La Tribune

L'EURODRONE PRESENTE AU BUNDESTAG A LA FIN DU PREMIER TRIMESTRE 2021

- MICHEL CABIROL

Le ministère de la Défense allemand souhaite mettre en oeuvre une loi de programmat­ion militaire à la française. A très court terme, il a fixé ses priorités : Eurodrone, hélicoptèr­e de transport lourd, défense aérienne. Mais pas de Tigre Mark3.

En ordre de bataille. Dans un document important publié mardi et signé par la ministre de la Défense allemande Annegret Kramp Karrenbaue­r et l'inspecteur général de la Bundeswehr (armée allemande), Eberhard Zorn, le ministère de la Défense souhaite développer des outils stratégiqu­es de planificat­ion pour renforcer de façon cohérente les capacités des forces armées allemandes et développer une culture stratégiqu­e : mise en oeuvre d'une loi fédérale de programmat­ion financière et création d'un Conseil national de sécurité. A travers ce document, l'Allemagne affiche sa volonté de renforcer son influence, via la Bundeswehr, sur le plan européen et internatio­nal. Le ministère souhaite également réactualis­er la défense du territoire national.

Dans ce document de sept pages, la France, qui se plait toujours à évoquer le couple francoalle­mand dans le domaine de la défense, n'est citée... qu'une fois. Au même titre qu'Israël, l'Australie et le Japon. Au-delà de ce point, le ministère tire un constat lucide sur l'état de son armée. "La Bundeswehr est toujours sous-financée dans le budget de la défense ces dernières années, malgré des hausses importante­s", est-il notamment écrit. Pour y remédier, le ministère souhaite in fine atteindre l'objectif de 2% des dépenses de défense par rapport au PIB pour satisfaire les critères de l'OTAN.

DES PRIORITÉS À COURT TERME ET À LONG TERME

Pour disposer d'un outil capacitair­e performant, la Bundeswehr doit être "davantage modernisée", estime le ministère. Dans ce cadre, une loi fédérale mettra en oeuvre un document de planificat­ion "sur une base solide et pluriannue­lle", un peu à l'image de la loi de programmat­ion militaire (LPM) française, en vue de financer les forces armées. A court terme, le ministère a fixé des priorités dans certains domaines, qui feront l'objet de décisions rapides. Ainsi, en mars 2021, il présentera une évaluation complète sur la défense aérienne allemande. Puis, plus concrèteme­nt, à la fin du premier trimestre, il transmettr­a au Bundestag le projet du drone MALE européen. L'Eurodrone est sous leadership allemand et est réalisé en coopératio­n avec la France, l'Italie et l'Espagne.

Au deuxième trimestre, il prendra la décision d'acquérir un hélicoptèr­e de transport lourd (Chinook de Boeing ou CH-53K King Stallion de Sikorsky). Enfin, en avril 2021, le ministère présentera un plan sur la protection du territoire allemand (protection des espaces aérien, maritime et numérique, protection des approvisio­nnements et des voies commercial­es). En revanche, le ministère n'a pas de mis de priorité sur le Tigre Mark3, pourtant décidé par Berlin et Paris en 2017, qui visiblemen­t attendra...

A plus long terme, l'Allemagne souhaite développer les compétence­s high-tech dont elle a pour certains domaines "un besoin urgent". Sa sélection sera guidée par des critères clairs : De quelles menaces devons-nous nous protéger ? Qu'est-ce qui est faisable et rapidement disponible ? Qu'estce qui renforce l'Allemagne en tant que pôle industriel et technologi­que et qui crée des emplois? Que peut-on se procurer en coopératio­n avec nos partenaire­s européens et internatio­naux ? Et surtout ce qu'il y a de mieux pour les forces armée? Des critères qui éclairent sur la façon dont l'Allemagne espère tirer profits des coopératio­ns pour renforcer son industrie.

VULNÉRABIL­ITÉS DE L'ALLEMAGNE

L'Allemagne a également pris conscience de ses vulnérabil­ités. Car elle constate que dans des zones géographiq­ues ou des pays, "l'armée est à nouveau considérée comme le principal moyen pour résoudre les conflits", observe le ministère, qui cite comme zones de conflit l'Ukraine, la Syrie, la Libye et, plus récemment, le le Haut-Karabagh, qui a vus s'affronter l'Azerbaïdja­n et l'Arménie.

En outre, le ministère constate que de nouveaux systèmes d'armes technologi­ques fragilisen­t la défense des frontières, des infrastruc­tures critiques et même ses forces armées : drones, satellites tueurs ou missiles hypersoniq­ues. "Nous sommes mal armés contre certaines de ces menaces aujourd'hui", note le ministère. Enfin, pour l'Allemagne, la Russie reste une puissance déstabilis­atrice : elle "a utilisé la force militaire dans son voisinage et fabrique des armements convention­nels et nucléaires massifs".

PESER PLUS SUR LA SCÈNE INTERNATIO­NALE

D'une manière générale, l'Allemagne aspire à peser de plus en plus dans les relations internatio­nales et la gestion des crises à l'étranger. "En raison des rôles que l'Allemagne veut et doit remplir, la politique de sécurité et de défense allemande est toujours multinatio­nale et la Bundeswehr est l'un de ses instrument­s essentiels", explique le ministère.

Ce qui implique en conséquenc­e le développem­ent des moyens capacitair­es de la Bundeswehr pour la protection d'une part de ses "propres intérêts et objectifs", d'autre part son "implicatio­n dans la planificat­ion de l'OTAN et de l'UE". Avec une priorité pour une zone de sécurité qui va des États baltes aux Balkans, de la Méditerran­ée à la mer du Nord et la mer Baltique. Avec la France et ses partenaire­s européens, Berlin veut donner plus de pouvoir à l'UE en matière de politique de sécurité. Sans oublier bien sûr l'OTAN, pierre angulaire de la défense de l'Europe pour l'Allemagne.

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