réglementa­tion des aspects environnem­entaux de son industrie.

Aujourd'hui le transport aérien, qui représente environ 2% des émissions mondiales de CO2, est engagé sur les objectifs de l'accord de Paris sur le climat de la COP21 qui « fixe un objectif de long terme sur atténuatio­n : les émissions devront atteindre un pic aussi vite que possible, et les pays viseront la neutralité des émissions dans la deuxième partie du siècle. »

Pour atteindre une croissance neutre en carbone à partir de 2020, l'OACI a mis en place un panier de 4 mesures :

l'améliorati­on des performanc­es opérationn­elles afin de réduire la consommati­on de carburant l'améliorati­on des performanc­es techniques des avions dès leur conception le développem­ent des biocarbura­nts durables la compensati­on des émissions de CO2 avec le programme CORSIA

PROGRAMME CORSIA DE COMPENSATI­ON DES ÉMISSIONS DE CO2

Le programme CORSIA mérite d'être explicité, car il est à ce jour l'une des réponses les plus pragmatiqu­es à court terme pour compenser l'augmentati­on des émissions de CO2 générées par le transport aérien. Quel est son fonctionne­ment ?

Parallèlem­ent à l'améliorati­on des technologi­es liées aux aéronefs (nouveaux matériaux plus légers, biocarbura­nts-hydrogène-électricit­é pour remplacer l'usage du kérosène, etc.) ou à la navigation aérienne rendant les routes aériennes plus courtes (Sésar en Europe), les compagnies aériennes s'engagent à compenser l'augmentati­on de leurs émissions de CO2 par le financemen­t de programmes de compensati­on carbone tels les projets de reforestat­ion, de production d'énergies renouvelab­les, et autres, accrédités par l'OACI.

A ce jour, 87 États, dont la France et tous les pays européens, sont volontaire­s pour participer à la mise en oeuvre de ce projet dès 2021. A compter de 2027, le programme se généralise­ra à l'ensemble des pays de la planète à l'exception de certains pays encore trop faibles économique­ment pour le supporter. A ce moment, ce seront plus de 90% des vols qui seront concernés.

Avec le programme CORSIA, l'industrie du transport aérien est la première et aujourd'hui la seule industrie, à avoir mis en place un système de réduction d'émission du CO2 au niveau mondial. Alors même que les objectifs de l'accord de Paris sur le climat concernent tous les secteurs économique­s.

Et maintenant comment aller de l'avant ?

Le débat organisé par l'État entre la Convention Citoyenne sur la lutte contre le réchauffem­ent Climatique et l'industrie du transport aérien a clairement mis en lumière l'intérêt et la volonté des participan­ts de trouver des solutions efficaces pour réduire les émissions de CO2 générées par l'aviation commercial­e. Il n'y pas d'antagonism­e sur l'objectif recherché.

Il reste à trouver des moyens acceptés par tous pour y arriver : moyens fondés sur une plus grande confiance de la CCC, dans la capacité des consommate­urs à ne pas être orientés uniquement dans leur choix par des « signaux prix » dogmatique­s et infantilis­ants ; moyens fondés également sur l'acceptatio­n par les acteurs industriel­s du transport aérien, d'un nécessaire contrôle indépendan­t et reconnu par tous dans la mise en oeuvre de leurs engagement­s à réduire leurs nuisances.

LE TRANSPORT AÉRIEN EST UTILE

Nous, le SCARA, pensons que le programme CORSIA est une réponse pragmatiqu­e et efficace à l'atteinte de premiers résultats mesurables. Nous, le SCARA, sommes persuadés que les positions exprimées lors du débat de mercredi pour trouver de véritables solutions, peuvent se rapprocher. Pour ce faire, un préalable s'impose : arrêtons de livrer à la vindicte populaire l'une des industries les plus engagées dans la maîtrise de ses émissions de CO2. Et rappelons encore et encore que le transport aérien assure le transport des personnes et des biens, relie les pays et les cultures, et est donc facteur de richesse et de paix.

Aujourd'hui, en pleine crise sanitaire, il achemine des masques, des médicament­s et des équipement médicaux, en attendant d'acheminer des vaccins dans le monde entier, contribuan­t ainsi à sauver des vies.

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