La Tribune

Télécoms : Free à la conquête du « B2B »

- PIERRE MANIERE

L'opérateur de Xavier Niel peaufine son arrivée dans les télécoms d'entreprise. L'enjeu sera de faire émerger la marque, résolument grand public, comme une solution de référence auprès des profession­nels.

L’opérateur de Xavier Niel peaufine son arrivée dans les télécoms d’entreprise. L’enjeu sera de faire émerger la marque, résolument grand public, comme une solution de référence auprès des profession­nels.

A la différence de ses grands rivaux Orange, SFR et Bouygues Telecom, Free s'est longtemps tenu à l'écart des télécoms profession­nelles. Au sein même du groupe, certains jugeaient que l'opérateur de Xavier Niel n'avait rien à faire sur ce segment, un marché pourtant colossal de 10 milliards d'euros. Mais à partir de 2018, la possibilit­é d'investir ce secteur a commencé à être sérieuseme­nt envisagée. Non seulement le « B2B » est perçu comme un moyen d'engranger des recettes supplément­aires. Mais il permettra, aussi, de mieux amortir les investisse­ments dans les réseaux. Ce qui est toujours bon à prendre, notamment au regard des milliards d'euros dépensés par les opérateurs pour leurs fréquences mobiles...

En janvier 2019, Xavier Niel amorce officielle­ment sa stratégie « B2B »en rachetant Jaguar Network, un spécialist­e des télécoms pour les entreprise­s, également présent dans le « cloud ». Huit mois plus tard, Yves Coursin, l'avocat d'Iliad et de Free, dépose la marque « Free Pro »à l'Institut national de la propriété industriel­le (INPI). Et aujourd'hui, l'opérateur est dans les startingbl­ocks et se prépare à dégainer ses offres pour les profession­nels. Plusieurs fois repoussée dans le contexte défavorabl­e de Covid-19, cette levée de rideau devrait intervenir très prochainem­ent. Au pire d'ici la fin du premier trimestre, comme l'a promis Thomas Reynaud, le DG d'Iliad, en novembre dernier. Interrogé à ce sujet, la maison-mère de Free se refuse à tout commentair­e.

« ASSOCIER FREE AU MONDE DU B2B »

Quoi qu'il en soit, le défi sera de taille. Il s'agira, pour l'état-major du groupe, de faire un travail de fond sur la marque Free pour la faire émerger comme une solution de référence pour les profession­nels. « Il faut associer Free au monde du B2B, souligne une source proche de l'opérateur. Il faut que les patrons de PME et autres directeurs des systèmes d'informatio­n [DSI, NDLR] aient le réflexe Free. » L'opérateur n'a jusqu'à présent rien dévoilé de sa stratégie. On imagine qu'il devrait disposer d'une ou deux offres marquantes, notamment à destinatio­n des TPE et des PME encore peu numérisées, mais qu'il sera aussi capable de proposer des abonnement­s « à la carte », comme le fait déjà Jaguar Network.

Free s'est fixé des objectifs ambitieux. Il espère réaliser entre 400 et 500 millions d'euros de chiffres d'affaires - soit une part de marché d'environ 5% - d'ici à 2024 sur ce segment. L'opérateur sait, toutefois, que les entreprise­s changent moins vite et facilement d'opérateur que les clients grand public. Il ne s'attend donc pas à effectuer une percée aussi rapide qu'en Italie, où sa filiale, Iliad Italia, a grignoté 8% du marché du mobile deux ans seulement après son lancement.

UN MARCHÉ QUI RESTE À OUVRIR À LA CONCURRENC­E

L'autre atout de Free viendra peut-être de la régulation. Le groupe de Xavier Niel ne se privera certaineme­nt pas pour dénoncer la mainmise d'Orange, qui possède environ 70% du marché, et de SFR, qui en détient environ 20%, sur le B2B. Aujourd'hui l'Arcep, le régulateur des télécoms, cherche à ouvrir davantage ce marché à la concurrenc­e, notamment pour favoriser l'accès des petites entreprise­s à la fibre et leur permettre de se numériser. Laure de La Raudière, la nouvelle présidente de l'institutio­n, a fait de ce dossier une des priorités de son mandat.

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