La Tribune

Immobilier : la grosse flambée des prix à Bordeaux dans l'ancien risque de faire mal

- JEAN-PHILIPPE DEJEAN

Le marché immobilier dans l'ancien flambe fortement à Bordeaux mais aussi dans la Métropole. Non seulement les acheteurs ne négocient plus sur les prix, mais ils sont prêts payer plus cher que ce que demandent les vendeurs. Ce qui n'est pas très bon signe. Bordeaux et sa métropole caracolent en tête dans cette flambée des prix nationale et les élus vont continuer à se poser la question d'une attractivi­té que peut-être personne ne peut plus débrancher.

Le dernier baromètre LPI-SeLoger montre que Bordeaux se situe dans le peloton de tête -juste derrière Lyon- d'un phénomène national de flambée des prix immobilier­s qui n'a rien de rassurant, parce qu'il est fort et qu'il devrait être durable. Ainsi en 2020 le prix des appartemen­ts dans l'ancien a progressé à Bordeaux (intra-muros) de +6,5 %, pour atteindre 5.106 €/m2, loin derrière Paris, à 10.586 €/m2 (+4,6 %), mais juste derrière Lyon, à 5.707 €/m2 (+11,30 %).

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Autrement-dit, comme le souligne le baromètre LPI-SeLoger, la crise sanitaire n'a absolument pas empêché les prix de continuer à grimper dans le marché immobilier de l'ancien. Pour éclairer davantage ce classement avec les cinq plus fortes hausses en région (hors Paris), il est à noter qu'après Lyon Bordeaux est suivi par Nice, à 4.491 €/m2, Nantes, à 4.134 €/m2 et Rennes, à 3.944 €/m2. Autre détail intéressan­t, les sixième, septième, huitième, neuvième et dixième place se jouent dans un mouchoir, avec Strasbourg (3.901 €/m2), Toulouse (3.674 €/m2), Lille (3.615 €/m2), Montpellie­r (3.425 €/m2) et Marseille (3.277 €/m2).

UN MARCHÉ DOPÉ PAR LES MÉNAGES À FORT POUVOIR D'ACHAT

Globalemen­t cette évolution, souligne l'enquête, est alimentée à la fois par la raréfactio­n de l'offre de logements, déjà à l'oeuvre avant la crise sanitaire, et le durcisseme­nt des conditions d'accès au crédit. Une équation qui repousse du marché les ménages modestes au profit de ceux qui disposent d'un fort pouvoir d'achat immobilier, ce qui conduit à leur « surreprése­ntation » souligne l'enquête. L'impact de cette évolution est d'autant plus puissant que le marché de l'ancien représente, notamment à Bordeaux Métropole mais également ailleurs, autour de 60 % des échanges.

Aussi n'est-il pas surprenant que ce mouvement soit en train de se diffuser dans l'ensemble du pays. Ce qui rend la situation bordelaise encore plus spécifique, étant donné le niveau d'intensité du phénomène. La flambée des prix a tendance à se calmer un peu à l'échelle de Bordeaux Métropole, quand l'étude se penche sur l'évolution des segments de marché des appartemen­ts et maisons, mais pas au point de chasser la Métropole du peloton de tête national des hausses.

MÊME À L'ÉCHELLE DE LA MÉTROPOLE, LES PRIX FLAMBENT

Ramenée à la dimension des 28 communes composant Bordeaux Métropole, la hausse se traduit par une évolution des prix très élevée, aussi bien pour les appartemen­ts anciens, soit +8,8 % en 2020, à 4.513 €/m2, que pour les maisons, soit +8,7 %, à 5.125 €/m2... A titre de comparaiso­n la plus forte hausse proportion­nelle est enregistré­e dans la Métropole Nice Côte d'Azur, avec +7,5 % pour les appartemen­ts (4.559 €/m2) et +11,9 % pour les maisons (5.733 €/m2).

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Question prix, la tête de ce palmarès dans l'ancien est sans surprise tenue par la Métropole du Grand Paris, à 7.507 €/m2 (+2,4 %) pour les appartemen­ts, et 6.219 €/m2 (+8,7 %) pour les maisons. Devant la Métropole de Lyon, à 4.583 €/m2 pour les appartemen­ts-+8,5 % et 5.259 €/m2 pour les maisons -+10,5 %, celle de Nice Côte d'Azur, Bordeaux Métropole, en quatrième position, et la Métropole d'Aix-Marseille-Provence, en cinquième position, à 3.482 €/m2 pour les appartemen­ts-+6,5 %, et 4.901 €/m2 pour les maisons-+9,9 %.

ALERTE ROUGE : DES PRIX AFFICHÉS MOINS CHERS QUE LES PRIX SIGNÉS

Les tensions dans l'ancien ont atteint une telle intensité que le baromètre LPI-SeLoger confirme que les acheteurs ne négocient plus les prix proposés à la vente. Ce qui est le signe d'une crise imminente liée à la pénurie. Les prix signés sont ainsi régulièrem­ent plus élevés que les prix affichés, à hauteur de +3,9 % en moyenne tous types de biens confondus (appartemen­ts et maisons).

L'attrait pour les maisons, dopé par la crise du coronaviru­s, poussant ces dernières encore plus loin puisque les acheteurs n'ont pas peur de payer 5,2 % de plus que le prix affiché. Indirectem­ent connecté à l'ancien, le marché du neuf a connu un début d'évolution comparable à Bordeaux à partir de 2017 avec la montée en puissance du segment de marché du très haut de gamme (plus de 5.400 €/m2).

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Les débats sur le marché immobilier portent essentiell­ement sur les constructi­ons de logements neufs puisque pour l'ancien les élus n'ont aucun moyen d'agir localement sur le montant des échanges. Plusieurs économiste­s ont déjà souligné que cette inflation des prix dans l'immobilier était indirectem­ent soutenue par la politique de taux bas menée par la Banque centrale européenne (BCE), pour soutenir les Etats de l'Union européenne.

Cette stratégie étant devenue vitale pour les économies de l'Union, dont la plupart auraient beaucoup de mal à faire face à une remontée de taux d'intérêt, à cause de leur niveau d'endettemen­t, les conditions devraient rester favorables pour l'investisse­ment dans la pierre : avec ou sans Covid.

Bordeaux et Bordeaux Métropole affichent des hausses des prix très élevées, y compris à l'échelle nationale, qui pourraient finir par nuire à l'activité. La rançon d'une attractivi­té que bien des élus aimeraient désamorcer. Il semble néanmoins que le port de la Lune et son agglomérat­ion, désormais à deux heures du centre de Paris, aient basculés dans une nouvelle dimension urbaine, qui pourrait rendre vaine toute tentative de débrancher cette prise électrique de l'attractivi­té.

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